C’est quoi le live design ? Plongée dans l’après sortie d’un jeu avec Léo Lesetre

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Shiro Games est un studio indépendant français situé à Bordeaux, fondé par Sebastien Vidal et Nicolas Cannasse. Si on le connaît pour le récent Dune Spice War, leur plus grande réussite est sans doute Northgard, un jeu de stratégie avec des mécaniques de 4X à la sauce viking, sorti en 2017, et que le studio continue d’alimenter en contenu encore aujourd’hui. C’est un peu la raison de la venue de Léo Lesetre, game designer chez Shiro depuis dix ans, au forum Horizon(s). Clôturant ces deux jours exceptionnels, il anime une masterclass où il explique tout l’intérêt du live design : lorsque le développement d’un jeu continue après sa sortie.

Jeu vidéo côté pro : les tendances et projets du secteur. Cet article fait partie du programme lancé par Xboxygen qui consiste à passer de l’autre côté du rideau afin de découvrir certains des enjeux professionnels autour de notre média favori. Des dossiers créés suite à nos visites et interviews au forum Horizon(s), qui s’adresse pendant deux jours aux cadres et aux dirigeants du secteur du jeu vidéo. Vous pouvez retrouver tous les articles associés dans la rubrique dédiée aux métiers du jeu vidéo.

Clash of Clans

Pour comprendre le travail de Léo, il faut comprendre ce qu’est Northgard. Sorti à une période où le RTS n’est plus vraiment à la mode, Northgard propose au joueur de choisir parmi treize clans (aux caractéristiques très différentes les unes des autres) celui qu’il souhaite développer. Le monde dans lequel interagit le joueur est découpé en zones qui contiennent des ressources, des ennemis ou sont simplement des emplacements sur lesquels il va falloir créer des bâtiments. Le jeu comporte également une dimension « survie », puisque chaque unité qui compose un clan va consommer des ressources limitées et parfois difficiles à acquérir (bois pour se chauffer, nourriture), une fonctionnalité qui rend le jeu très différent d’un Age of Empire, dans lequel on cherche à construire la plus grosse armée possible. Ici, sans le développement économique nécessaire pour nourrir les personnages qu’il a créés, un joueur va voir sa population rapidement mourir de faim et donc perdre la partie. Cinq conditions de victoires différentes peuvent permettre de terminer une campagne, ce qui offre donc autant de stratégies.

Aujourd’hui, Northgard c’est deux campagnes solos distinctes, deux archétypes de factions avec dix-neuf clans, douze updates majeures déployées depuis la sortie initiale du jeu et bientôt un cinquième mode de jeu, lors de la prochaine mise à jour (au moment où cette masterclass avait lieu). Tout ça, c’est le fruit du travail d’une toute petite équipe (sept membres), qui continue de corriger, améliorer et alimenter le jeu depuis sept ans, alors que ce dernier vient de dépasser les quatre millions de joueurs tout récemment. Une belle réussite pour cet outsider, qui a su fédérer une communauté variée et passionnée.

Le live design

Et qu’est-ce donc que le live design ? Il s’agit en fait de tout le développement « post-release » d’un titre, qui inclut souvent des moyens de le monétiser afin d’en supporter financièrement l’expansion et l’amélioration. Ce n’est pas seulement l’apanage des free to play ou des jeux mobiles, ce modèle pouvant être appliqué sur n’importe quel type de jeu vidéo. Bien sûr, les exemples qui viennent immédiatement à l’esprit sont les MMO ou les battle royale : des jeux qui ont besoin d’un flux constant de contenu pour conserver leurs joueurs. Pour autant, un titre tel qu’Animal Crossing New Horizon a été « live » même si ce n’est plus le cas aujourd’hui, avec des mises à jour ponctuelles qui venaient ajouter de nouvelles activités, de nouveaux événements et toutes sortes de contenus qui n’étaient pas là lors de sa sortie. C’est également le cas de Stardew Valley qui entre dans sa version 1.6, mais qui joue les exceptions puisque son contenu post-release n’est jamais monétisé. Cela vient du fait que le jeu est développé par une personne seule et donc que ses coûts de développement sont suffisamment faibles pour que les nouvelles ventes suffisent à couvrir les frais de création de ces suppléments.

Le live design peut donc exister sans microtransactions et DLC payants, mais, dans la grande majorité des cas, ce sont des choses qui sont intégrées à un moment ou à un autre, et ce afin de soutenir les personnes qui se chargent de ce développement post-release. Ce modèle offre des opportunités uniques par rapport au développement classique, notamment grâce à une base de joueurs déjà installée. De plus, avec les informations recueillies sur ces joueurs (via leurs propres commentaires sur le jeu, grâce au data tracking ou les discussions qu’ils ont sur le discord du titre), il est possible de connaître les éléments qu’ils apprécient et ce qu’ils attendent du jeu. Léo s’est spécialisé dans cette branche du game design pour cette raison : pouvoir inclure les joueurs et leurs attentes dans le processus de développement du contenu de Northgard.

Le live design c’est donc se placer dans une démarche d’amélioration permanente d’un titre, grâce au feedback de ses joueurs. C’est aussi un moyen de prendre des risques, puisque même un échec pourra être modifié, repensé et amélioré pour satisfaire les joueurs. Une liberté qui permet d’être ambitieux et d’essayer des choses que le studio ne se serait pas permises sur un modèle classique.

Pour que le développement live puisse fonctionner, il faut connaître les joueurs, il faut connaître leurs attentes sur le jeu, il faut chercher à s’améliorer constamment, il faut prendre des risques [...] et il faut avoir cette ambition d’aller chercher des choses nouvelles.

La communauté de Shiro

Un jeu live c’est d’abord sa communauté. Dans le cas de Northgard, celle-ci s’est mise en place très rapidement, lors de l’early access lancé un an avant sa sortie officielle. C’est ce qui a permis de prioriser les derniers éléments et les derniers mois de développement du jeu pour répondre aux attentes des joueurs. À ce moment-là, il n’y avait que les clans de base et le mode PVE classique, c’est la communauté qui a permis l’ajout de la campagne et du mode PVP. Aujourd’hui encore, dès que Shiro Games travaille sur un nouveau contenu, celui-ci est soumis à des phases de bêta fermées et ouvertes pour inclure les joueurs et avoir leur retour tout au long du développement.

Tous les joueurs peuvent venir échanger avec nous. On lit la plupart des messages, on n’y répond pas toujours, mais on essaie de rester conscient de ce que les joueurs pensent.

Shiro Games pousse le concept jusqu’à créer des questionnaires annuels afin de connaître les attentes des joueurs et les points à prioriser. Le studio fait aussi du data tracking pour savoir quels sont les éléments du jeu avec lesquels les joueurs interagissent le moins ou avec lesquels ils interagissent d’une façon qui n’est pas celle attendue. Cela permet aussi d’identifier les déséquilibres entre les factions, notamment pour le PVP, pour lequel l’équipe souhaite que les joueurs aient des options de victoire suffisamment variées. Léo mentionne qu’il est important de croiser les sources d’informations et de ne pas uniquement se baser sur les commentaires, car certains joueurs « spamment » un problème particulier qui, souvent, ne reflète pas l’avis général de la communauté.

Il peut y avoir des choses qui sont problématiques pour seulement 1 % de la communauté, ce qui ne veut pas dire qu’il ne faut pas les régler, mais simplement qu’il faut contraster ça avec les besoins du reste des joueurs.

Une fois qu’ont été identifiés les compléments que l’équipe souhaite intégrer au jeu ainsi que la manière dont elle veut répondre aux attentes de la communauté, vient la mise en place d’une roadmap qui sera communiquée aux joueurs. Cela permet de leur montrer quels sont les problèmes pointés qui vont être réglés, dans quel ordre et le rythme de déploiement de chaque patch et contenu. L’équipe essaie de beaucoup communiquer avec ses joueurs grâce à des streams qui présentent le contenu en avant-première et leur explique comment cela va venir résoudre leurs problèmes. C’est une manière pour le studio de tempérer leurs attentes tout en se montrant transparent sur la direction prise pour faire évoluer le jeu. Il est important que les joueurs ne se fassent pas une idée du devenir du jeu qui n’est pas celle qui correspond à la direction prise par les développeurs.

On veut que toutes les communautés coexistent et puissent s’amuser entre elles.

Point de désaccord

Comme la communauté est incluse dans la conception et les itérations des contenus qui vont sortir sur le jeu, elle amène avec elle ses attentes du marché et de la compétition. Or, Northgard est un jeu de stratégie en temps réel, un genre dont les joueurs recherchent des sensations proches de celles d’un Starcraft II ou d’un Age of Empire IV, ce qui rend la rationalisation de ces attentes parfois difficile pour un studio qui n’a pas les moyens de ces deux prestigieux exemples. Cependant, là encore, le modèle live montre son efficacité, puisqu’il permet de mettre en place des MVP (minimal viable product), soit des versions minimales d’une figure que le studio va développer et sortir dans un état qui lui permet d’être intégrée au jeu, même si elle est incomplète. L’équipe viendra ensuite y ajouter des éléments et des modifications, via des patchs futurs, jusqu’à obtenir une version finale qui corresponde à sa vision et aux attentes.

Pour illustrer ses propos, Léo Lesetre nous parle d’une plainte récurrente des joueurs concernant le PVP et la possibilité de filtrer ses adversaires pour ne jouer que contre certains clans, ce qui casse l’équilibrage du jeu. La demande d’un système de matchmaking s’est faite tellement forte que les développeurs ont fini par l’implémenter, mais par briques : d’abord un mode très simpliste qui permet uniquement à un joueur de choisir un mode de jeu et de rentrer dans le matchmaking. Puis, ils ont greffé la possibilité de se mettre en file d’attente pour plusieurs modes. Ensuite, ils ont ajusté l’équilibrage à l’intérieur des lobbys, le temps d’attente, celui que les joueurs ont pour sélectionner leurs options… et ils continuent d’ajouter des améliorations et des modifications à cet add-on encore aujourd’hui. Le live design permet donc de déployer une nouveauté patch par patch, de manière progressive.

Léo précise que, même s’il est nécessaire de tempérer les joueurs, Shiro Games essaie vraiment de les suivre et de répondre à leurs demandes. Si Northgard était, à l’origine, un jeu pensé comme un RTS survival solo contre l’environnement, aujourd’hui c’est un jeu bien plus orienté sur des modes en équipes, à la fois en PVP et en PVE. Le mode le plus joué est d’ailleurs le 3V3, soit trois équipes contre trois autres, pour lequel les joueurs ont appris à développer des synergies entre les clans qui leur attribuent des rôles précis afin de se montrer les plus efficaces. « Tout ça, c’est quelque chose qui est entièrement venu des joueurs qui ont commencé à jouer de cette façon-là et que nous avons ensuite intégré au jeu. Aujourd’hui, c’est en fonction de ça que l’on pense les nouveaux clans que l’on va intégrer au jeu et que nous les présentons aux joueurs. »

En solo, c’est le mode conquest, lui aussi coopératif, qui est le plus joué. Le studio vient de pousser ça encore plus loin grâce au cinquième mode de jeu qui s’apprête à être déployé et qui propose une aventure plus roguelite, jouable jusqu’à quatre. « On suit les joueurs sur ce qu’ils veulent qu’on apporte au jeu, tout en gardant la main sur la façon dont c’est fait. » C’est grâce à cette souplesse de développement que Shiro Games parvient à conserver ses joueurs et à en inclure de nouveaux dans sa communauté.

Challenge

Le but est de suivre les joueurs, mais pas de faire exactement ce qu’ils attendent de nous.

Plus nous pratiquons quelque chose, plus nous sommes efficaces. Et plus nous sommes efficaces à quelque chose, plus nous pouvons le faire sans y penser. Ce qui veut dire qu’au bout d’un moment, lorsque l’on joue à un jeu que l’on connaît suffisamment bien, on joue en mode « automatique ». La question que pose l’équipe est donc : comment continuer d’offrir du défi à des joueurs qui ont plus de 3 000 heures de jeu ? Pour ça, Shiro Games s’appuie sur trois types de contenu : d’abord l’ajout de nouveaux clans, règles spéciales et missions, qui vont venir prolonger la durée de vie. Celui de nouveaux modes de jeux qui permettent de réexpérimenter le contenu déjà existant, mais d’une façon différente. Enfin, il y a ce que Léo Lesetre appelle les mises à jour disruptives, celles qui vont changer le contenu déjà présent dans le jeu et la façon dont le joueur a l’habitude de l’aborder. Ça comprend tout ce qui est rééquilibrage, retravail des mécaniques, en somme tout ce qui vient changer l’existant plutôt que d’inclure de la nouveauté.

Mais il est également possible de créer ce contenu disruptif avec du contenu additionnel, en prenant le contrepied de ce que le joueur est habitué à faire pour le forcer à changer ses habitudes. Léo prend l’exemple du clan du rat, qui a pour particularité de nécessiter que ses unités soient blessées pour être plus efficaces. Ce clan a été conçu pour changer les habitudes des joueurs qui ont appris à jouer sans jamais avoir d’unités blessées, puisque ces dernières coûtent des ressources tout en étant moins efficaces. Le clan du rat force donc les joueurs à désapprendre des mécaniques qui sont devenues des habitudes et à aller contre quelque chose qu’ils ont intégré, ce qui les force à rejouer de manière consciente en les poussant à être actifs. Ce processus leur a permis de redécouvrir le plaisir d’être mauvais à une mécanique avant de la réapprendre et de recommencer à la maîtriser.

Mais cette méthode à une contrepartie, celle de créer des mécaniques qui apportent une charge cognitive supplémentaire pour les joueurs qui ne sont pas déjà bons, qui ne maîtrisent pas encore le jeu. Pour les nouveaux joueurs, être confrontés rapidement à ce genre de dispositif peut être plus éprouvant. « En expérimentant et en tentant des choses un peu différentes, on va parfois essayer des mécaniques qui ne vont pas fonctionner du premier coup. Dans ce cas, soit on la retravaille plus tard à l’aide de patchs, soit on admet qu’elle a un effet plus négatif que positif et on n’hésite pas à la retirer.  » C’est encore l’un des avantages du format live du jeu : pouvoir expérimenter.

Live conception

Pour que ces « greffes » de jeu soient possibles, il faut que le titre soit pensé, à l’origine, comme un jeu compatible avec l’idée de live design et donc conçu pour être adaptable, flexible et capable de recevoir du contenu additionnel. Ce qui n’était pas le cas de Northgard à sa sortie. C’est devant l’engouement et l’enthousiasme de la communauté qui s’est créée autour du jeu que l’équipe de Shiro a pris la décision d’en faire un titre live. Comme Northgard n’avait pas été conçu dans cette idée, il a fallu que les équipes reconstruisent de nombreuses parties du titre sur lesquelles elles sont venues faire des greffes petit à petit. « Si nous devions refaire le jeu de zéro aujourd’hui, on le concevrait de façon à le rendre beaucoup plus flexible à la base, mais désormais, lorsqu’on ajoute de nouvelles mécaniques, on les pense comme étant modulables et pouvant recevoir dix fois plus de contenu que ce qu’elles contiennent lorsqu’on les ajoute. »

Tout ça veut dire que le cadre du jeu augmente à chaque mise à jour, puisque même en le construisant de manière flexible, tous les ajouts et tout le contenu supplémentaire créé par la suite rentrent en compte dans le développement. Toute nouvelle faction créée doit être pensée pour être intéressante dans tous les modes de jeu, pas uniquement dans ceux qui existaient de base. Il faut donc parvenir à trouver le bon rythme et l’équilibre idéal dans les sujets et les modifications apportées.

Pour viser une amélioration permanente, il faut penser à du gameplay qui ajoute de la profondeur au jeu et des options intéressantes pour le joueur. Cela a un impact sur l’équipe artistique, qui doit garder le jeu à jour vis-à-vis des standards visuels de la concurrence. Les assets graphiques de Northgard ont été refaits plusieurs fois, petit à petit, afin de garder le jeu à niveau malgré ses sept ans d’existence. C’est aussi un défi pour l’équipe technique, puisqu’il faut souvent détruire le code d’une partie du jeu et le reconstruire entièrement pour le rendre capable d’accueillir une mise à jour. Le live design est un travail d’amélioration constante de tous les pôles du jeu et de la part de toutes les équipes.

Léo prend pour exemple la victoire par la foi, qui est l’une des méthodes de réussite possible dans Northgard et que l’on pourrait rapprocher d’une victoire scientifique dans Civilization. À l’origine, il suffisait d’accumuler suffisamment de foi durant une partie pour recevoir les faveurs d’un dieu et gagner. Un système qui était soit trop facile (en focalisant les unités sur la prière), soit trop long et donc pas utilisé par les joueurs. L’équipe a décidé de le modifier pour lui apporter plus de challenge, tout d’abord en obligeant la création d’un bâtiment qui permet de collecter la foi, à l’image d’une merveille, mais en plus en ajoutant une règle qui fait que plus ce bâtiment est construit proche du centre de la carte, moins il va avoir besoin de foi pour débloquer la victoire. C’est une manière de rendre cette caractéristique plus compétitive en PVP, puisqu’un joueur qui désire gagner par ce biais va devoir s’exposer en mettant son bâtiment proche du centre et donc plus proche de ses ennemis (chaque clan commence à un bord opposé de la carte et s’étend petit à petit vers son milieu). Au contraire, s’il désire le protéger en cachant son dépôt de foi au cœur de son propre territoire, l’accumulation va lui prendre bien plus de temps et donc offrir des possibilités de riposte à son ou ses adversaires. Ce changement a permis à cette victoire d’être jouée en multijoueur, ce qui n’était pas le cas auparavant.

Cet exemple montre à quel point un changement implique toutes les équipes de Shiro, puisque pour cette modification il a fallu retravailler les assets graphiques, repenser la façon dont le système fonctionnait, le recoder entièrement ainsi que tous les éléments qui interagissaient avec l’accumulation de foi, etc. Léo ajoute que comme il y a quatre modes de jeux sur Northgard et à peu près un quart des joueurs sur chacun de ceux-ci, il est important de n’en délaisser aucun pour faire plaisir à tout le monde. Étant donné qu’il est impossible de satisfaire les joueurs de chacun de ces modes en même temps, l’équipe essaie de penser ses updates de manière à ce qu’elles soient « cross section ». Typiquement, ce changement sur la victoire par la foi la rend plus intéressante à la fois en PVE et en PVP, mais ça n’affectera en revanche pas les joueurs qui ne s’intéressent qu’à la campagne. L’équilibre c’est donc aussi essayer de prendre en compte tous les types de joueurs et toutes les attentes. Si l’an dernier la majeure partie des mises à jour se focalisaient sur l’affrontement multijoueur, cette année l’équipe s’est concentrée sur les modes qui mettent en avant la coopération.

De la même manière, Léo Lesetre explique que son équipe essaie de ne jamais trop privilégier les joueurs qui paient pour du contenu par rapport à ceux qui n’achètent pas les DLC, puisque chaque contenu additionnel de Northgard comporte des éléments gratuits. Shiro Games se refuse aussi à proposer des éléments qui s’apparenteraient à du « pay to win » afin de ne frustrer personne. « Notre volonté d’accommoder tout le monde du mieux qu’on peut avec nos moyens a une influence sur nos rythmes de production. » Actuellement, Northgard reçoit six updates par an : trois majeures (une gratuite et deux DLC payants) et trois mineures, ce qui laisse quatre mois environ entre chaque grosse mise à jour pour leur permettre d’être retravaillées. Malgré cela, Léo regrette de ne pas toujours avoir le temps de faire tout ce qu’il aurait aimé dans un contenu.

Sept ans de live design

Grâce à ce système, Northgard parvient à maintenir et développer sa communauté. Il arrive que les nouveaux joueurs conquis apportent des façons de jouer innovantes, qui surprennent les développeurs jusqu’à les pousser à s’adapter et à, parfois, investir plus dans ces mécaniques de jeu auxquelles ils n’avaient pas pensé. L’arrivée du nouveau mode de jeu implique pas mal de pression et d’espoir pour l’équipe, puisqu’il amènera peut-être une nouvelle répartition des joueurs (20 % dans chaque mode), ce qui demandera de repenser encore d’une façon différente les futures updates pour qu’elles puissent convenir à tous. Néanmoins, cela reste «  très cool de voir de nouveaux joueurs débarquer et apprécier ce qu’on fait, et c’est le plus important ».

Durant la fin de cette conférence qui consistait en un échange entre le public et lui, Léo Lesetre répond à la question d’un étudiant qui souhaite savoir s’il est nécessaire d’être très bon à son propre jeu pour pouvoir comprendre les attentes de sa communauté. La réponse du jeune développeur, qui, de son propre aveu, lui apporte parfois de vives critiques de la part de certains joueurs, nous semble pourtant particulièrement pertinente : « Il faut jouer à son jeu, mais il faut rester suffisamment mauvais pour ne pas perdre de vue les sensations des nouveaux joueurs qui le découvrent. Quand tu accumules des milliers d’heures sur un titre, tu prends le risque de créer des contenus qui ne s’appliquent qu’à des gens qui ont la même expérience et qui seront donc opaques pour les débutants… au risque de les perdre. » Encore une fois, tout est question d’équilibre !

C’est sur ces paroles que nous quittons le forum Horizon(s) et le superbe opéra de Bordeaux. Deux journées riches en rencontres et en découvertes, dont nous ressortons avec une vision différente de notre loisir préféré. Nul doute que le jeu vidéo va continuer d’évoluer dans les années à venir et certaines de ces évolutions nous ont été présentées ici. Un grand merci à tous les intervenants pour leur professionnalisme, leur bienveillance et leur disponibilité, ainsi qu’à l’agence 7Ccom d’avoir joué les intermédiaires entre nos journalistes et les différents acteurs de ce salon d’exception. Au plaisir de découvrir de nouvelles choses à vos côtés l’année prochaine !

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