Test - FIFA 22 - L’illusion ne fonctionne plus

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Au moment d’écrire ces lignes, j’ai le cœur qui saigne, le cœur d’un amoureux des jeux vidéo, du football, des jeux vidéo de football. J’ai vibré il y a 30 ans sur Kick Off et autres perles de Dino Dini. J’ai accompagné les débuts de FIFA et ISS qui deviendra PES. J’ai grandi avec la rivalité “éternelle” des deux mastodontes, qui pendant plus de 20 ans, nous ont parfois déçus et souvent régalés. Mais en ce début d’automne 2021, l’heure est gravissime pour les vieux passionnés de simulation de foot. Konami a fini par enterrer PES et vient de faire rire le monde entier avec la sortie calamiteuse du piteux eLootball, peut-être la pire honte de l’histoire du jeu vidéo. Pour la première fois, j’ai une telle rage que je pourrais me transformer en Momo Henni et fracasser ma pauvre Series X à coups de batte. Mais elle n’y est pour rien la pauvre, et de toute manière ça ne changerait rien. Je ne vais pas vous mentir, j’ai toujours été un joueur pro-PES, la communauté active de Xboxygen sur Discord le sait très bien, je ne l’ai jamais caché. Reste qu’en 2021, si on cherche une nouvelle proposition crédible, il n’y a plus qu’un choix, FIFA 22. Après de longues heures de jeu, l’illusion a failli marcher mais le charme s’est vite étiolé. Je suis désespéré...

Il est cinq heures, Paris s’éveille

Canto et les oiseaux, une longue histoire...

Pourtant tout avait bien commencé. Dès le lancement du jeu, EA nous surprend avec une sorte de mini-film interactif en plein Paris. Notre avatar que l’on customise rapidement est réveillé en sursaut par son téléphone dans une chambre d’un hôtel huppé de la capitale. C’est que nous sommes en retard pour vivre une journée magique. Après un parcours mouvementé dans les rues de la capitale où l’on croisera les légendes vivantes Canto et Beckham, direction le Parc des Princes et la suite d’un petit tutoriel expliquant les bases du gameplay. Le clou du spectacle sera le match de gala de la soirée, PSG - Chelsea, que l’on est invité à jouer, bien entendu.

Un tuto original

On a déjà oublié les petits écueils de cette introduction réussie comme des modélisations de visages parfois ratées et les voix non réelles de grands joueurs français rencontrés par notre avatar, dont celle de celui qui est pourtant sur la jaquette de FIFA 22. Ce premier match joué est énorme et nous sommes pris dans l’ambiance folle du Parc. L’immersion est totale et nous avons des Payet plein les yeux. Sur le rectangle vert, tout se passe à merveille, mes réflexes de joueur PES favorisent la circulation du ballon, je cherche patiemment la faille. Hakimi fait un appel sur son aile droite, petite passe en profondeur de Messi après un relais et le Marocain déborde, centre au premier poteau, Mbappé coupe la trajectoire et marque le premier but de la partie d’une tête imparable. La victoire est facile au final, tout est fait pour qu’on soit immédiatement à l’aise avec le jeu et qu’on ne gâche pas la fête. Ici c’est Paris !

Le plan marketing fonctionne à merveille. Il est important d’impressionner d’entrée et c’est chose faite avec brio, en s’amusant des clichés sur la vie parisienne et son côté bling-bling. C’est également là où l’on se rend compte de la montée en puissance du PSG qui est devenu une vraie marque mondiale, adoubée par les Américains d’EA Sports. Néanmoins, en romantique du football, mon intérêt principal pour un jeu de foot sera toujours centré sur le gameplay et la retranscription la plus fidèle possible d’un vrai match de foot. C’est sur ce point crucial que PES avait régulièrement pris le dessus sur FIFA ces dernières années. Nouvelle génération de consoles oblige, j’étais donc impatient de découvrir ce qu’allait nous proposer EA. En effet, la campagne marketing avait bien mis en lumière l’exclusivité de la technologie Hypermotion pour les versions next-gen. Une feature prometteuse qui doit servir de fondation pour le gameplay des prochaines années. Le problème d’un outil, aussi bon soit-il, est qu’il dépendra toujours de ce que veut en faire son utilisateur.

L’Hypermotion apporte un vrai plus

Burak n’a pas mérité une modélisation fidèle

Dans sa quête de nous proposer toujours plus de réalisme, EA nous sort donc cette année l’Hypermotion. Cette technologie se base sur une motion capture non pas d’un joueur isolé mais des 22 joueurs en plein effort lors d’une rencontre de football. Toutes les données détaillées issues des mouvements ont ensuite été retravaillées et soumises à une intelligence artificielle dans le but de retranscrire de vrais actions et comportements collectifs dans le jeu. Plus de 4000 animations ont ainsi été ajoutées. De plus, la physique de la balle s’est améliorée. Les rebonds sont plus réalistes et surtout les trajectoires des longs ballons sont beaucoup plus belles à regarder et grisantes.

Alors oui, en comparant les matchs de FIFA 22 avec ceux de son prédécesseur, on remarque nettement l’apport de l’Hypermotion. Individuellement, les joueurs adoptent un comportement moins robotisé, le contrôle du ballon paraît plus naturel et l’immersion s’améliore grandement avec tous ces petits gestes anodins mais ô combien réalistes, tels que des signes de replacement pour son coéquipier ou un appel du bras pour alerter le passeur sur la direction voulue de son offrande. Autres exemples marquants, juste avant une frappe, le tireur ajuste sa foulée avec des petits pas, ou lors de duels aériens, la lutte pour gagner la position dominante est plus crédible, avec tirage de maillots en option. Collectivement, les lignes défensives ont tendance à mieux respecter le bloc et à se déplacer en conservant la disposition sur le terrain. Il faut l’avouer, toutes ces modifications, parfois insignifiantes, renforcent le réalisme.

Les démons du passé sont toujours présents

Le charismatique Hugo est adoré par les fans des Spurs

Malheureusement, tous ces efforts sont balayés par le véritable problème des jeux FIFA : une inertie des joueurs quasi inexistante et un gameplay qui privilégie vitesse et dribbles à outrance. Pour les amoureux du foot, ce péché originel finit par ruiner toute l’expérience de jeu, d’épisode en épisode, et le cru 22 ne fait pas exception. Un rythme de jeu par défaut légèrement plus lent cette fois et l’apport de l’Hypermotion ne font illusion qu’une poignée de matchs, juste le temps de s’adapter à ces nouvelles conditions de jeu et de redécouvrir les dingueries habituelles. Et la liste est longue : joueurs qui semblent flotter sur la pelouse, membres désarticulés lors de certaines animations, bugs de collision, dribbles irréalistes, aucun contrôle de balle raté, passes téléguidées (et lasers cette année), contres improbables dans la surface, passes qui transpercent parfois les joueurs, changements de curseur imprécis, et j’en passe. EA peut fanfaronner sur l’ajout de nouvelles animations, elles ne servent à rien si on ne corrige pas celles ratées du passé.

Le Neymar de l’Est, élevé à la choucroute

Concernant les dribbles, on frôle le séjour en enfer. Tant que les développeurs permettront à n’importe quel quidam sur le terrain de dribbler comme un clown sans perte d’énergie, ce ne sera pas du foot mais du cirque. Même l’IA se met à sortir des dribbles venus d’une autre planète. J’ai pu assister à un moment épique comme un contrôle orienté derrière la jambe d’appui sur réception d’une passe laser, suivi immédiatement du même dribble derrière la jambe dans le sens inverse, terminé par un rateau pivotant puis une passe décisive dans la foulée, le tout effectué en une fraction de seconde (il a fallu revoir le ralenti pour tout comprendre) par le Kal Drogo du Racing Club de Strasbourg, le bien-nommé Ludovic Ajorque. Des dingueries, je vous avais dit !

Sur le sujet de la vitesse, à quoi ça sert de s’embêter à soigner un jeu de possession quand il suffit de faire deux passes pour traverser le terrain et une troisième pour lancer un Tout-droit en profondeur qui déposera n’importe quel défenseur, soudainement alourdi d’une caravane ? Inutile de préciser qu’en situation défensive, les milieux de terrain ne servent à rien puisqu’ils sont automatiquement éliminés par ces dites passes. On transpirait devant la possibilité de faire des accélérations fulgurantes, pour le moment ce nouveau mouvement n’est pas cheaté, ouf !

Une défense quand même plus solide

Le double pressing en action

Malgré tous ces défauts récurrents, les développeurs ont effectué quelques ajustements bienvenus, principalement dans le secteur défensif. Effectuer un double pressing est devenu plus lisible grâce à l’ajout d’un curseur vert placé au-dessus du deuxième joueur guidé par l’IA. Dans le feu de l’action, on peut enfin savoir d’un coup d’œil quel joueur peut être activé pour nous seconder, plutôt que d’actionner l’option à l’aveugle quitte à lâcher le bouton immédiatement quand on s’aperçoit que ce n’est pas le joueur adéquat qui vient en soutien.

Un miracle à bout portant

L’ajustement le plus salvateur concerne l’amélioration significative des gardiens, surtout ceux de très haut niveau. Globalement, les derniers remparts sont devenus plus efficaces lors des un contre un et peuvent réussir des parades miracles plus fréquemment. Ce sont les scores fleuves, symboles classiques de la franchise, qui en pâtissent un peu. Toutefois, on remarque que les frappes enroulées ou les tirs en force au premier poteau d’un Tout-droit qui entre dans la surface par les côtés demeurent toujours efficaces. Rassurez-vous, pour les gardiens de niveau standard, les cagades sont toujours présentes pour pimenter certains matchs.

Le traitement de la Premier League est remarquable

Enfin, il faut l’avouer, FIFA est vraiment très bon dans la mise en scène et le folklore autour des matchs. Que ce soit pour un petit match de Ligue 1 ou un match couperet de Ligue des Champions, l’emballage est irréprochable et on se croit véritablement devant le vrai match retransmis sur notre téléviseur. Les chants des supporters sont crédibles et proposent une belle ambiance. Le speaker fait une nouvelle fois le job lors des changements de joueurs et l’éloge des buteurs et continue de nous amuser avec ses annonces décalées sur la fermeture de la boutique du stade ou la Clio mal garée. Même la partie statistiques des matchs s’étoffe avec notamment l’ajout remarqué de l’incontournable expected goals. Suite au départ forcé de Pierre Ménès, seuls les commentaires d’Hervé Mathoux accompagnent nos exploits sur le rectangle vert. Ce dernier s’autorise quelques allusions à cette situation. Si elles nous ont fait sourire au début, on sent qu’elles finiront par nous lasser et devenir inappropriées à terme.

Difficile de ne pas trouver son bonheur

Le début d’une épopée !

L’expérience de match est essentielle pour une simulation de foot mais pour rester sur le jeu toute une année, le contenu est autant important sinon plus. C’était le gros point noir des PES et c’est toujours la grande force des FIFA. Chacun trouvera son bonheur et un mode de jeu qui répond à ses attentes pour s’amuser jusqu’au prochain opus. Pour ceux qui comme moi apprécient l’aspect simulation et le jeu posé, la Carrière en mode manager sera incontournable. Après quelques réglages possibles de l’IA via le menu des paramètres du jeu et la sélection d’un niveau de difficulté élevé, on finit par limiter du mieux possible les dingueries et profiter d’un gameplay qui fera le café Grand-mère à défaut d’un grand cru Nespresso. La Carrière demeure assez complète et toujours bien fichue. C’est à nous de gérer les entraînements, les transferts, les tactiques et l’accumulation des matchs. La grosse nouveauté cette année est la possibilité de créer son propre club de A à Z, du choix des couleurs et du logo en passant par la personnalisation du stade et de son ambiance. Il est temps pour le Xboxygen Football Club de remporter sa première Ligue des Champions.

La Carrière en mode Mon joueur et le mode Clubs Pro connaissent quelques ajustements sur FIFA 22. Le système de progression de notre joueur est devenu plus lisible et addictif. De plus, nous pouvons désormais sélectionner de un à trois atouts parmi une vingtaine selon notre niveau d’expérience atteint, tels que star des coups de pieds arrêtés, centres au millimètre ou pro de la récupération. Cette année, Clubs Pro s’ouvre à la mixité et nous pouvons incarner une joueuse. Il n’y aura aucune incidence sur le gameplay, la différence ne concerne que l’aspect cosmétique.

My name is Bond, Sarah Bond

Concernant les autres modes de jeu et principalement le jeu en ligne, les défauts du gameplay des FIFA sont malheureusement exacerbés. Ces modes s’adressent donc à ceux qui apprécient particulièrement les actions spectaculaires, voire irréalistes, et ne voient le football que par le prisme des joueurs et non celui du collectif. Volta, successeur de FIFA Street, décevra les amateurs. En effet, l’aventure scénarisée est mise à la poubelle pour être remplacée par des activités quasi exclusivement en ligne dans le but d’améliorer son joueur et remplir sa garde-robe. La présence de mini-jeux comme le tennis-ballon ne comble pas le vide. La seule bonne idée semble être l’ajout d’une barre de skill permettant de débloquer des capacités spéciales.

Reste le cas de FIFA Ultimate Team, la poule aux œufs d’or d’EA. Un match de découverte suffit pour comprendre la douille de ce mode, le fameux algorithme qui transforme un joueur pro en un vétéran de club de district souffrant d’arthrose sévère, dans le seul but qu’on investisse nos deniers dans des packs de cartes afin d’obtenir des joueurs de meilleure qualité. Et ce n’est pas la proposition de visualiser gratuitement le contenu d’un pack toutes les 24 heures qui permet de faire amende honorable. Profiter de l’addiction et de la frustration des joueurs pour les essorer n’est pas très glorieux mais rapporte très gros. Je ne comprendrai jamais pourquoi ce mode de jeu est devenu si populaire et incontournable, je suis trop vieux pour ces conneries. Les aficionados se contenteront de la seule vraie nouveauté qui concerne le système de progression. On démarre en Division 10 dans le mode Rivals. Les victoires permettent d’atteindre des checkpoints ou de monter de division. Chaque match, même en cas de défaite, permet d’accumuler des points dans une jauge de qualification au programme FUT Champions. Ce système a l’avantage d’être beaucoup moins contraignant que l’ancien. Bien entendu, de nombreuses récompenses interviennent à chaque étape de notre progression pour entretenir la flamme.

Le derby romain en direct de l’Olimpico

Enfin, la mort de PES ne signifie pas l’arrêt de la guerre des licences, puisque Konami continue de son côté à signer des exclusivités avec des clubs ou des équipes nationales pour son nouveau eFootball. Ainsi, le Calcio prend cher sur FIFA 22 avec l’utilisation perdue des noms, logos et maillots des deux clubs romains, de la Juve et de l’Atalanta. L’absence de la Turquie et de nombreuses sélections africaines fait également tache. Et ce n’est pas l’ajout de la ligue indienne qui compensera le manque.

Testé sur Xbox Series X.

Bilan

On a aimé :
  • Une mise en scène toujours exceptionnelle
  • Les apports de l’Hypermotion dans le gameplay
  • L’amélioration des gardiens
  • La création d’un club dans la Carrière
  • Une séquence d’introduction immersive et réussie
On n’a pas aimé :
  • Toujours les mêmes défauts récurrents
  • L’absence de certains clubs et équipes nationales
  • FUT : Casino Royale
  • Volta à la diète
Un bon jeu FIFA, une mauvaise simu de foot

FIFA 22 est malheureusement la suite logique de tous ses prédécesseurs. Pour son premier véritable opus consacré aux consoles de nouvelle génération, EA (ne veut pas) n’arrive pas à rectifier les défauts récurrents qui plombent sa franchise depuis des années et se contente d’améliorer le gameplay et l’ambiance sur des aspects importants mais secondaires. Même graphiquement, le gap demeure peu significatif et l’on reste sur notre faim. Pour les amateurs de FIFA, l’épisode 22 devrait toutefois être un cru satisfaisant sous réserve d’un patch qui pourrait tout chambouler. Pour les amoureux de simulation et du vrai foot, mieux vaut écouter le conseil du légendaire Gary Lineker : “FIFA est un jeu simple ; 22 clowns dribblent avec un ballon pendant 90 minutes et à la fin, c’est toujours le football qui perd.”

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FIFA 22

Genre : Sport

Éditeur : Electronic Arts

Développeur : EA Sports

Date de sortie : 01/10/2021

Prévu sur :

Xbox Series X/S, Xbox One, PlayStation 4, PC Windows

2 reactions

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EverFish

02 oct 2021 @ 19:39

J’avais bien aimé l’early access mais la version définitive retrouve les mêmes travers que le 21. Enfin tout est dit dans le test et merci d’ailleurs, dommage qu’il n’y ait plus de concurrence valable.

PaT Chevaliers

03 oct 2021 @ 08:46

FIFA c’est avant tout du football spectacle, c’est comme ça qu’il faut l’aborder et pas autrement... avec une dose d’acarde/simu, les FIFA n’ont jamais étés différents (mis à part lors de rares années). C’est du football casual avec un bel enrobage, bien ficelé, de beaux ralentis, des ambiances dans les stades crédibles et surtout une bonne machine à fric avec son FUT.

Pour un gars comme moi, qui va jouer juste sans ce prendre la tête, sans jouer à FUT, juste des matchs de saisons et de LDC, ou en ligne avec des potes, ce FIFA 22 me convient largement ;-)

Parler de concurrence ? cela fait une paire d’années que EA ses FIFA sont seuls à jouer sur le rectangle vert ! PES n’est plus qu’un nom, l’ombre de lui-même, et c’est pas avec son eFootball sorti dernièrement que sa risque de changer ?! Tout du moins en l’état actuelle de cette version :-)) :-)) :-))