Après avoir remis au goût du jour, il y a quatre ans, la gestion hospitalière loufoque, rendant hommage au vénérable Theme Hospital de 1997, Two Point Studios s’aventure cette fois dans la gestion des campus universitaires. Sorti depuis le 9 août 2022 sur Xbox One et Series X|S, PC, Playstation 4 et 5, Nintendo Switch et directement dans le Game Pass, Two Point Campus fait peut-être déjà le bonheur des amateurs de jeux de gestion, fans de son grand frère Two Point Hospital ou simples curieux avides des dernières nouveautés du catalogue de jeux sous abonnement de Microsoft. Force est de constater qu’ils n’ont pas eu tort de se jeter tels des morts de faim sur ce nouvel os à ronger. Campus tient globalement ses promesses, mais est-ce suffisant pour obtenir la mention Très Bien et les félicitations du jury ? Suspense…
Le comté où il fait bon vivre !
Succès oblige avec Hospital, le studio britannique et son éditeur Sega n’allaient pas en rester là. La facilité aurait pu pousser Two Point à se pencher sur la gestion des parcs d’attractions. Bien avant Theme Hospital, Theme Park fut déjà une idée brillante sortie tout droit du cerveau des développeurs du mythique studio Bullfrog Productions, fondé par Peter Molyneux et disparu en 2004. Que nenni, Two Point souhaitait s’affranchir de son modèle un peu trop étouffant. La gestion de campus universitaires est une friche à explorer, hormis quelques tentatives parues çà et là dont un DLC récent de Cities : Skylines. Et avouons que cette idée nous avait mis l’eau à la bouche ; l’excitation de nous replonger dans un univers qui représente pour beaucoup d’entre nous nos meilleures années.
Nous voilà de retour à Two Point County, la région où il y a le plus d’hôpitaux au kilomètre carré. Ce que nous ne savions pas, c’est que le territoire compte également un nombre d’universités impressionnant, de quoi recaser en toute discrétion notre Jean-Mimi Planquer national ! Douze campus, plus fantasques les uns que les autres attendent nos exploits de gestionnaires hors pair. Hogwarts Legacy vient d’être repoussé ? Pas de problème ! Ressusciter Poule-de-Lard et lui rendre son prestige d’antan servira d’apéritif en attendant le hors-d’œuvre décalé à 2023. Une nouvelle aventure de Sam Fisher vous manque depuis dix ans ? Pas de soucis, le campus de Blundergrad est là pour former les futurs talents du contre-espionnage, et qui sait, nous aurons peut-être un Two Point Cell avant un prochain Splinter Cell. Bref, l’humour so british de la franchise Two Point est toujours présent et reste l’un des principaux atouts de ses titres.
Douze campus, soit autant de terrains de jeu différents pour exprimer nos talents, mais ne croyez pas que ce ne sont que de simples skins de paysage. Chacun dispose de parcelles constructibles bien définies qui atténuent forcément notre liberté créatrice. Ce qui peut se comprendre dans la partie Scénarios du titre devient décevant pour la partie Bac à sable. Toutefois, les artistes et designers du studio ont du talent. Nous tombons systématiquement sous le charme d’un nouveau site et son level design représente un défi supplémentaire à surmonter. Certains d’entre eux jouissent même d’un climat spécifique et comme le dit le vieux dicton populaire : “Ça caille à Poule-de-lard, ça brûle à Fluffborough“. Et nous le savons tous, un étudiant qui a trop froid ou trop chaud est un flemmard en puissance.
La piste aux étoiles
Si nous sommes libres de choisir n’importe quel campus dans le mode Bac à sable, l’immense majorité d’entre nous entamerons le mode Nouvelle Partie qui représente simplement un mode Histoire revisité à la sauce Two Point. Nous débloquons les nouvelles zones au fur et à mesure que nous remplissons les défis proposés par les scénarios. Si obtenir une étoile permet de passer rapidement au campus suivant, nous conseillons fortement d’atteindre les trois étoiles pour chacun d’entre eux.
En effet, l’obtention des étoiles est le fruit de plusieurs objectifs à atteindre (bénéfice minimum, pourcentage de bonheur, niveaux de prestige, etc.) mais pour la troisième étoile, l’un d’entre eux représente la victoire finale face au boss local PNJ qui nous aura maltraités pendant des heures, à coups d’invasion de rivaux prêts à en découdre ou de pluies de météorites magiques. Ce serait criminel de ne pas “finir” le campus de style médiéval Noblestead sans gagner la joute finale face au chevalier Lord Blaggard ou de ne pas vaincre l’invincible équipe des Jumbo lors d’un match de cheeseball sur le campus made in California.
Même si cela donne un aspect plus dirigiste au titre, obtenir les trois étoiles pour chaque scénario, c’est surtout comprendre en profondeur le gameplay, les attentes du jeu et tous ses mécanismes. Comme pour Hospital, les scénarios ne sont finalement qu’un tutoriel géant de plusieurs dizaines d’heures de jeu, où chaque nouveau campus ajoute des cursus universitaires différents, de nouvelles difficultés et mécaniques de gameplay à assimiler. Ainsi, ce sont 17 cursus de formation au total qui renouvellent en partie l’expérience de jeu. Par campus et scénario, un ou deux nous sont imposés d’entrée. Il est possible par la suite d’introduire sur l’université une ancienne formation débloquée d’une campagne précédente, mais l’intérêt reste maigre tellement les nouveaux cursus sont diaboliquement adaptés au thème du lieu.
Nous retrouvons une fois de plus l’humour et la patte artistique hérités de Two Point Hospital. C’est un plaisir de découvrir les délires et trouvailles autour des formations telles que Robotique, Archéologie, Chevalerie, Arts obscurs ou Petites combines. Le style graphique et la direction artistique des titres signés Two Point font toujours mouche et regarder cette fourmilière s’agiter via des animations tordantes est un vrai régal. Même les annonces de la standardiste, toujours en version originale, sont encore de la partie. Seule la musique de fond nous a lassés rapidement, du même niveau que celle d’un ascenseur.
Le changement, c’était pas trop maintenant
Contrairement aux malades de Hospital, les étudiants de Campus sont là pour un minimum de trois longues années au sein de l’établissement. Il faudra veiller à leur bien-être : résidences universitaires, salles d’hygiène, foyer étudiant, salle du syndicat, aménagements extérieurs, clubs, stands d’alimentation, bornes d’arcade et autres équipements de divertissement. Nous devons organiser le planning des soirées ciné, fêtes, concerts ou matchs de compétition. Malheureusement, cette planification finit par devenir fastidieuse. Sans doute l’un des points à améliorer ou à rendre plus fun pour le studio via une future mise à jour. La maladie n’étant jamais loin. Il est également nécessaire d’aménager des infirmeries et d’apporter du soutien psychologique pour soigner les étudiants les plus fragiles et calmer leur envie de démission.
Pour les amateurs de microgestion, une tonne de mobilier et de décorations sont à notre disposition pour embellir tout ce patrimoine, sous réserve de les débloquer au fur et à mesure avec une monnaie supplémentaire gagnée en jeu, les kudosh. Rassurez-vous, le jeu n’est lié à aucun système de microtransactions. Il y a donc vraiment de quoi faire pour apporter sa touche personnelle. Toutefois, le prix à payer est là encore une certaine redondance quand nous démarrons un nouvel établissement et reconstruisons les installations de base. Heureusement, Two Point a eu le bon goût de garder pour Campus les options, parues tardivement via une mise à jour de Hospital, de copier-coller les salles ou de les enregistrer pour une future utilisation. De quoi gagner un temps fou une fois qu’on est satisfait de l’aménagement d’une salle en particulier.
Finalement, les plus gros changements par rapport à Hospital, au-delà de la thématique du jeu, se retrouvent dans le rythme du gameplay et l’existence de “salles” extérieures pour certaines formations, qui apportent un peu de fraîcheur à la franchise. Qui dit école, dit année scolaire. Entre chaque année, un petit bilan s’effectue avec la remise des diplômes. C’est surtout l’occasion d’améliorer les formations universitaires en cours ou d’en ouvrir une nouvelle via des points de formation, avec pour objectif toujours plus d’étudiants à gérer, et donc d’argent à récupérer. Ces points de formation s’acquièrent au fur et à mesure de la notoriété croissante de notre université. Pour chaque cursus, la boucle de gameplay reste simple : aménager les bâtiments prérequis pour débuter une nouvelle année scolaire, embaucher l’équipe pédagogique nécessaire, en prendre soin, et améliorer le tout pour gagner en prestige et bonnes notes garanties.
Un titre fait pour être joué partout
Afin de nous aider dans notre gestion, le jeu nous propose des tableaux et des filtres dans une interface épurée, parfois brouillonne, mais qui nous renseigne sur l’essentiel. Le jeu est traduit entièrement en français et rares sont les coquilles. Comme nous le remarquons dans beaucoup jeux de gestion portés sur consoles ces dernières années et pour Hospital, l’ergonomie de Campus a été adaptée pour une utilisation optimale de la manette. Si l’expérience globale demeure plus confortable sur PC grâce au combo clavier/souris, les raccourcis assignés aux boutons et les changements d’onglets via les gâchettes et boutons de tranche sont redoutablement efficaces. Le gros inconvénient de la manette pour ce type de jeu reste le ciblage rapide de petits items sur l’écran, ici les personnages ou les objets de décoration. Heureusement, le zoom facilite cette manipulation et le titre ne demande pas une forte réactivité comme pour les RTS.
Signalons que le jeu perd légèrement en fluidité sur notre Series X quand notre campus devient très important et la foule conséquente. Il est fort possible que cette faiblesse technique s’aggrave sur les Xbox One.
Nous avons également testé le titre via Xbox Cloud Gaming, disponible avec l’abonnement Game Pass. L’expérience fut très convaincante sur notre mobile 6,5 pouces avec la manette adaptative MG-X Pro. Certes, la taille de l’écran réduit le confort visuel, mais les polices d’écriture restent lisibles grâce au choix de design et à l’interface épurée. De plus, les jeux de gestion ne pâtissent pas trop des désagréments liés à la présence d’éventuels micro-lags de connexion. En revanche, en utilisant uniquement le pavé tactile du smartphone, l’ergonomie devient beaucoup plus contraignante, même si cela reste jouable dans de correctes conditions.
Testé sur Xbox Series X