Test - RimWorld Console Edition - Une gestion de colonie exceptionnelle

«Take my love, take my land…» , - 2 réaction(s)

Créé par le studio indépendant britannique Ludeon et sorti en octobre 2018 exclusivement pour PC, RimWorld a fait l’effet d’une bombe dans le petit monde si particulier des amateurs de jeux de gestion. Avec sa violence sans limites et son aspect « Western spatial » directement inspiré de séries telles que Firefly, le titre surfe sur un succès qui ne semble pas près de s’arrêter. Confié aux bons soins de Double Eleven (studio fondé par des anciens de Rockstar Games) pour sa version consoles, le titre est enfin entre nos mains. Ce portage est-il à la hauteur de la réputation du jeu initial ? C’est ce que nous allons voir tout de suite.

​​Bien plus qu’un jeu de gestion

Arriver pour la première fois sur RimWorld est une expérience déroutante. Graphiquement très austère (pour ne pas dire minimaliste), il ressemble beaucoup à un autre jeu britannique : Prison Architect, d’Introversion Software. Pourtant, les deux studios semblent ne rien avoir en commun (sinon d’avoir confié le portage consoles de leur titre à Double Eleven). Très inspiré de Dwarf Fortress, le jeu nous met à la tête d’une colonie de « naufragés de l’espace » parvenant in extremis à se sortir de leur capsule d’hypersommeil après un crash sur une planète inconnue. Il nous incombe alors de les faire survivre et de les aider à se développer, jusqu’à devenir une immense colonie sur laquelle le monde devra compter ; ou parvenir à construire un vaisseau nous permettant de nous échapper vers les étoiles.

Les mondes générés sont immenses

Pour tout terrain de jeux : une immense carte de la zone de notre atterrissage (générée aléatoirement et aux propriétés sélectionnables par avance via la mappemonde). Libre à nous d’en faire ce que nous voulons, du simple village de campagne à la mégalopole grouillante de vie et d’activités, en passant par un camp de sadiques cannibales, ou encore la plaque tournante du commerce d’esclaves.

Car RimWorld se démarque très fortement des autres productions du genre en ne nous bridant jamais. Ni dans ce que nous devons faire, ni dans ce que nous POUVONS faire. L’une des grandes originalités du titre, c’est bien son absence formelle de limites. Tant et si bien qu’il est régulièrement résumé comme un « simulateur de génocide » ou « d’esclavage » par certains joueurs. Le monde est un endroit dangereux. À nous de voir si nous voulons en subir les conséquences… ou en devenir la cause.

Et il faut admettre qu’il est parfois très difficile de résister à la tentation de sombrer dans le cannibalisme lorsque la nourriture vient à manquer lors d’un hiver particulièrement rude. Que l’idée même de torturer un prisonnier qui a brûlé nos récoltes et mortellement blessé notre médecin devient étrangement envisageable, quand bien même cela nous révulserait au quotidien. Que l’on songe parfois à attaquer et à détrousser d’innocents voyageurs, pour le bien de notre tribu. Tous ces choix moraux (et bien d’autres), nous y serons constamment confrontés dans RimWorld.

Les attaques peuvent avoir de lourdes conséquences

L’implication qui en découle est incroyable. Au fil des heures qui s’égrènent, à développer notre petite communauté, l’attachement que nous avons pour nos personnages grandit et la moindre petite action à leur encontre peut rapidement prendre des proportions dantesques. Cette dimension affective est particulièrement mise en avant par la personnalité de nos colons.

Ainsi, chacun dispose d’un nom, d’une histoire (enfance et âge adulte), de compétences, de liens sociaux et de comportements qui leur sont associés. Chacun d’entre eux est unique, tout en s’intégrant parfaitement dans le grand tout de notre société. Et il n’est pas rare d’être surpris par les décisions qu’ils prendront durant nos parties. Notre médecin, psychopathe et misandre notoire, pourra ainsi s’amouracher de notre agriculteur qui est parvenu à la faire rire et à la réconforter lors d’une période de trouble. Notre forgeron retrouvera son ex-femme qu’il déteste cordialement et tentera peut-être même de la tuer dans un accès de rage. Un homme égaré pourra nous demander de nous rejoindre, avant même que nous ne puissions nous rendre compte qu’il s’agit d’un tueur cannibale pyromane (mais aimable).

Certaines parties sont donc totalement ubuesques, et bien souvent, la difficulté viendra de là où on ne l’attend pas. Ainsi nous sommes-nous retrouvés, après la mort de notre chasseur, à voir son épouse doucement sombrer dans la folie avant de mettre le feu au campement ; ou encore notre meilleur bûcheron virer cannibale après une (très) mauvaise journée. Chacun d’entre eux va évoluer au gré de la partie, de sorte que notre aventure n’en devient que plus palpitante à mesure que nous affrontons les impondérables et les divers dangers. Il nous faudra, de surcroît, bien gérer notre communauté pour éviter tout débordement. Un colon qui est moins bien traité que les autres, qui fait un travail qu’il n’aime pas ou qui échoue régulièrement dans ses tâches, verra son moral impacté, parfois avec des conséquences irrémédiables. Ajoutons à cela la gestion des plannings (heures de sommeil, temps libre, travail et loisirs) pour mieux comprendre à quel point nous occuper de notre communauté peut être compliqué, surtout lorsqu’elle grandit.

Chaque partie est unique, vous proposant systématiquement un contenu généré aléatoirement mais bigrement plaisant et cohérent.

Si nous retrouvons tout ce qui fait le sel d’un jeu de gestion ordinaire (et bien plus encore), RimWorld tente d’aller plus loin en y ajoutant des composants de construction. Ainsi nous faudra-t-il fonder divers bâtiments, mais aussi leur assigner un rôle. Certains pourront servir de salles de stockage, d’autres de chambres, de prisons ou encore de salles de torture. Il n’y a d’autres limites que notre imagination, puisque nous pourrons tout paramétrer dans les moindres détails (du type de denrées à stocker aux heures d’ouverture, en passant par le type de personne autorisé, ou encore à qui est attribué tel ou tel lit).

Chaque emplacement dispose de caractéristiques différentes

Et c’est également là que le jeu donne le tournis. Dans sa seule phase de gestion de colonie, il est déjà bien plus complet (et complexe) que bon nombre d’autres jeux du genre. Au début, cette liberté sans fin est glaçante et il n’est pas rare de devoir recommencer encore et encore jusqu’à parvenir à maîtriser quelques rouages essentiels du titre avant de parvenir à passer le premier hiver. Le tutoriel disponible nous permet de partir sur de bonnes bases, avec trois colons particulièrement utiles et ayant de bonnes affinités, des constructions et des défenses, en plus d’un lieu pour cuisiner et d’une plantation. Mais il n’est pas là pour nous guider dans les moindres détails du titre, ni même pour nous aiguiller sur la marche à suivre. RimWorld est l’histoire de notre colonie. C’est donc à nous de nous en occuper. Nous pourrions deviser encore longtemps sur tous les aspects du titre, tant il est riche et profond. Nous aurons ainsi également à négocier (ou guerroyer) avec d’autres factions, des quêtes à remplir pour acquérir du butin précieux, la possibilité de paramétrer des expéditions ou d’élever des animaux (ou des hommes revenus à l’état sauvage), d’explorer des cavernes, etc. RimWorld dispose de tant de fonctionnalités différentes, singulières et novatrices, qu’il faudrait bien plus qu’un simple test pour en faire le tour. Chaque partie est unique, vous proposant systématiquement un contenu généré aléatoirement mais bigrement plaisant et cohérent.

Juste un dernier petit tour

RimWorld fait partie de ces jeux chronophages. De ceux qu’on commence en se disant « Bon, il est 21h. Je vais jouer juste une petite demi-heure… » avant d’être surpris par le réveil au petit matin. C’est le genre de titre auquel on rêve la nuit, ou sur lequel on cogite tout en travaillant ou en vaquant à ses occupations. « Tiens, si je faisais une chambre individuelle à Seira avec un jeu d’échecs ? Je pense que ça pourrait augmenter son moral. » « Je me demande si je ne vais pas ajouter une salle de jeux commune. » « Ma prison est bien trop exposée, je devrais peut-être renforcer les défenses. » Pratiquement infini dans ses propositions, il est aussi difficile à lâcher qu’il est ardu à comprendre. Ceci étant rehaussé par la multiplicité des options de configurations disponibles avant même de lancer une partie.

Chaque niveau de difficulté amène une aventure unique

Il nous sera ainsi demandé de décider du nombre de colons (un, trois ou cinq), de l’emplacement, de la taille de la carte, de la densité de population sur le globe, de notre position sur ce dernier, ou du choix de nos premiers habitants. Même la quantité de pluie est paramétrable. Mais là où le jeu se surpasse, c’est dans le choix du narrateur.

En effet, nous avons à disposition trois personnages qui déterminent l’intelligence artificielle. Si la première nous propose une courbe de difficulté raisonnable et en constante progression, la seconde est plus permissive et gentille. La troisième, en revanche, est une sorte de mode aléatoire ou nous pourrons tout aussi bien trouver du butin à foison que nous faire envahir par des hordes de bandits toutes les cinq minutes. Et chacun de ces modes de jeu nous octroiera une nouvelle expérience (une de plus) pour accroître encore la durée de vie déjà colossale du titre. L’apprentissage est constant, tant et si bien que si le jeu peut sembler très sommaire dans ses premiers temps, il devient rapidement évident que nous passons à côté de l’essence même du titre. Et les parties s’enchaînent, chacune nous apportant son lot de difficultés et de savoir, nous permettant ainsi de toujours rebondir sur des bases différentes.

Le choix du narrateur détermine l’I.A

Cette courbe de progression particulièrement grisante pour le joueur (et a fortiori pour l’amateur de jeu de gestion) est une grande réussite qui pousse toujours à vouloir lancer (ou recommencer) le jeu sans jamais s’en lasser.

Un portage de grande qualité

Choisir Double Eleven pour s’occuper de la version console de RimWorld était sans nul doute la meilleure décision que Ludeon pouvait prendre. Le studio sait de quoi il parle, et cela se sent dès les premières secondes. Si nous pestons sur les temps de chargement initiaux (que tout amateur de jeu de gestion sur console ne connaît que trop bien), nous sommes rapidement et agréablement surpris par les choix effectués par l’équipe en termes de maniabilité.

D’ordinaire, la même soupe nous est toujours servie : la fameuse « roue d’action » dans laquelle nous allons pouvoir construire, voir les stats, etc. Mais Double Eleven a choisi d’innover. Ainsi, c’est avec la gâchette gauche que nous pouvons décider des actions (dans une sorte de « raccourci des compétences » usuellement utilisé pour les jeux d’Action/RPG). D’une pression sur RL + X, nous avons accès au menu de construction. RL + Y nous amène directement sur l’écran des recherches, RL + A dans celui de gestion de la colonie, etc. Un choix audacieux, mais vraiment plaisant une fois dans le feu de l’action, qui permet de prendre des décisions rapidement et sans mettre le jeu en pause.

Du sang et des larmes à chaque fois

La construction est d’autant plus facilitée que nous pouvons, toujours avec une combinaison de touches très intuitive, sélectionner des éléments pour couper massivement du bois, désherber, ou dupliquer des objets. La croix directionnelle a été habilement réservée à la gestion de vos colons.

S’il y a un seul point négatif à ce portage, ce serait sans doute justement cette maniabilité. Très efficace, elle demande tout de même de se souvenir d’un nombre important de combinaisons qui peuvent faire défaut en cas d’urgence. Certes affichées dans les différents écrans, elles sont tout de même très nombreuses et parfois peu intuitives (comme le menu de l’humeur des colons, assigné sur la touche « select »). Par chance, une simple pression sur la gâchette droite nous permet de mettre le jeu en pause, pour mieux retrouver nos esprits et aborder ces situations.

L’autre souci majeur vient indubitablement du nombre de possibilités offertes par le titre. Nous pouvons parfois nous sentir perdu, ne sachant comment développer tel type de technologie ni comment accéder à tel écran précis. Un tutoriel plus complet aurait été un plus non négligeable, évitant ainsi aux néophytes (et aux habitués du titre sur PC) de chercher leurs marques dans les premières dizaines d’heures de jeu. Nous noterons tout de même l’exploit d’avoir permis à la version console de disposer de l’intégralité des fonctionnalités de son homologue PC tout en restant jouable à la manette. Une tâche indubitablement ardue et sur laquelle bien des studios se sont cassés les dents.

Faut suivre les MODs…

C’est sur le site officiel de Double Eleven que la réponse à la question qui brûle toutes les lèvres est donnée : qu’en est-il des Mods ? Absents de cette version console à notre plus grand déplaisir, la gestion de contenu proposé par la communauté avait pourtant permis au titre de Ludeon de se tailler une place de choix dans le cœur des joueurs, tout en offrant une expérience pratiquement infinie en termes de nouveautés, parfois de très grande qualité. Sans ces mods, nul doute d’ailleurs que le titre n’aurait pas connu un tel succès, ni continué de déchaîner les passions quelque quatre années après sa sortie.

Eh bien, le studio britannique a fait le choix de ne pas les implémenter pour l’instant. S’ils expliquent très justement les difficultés relatives à ce type de contenu développé par la communauté, ils ne ferment pour autant pas définitivement la porte à une éventuelle solution, bien que ce ne soit clairement pas dans leurs priorités. Un choix qui, s’il est compréhensible, n’en est pas moins dénué de conséquences qui risquent fort de déplaire aux amateurs du titre. Ceux qui connaissent la version PC ont également noté que seul le premier DLC, à savoir Royalty, était disponible à la sortie de RimWorld Console Edition. À l’identique, Double Eleven nous a avertis d’emblée que la version console du jeu suit sa propre feuille de route, sans tenir compte des améliorations PC, afin d’optimiser le contenu pour nous proposer une expérience de qualité. L’optimisation du titre n’a engendré aucun bug au cours de nos nombreuses parties, aussi pouvons-nous espérer une certaine cohérence entre les versions.

L’absence d’Ideology et de son système de croyances, tout simplement remarquable, se fait grandement sentir et nous prive de certains événements très marquants. Mais la question de la censure mérite d’être posée, tant ce contenu peut être sujet à polémique. Double Eleven aura-t-il les moyens de nous le proposer sur console malgré tout ? Seul l’avenir nous le dira.

Testé sur Xbox One X.

Bilan

On a aimé :
  • Une gestion de colonie extrêmement profonde.
  • Une liberté incroyable et sans limites.
  • Des possibilités quasiment infinies.
  • Une rejouabilité pratiquement sans fin.
On n’a pas aimé :
  • L’absence de Mods
  • Le DLC Ideology, pas encore disponible
You can’t take the sky from me

Si RimWorld n’est pas le meilleur jeu de gestion existant à ce jour sur console, il s’en rapproche dangereusement. Avec sa liberté à toute épreuve, sa rejouabilité infinie et son histoire en constante évolution ; c’est un titre chronophage qui sait faire rimer qualité avec profondeur de gameplay. Et le portage n’est pas en reste, nous proposant l’intégralité des fonctionnalités présentes sur PC sans la moindre compromission, sinon une maniabilité un poil complexe à appréhender.

Accueil > Tests > Tests Xbox One

RimWorld

Genre : Gestion

Editeur : Double Eleven Ltd.

Développeur : Ludeon Studios

Date de sortie : 29/07/2022

2 reactions

avatar

Livrogne

05 aoû 2022 @ 15:08

Et qu’est ce que c’est fun bordel !! un des rares jeux où tu te marres en y jouant tellement ce qu’il s’y passe est complètement WTF par moment. Et c’est carrément rafraîchissant par rapport à un Halo 12 ou un FarCry 24 !

KoF esKadri

05 aoû 2022 @ 15:53

Voilà pourquoi je suis parti sur pc, des perles comme ça il y en a des dizaines chaque années.