Test - Persona 5 Royal– Le J-RPG ultime

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Après la semi-déception que fut Soul Hackers 2, Atlus revient avec le portage Xbox One et Series du légendaire Persona 5 directement sur le Game Pass. Ancienne exclusivité Sony sortie initialement en 2017 sur PS3 et PS4 avant de revenir dans une version « Royal » en 2020, le titre élargit enfin ses horizons en se rendant disponible à tous les joueurs. Vaut-il encore le coup 5 ans plus tard ? Oh que oui !

​​Life Will Change

Persona 5 nous met dans la peau d’un lycéen, accusé à tort d’un crime qu’il n’a pas commis. Il part vivre chez Sojiro en réhabilitation. En d’autres termes, il n’a pas le droit à l’erreur et le moindre faux pas peut lui valoir la prison ferme.

Changement de ville, de lycée, de vie. Après avoir tout perdu, ce nouveau départ va être pour lui l’occasion de se faire des amis, mais aussi de se lancer dans une quête de justice aussi aveugle que personnelle. Car dans les ombres du Metaverse, lui et ses acolytes vont découvrir un monde souterrain, dissimulé aux yeux du plus grand nombre. C’est ici que vont s’éveiller les Personae, personnifications de l’âme nées de la souffrance et de la colère. Ensemble, le groupe d’amis va décider de fonder les Voleurs Fantômes, de s’unir contre l’injustice et l’inertie des forces de l’ordre.

L’éditeur nous a spécifiquement demandé de ne pas spoiler à partir d’un certain point de l’aventure. Nous avons volontairement décidé de ne pas détailler aussi loin les événements du jeu. Certes, ce dernier a déjà 5 ans et a eu droit à une adaptation en animation. Certes, la plupart des amateurs de J-RPG le connaissent. Pourtant, garder cette touche de mystère est nécessaire pour ceux qui n’ont pas encore eu la chance de s’y atteler. Pourquoi ? Tout simplement parce que Persona 5 est le meilleur J-RPG qu’il nous ait été donné de faire !

Mais nous y reviendrons bientôt. Persona 5 se dote d’une force rare dans ce genre de productions : son scénario dispose de plusieurs niveaux de lecture. La première, très littérale, nous permet de suivre Joker (notre héros) et ses amis dans une quête de justice et de vengeance. En ne prenant en compte que cette acception, le titre d’Atlus nous livre un récit très, très fort. Sombre et déprimant, chaque étape de son scénario appuie avec une rare justesse sur des éléments traumatiques et des faits de société particulièrement durs. Agressions sexuelles, puissance des médias, domination patriarcale, violence parentale, jeunesse désœuvrée, pauvreté… toutes les histoires sonnent juste. Elles sont réelles, crédibles, tangibles.

Et c’est justement grâce à cet ancrage dans un quotidien sombre et délictueux que Persona 5 donne le vertige. Nous mettons au défi quiconque de ne pas se retrouver dans au moins une des situations décrites par ce dernier. Et une fois ce point de l’aventure atteint, on vibre, on transpire, la boule au ventre et des larmes de rage aux yeux. L’implication émotionnelle est alors décuplée, car viscéralement ancrée dans la chair, dans l’âme du joueur.

À présent happés par une histoire qui résonne au diapason de nos propres cicatrices, nous ne pouvons qu’embrasser la cause des Voleurs Fantômes, légitimer leurs comportements et leurs exactions, les soutenir envers et contre tout. Et c’est à ce point précis qu’Atlus a eu une idée de génie, parvenant à transcender plus encore la puissance narrative de son œuvre : ajouter un antagoniste qui n’en est pas réellement un.

Joker est un justicier. Devant l’inaction des forces de l’ordre et des magistrats, il va se battre pour ce qu’il croit être juste. Mais ce faisant, il va surtout devoir subroger les lois… et donc aux yeux de certaines personnes devenir un criminel. Akechi est un détective. Techniquement, les deux ont le même objectif, toutefois, leur ligne de conduite diverge.

Et c’est cette dualité qui chamboule, car à aucun moment le scénario de Persona 5 ne se montre manichéen, n’émet de jugement ni n’essaie de nous guider vers une voie qui serait « la bonne ». Il nous met face à nos propres contradictions, nous fait combattre nos démons ; tout en les personnifiant. Oui, jamais un jeu de la licence n’a aussi bien porté son nom.

Mais nous parlions plus tôt des différents niveaux de lecture de l’œuvre. Certes, nous en avons déjà abordé plusieurs… mais il en existe bien d’autres. Difficile de ne pas voir dans ce Persona 5 une critique acerbe de la société japonaise moderne, pointant tous les dysfonctionnements du système. Ce qu’on appelle communément « les cinq tabous » y sont mis en avant : sectes, yakuzas, puissance impériale, gouvernement, police et médias ; pointant les dysfonctionnements et les complaisances connus de tous, mais pourtant passés sous silence dans la société nipponne.

Oui, Persona 5 se veut à la fois le reflet des dysfonctionnements systémiques ancrés dans des millénaires de traditions… et un message d’espoir, de rébellion, une volonté de changement, de justice et de conquête de liberté.

Tout ça, et bien plus encore ; Atlus nous livre sans compromission un titre à la fois dur moralement et parfois physiquement, rendant sa narration incroyablement puissante et son propos douloureux. La réussite est totale, d’autant que tous ces messages sont enrobés dans un scénario prenant et diablement efficace, qui ne fait aucune concession ni ne souffre du moindre problème de rythme. Et nous n’avons même pas abordé le sujet des symboliques…

La principale d’entre elles, et la seule que je livrerai ici, concerne la naissance des Personae. Nos héros, pour acquérir le pouvoir de se défendre, la faculté de résister, vont devoir… arracher le masque de leur inaction. Littéralement. Chaque protagoniste se « réveille » ainsi dans une scène forte et particulièrement dure, rejetant la personne que la société a forgée en parvenant à extirper de leur propre chair ce fameux masque. Dans le sang, les cris et les larmes. Pour mieux se révéler au grand jour, accepter ce qu’ils sont, ce qui fait leur différence et leur force.

Beneath the Mask

Maintenant que nous avons posé les bases du scénario et des messages, il est temps d’aborder le jeu en lui-même. Derrière ses airs de J-RPG à l’ancienne, Persona 5 est une véritable petite révolution pour la série.

Reprenant certes les mécaniques des précédents opus, il nous livre des combats bien plus fluides et dynamiques qui semblent ne jamais souffrir de temps morts. Comment ? Simplement grâce à sa mise en scène. Chaque sélection de menus amène une animation, un changement d’angle de caméra, une interaction. En résulte un sentiment de vie, une action toujours soutenue, renforcée par la présence d’attaques en équipe, d’une synergie réelle entre les membres du groupe, d’effets visuels de toute beauté, des « Showtime », et des musiques… incroyables.

Pour une fois, le grind dans un J-RPG n’est ni long, ni ennuyant. Entre les possibilités de capturer les monstres pour en faire des Personae, les objets à collectionner et les compétences à débloquer, on enchaîne les affrontements avec un réel plaisir, même après des heures d’exploration.

Sur la forme pourtant, nous sommes bel et bien en présence d’un jeu Atlus. Ainsi va-t-on retrouver les créatures usuelles à la série, les compétences et sorts déjà bien connus des amateurs, de même que le système de faiblesses et de résistances. Au final, et en retirant toute cette couche de mise en scène et d’esthétique, Persona 5 est un digne successeur de la licence… avec toutefois quelques petites choses en plus.

Car la série ose, pour la première fois, se prendre au sérieux et se lâcher. Les développeurs ont parfaitement compris que nous livrer un récit uniquement sombre et déprimant n’aurait pour conséquence que de perdre le joueur. C’est donc également un titre bourré d’humour et de légèreté, fort de blagues qui font mouche, de situations ubuesques bienvenues et de quelques moments de joie et de tranquillité.

En plus de l’exploration des donjons principaux, Persona 5 nous permet en effet de visiter la ville de Tokyo petit à petit. Régulièrement, de nouveaux quartiers se débloquent et nous livrent plus de contenus. Si au début nous pouvons ainsi participer à des concours de nourriture, rapidement arrivent les jeux : billard, bowling, fléchettes, baseball… Les activités annexes sont nombreuses et pas sans rappeler celles de la série Yakuza. La qualité de ces dernières est au rendez-vous, d’autant qu’elles nous permettent d’augmenter nos statistiques et nos relations avec les autres personnages.

Car le titre d’Atlus ajoute également (parce que pourquoi pas ? Visiblement il n’y avait pas assez de contenu de qualité) une énorme dimension « Visual Novel » à son titre. Bien mieux réalisée que la grande majorité des jeux du genre, nous allons ainsi pouvoir partager du temps avec différents « Confidents ». Au nombre de 23 (basés sur les lames de Tarot), ces derniers nous octroieront certains bonus au fur et à mesure que nos liens se resserrent. Bien entendu, il n’est pas possible de débloquer l’ensemble en une seule partie. Mais est-ce pour autant une raison de refaire le jeu ? Évidemment.

Puisque non content d’apporter des pans de scénarios inédits entiers, ces relations peuvent également débloquer diverses missions secondaires et façons uniques de jouer ; rendant l’exploration très différente. Certes, le gros du scénario ne change pas, mais l’interprétation et la compréhension des événements peuvent se renouveler du tout au tout. Donc avis aux fans et aux collectionneurs : Persona 5 Royal est clairement un jeu fait pour nous tenir en haleine durant des centaines et des centaines d’heures.

Avons-nous fait le tour de tout ce que le jeu a à proposer ? Certainement pas. Entre les habits déblocables, les zones secrètes, la collection de Personae et le Mémento librement explorable (une sorte de « donjon infini » dont de nouvelles ères se débloquent au fur et à mesure) ; on ne s’ennuie jamais sur Persona 5. D’autant que nous aurons à gérer tout cela en plus de nos cours. Eh oui, il ne faudrait pas oublier que Joker est un adolescent, lycéen et sous probation. Sa carrière de justicier de l’ombre ne doit certainement pas l’empêcher d’aller en cours et d’étudier… ni d’avoir son diplôme.

Et la petite cerise sur le gâteau est justement là. Régulièrement, notre héros devra passer des examens. Ou plutôt…NOUS devrons les réussir. Les questions peuvent tout aussi bien être de culture générale, d’histoire ou de science. Par chance, toutes les réponses sont disponibles en jeu… à condition bien entendu de prendre le temps d’étudier, de lire, d’écouter ; bref : d’être attentif et impliqué dans tous les événements, même les plus secondaires. Diablement pédagogique, le titre d’Atlus saura nous apprendre bien des choses que nous ignorions sur la culture nipponne.

Rivers in the Desert

Très bien. Nous avons donc vu que Persona 5 dispose d’un contenu pharaonique. Mais comment tout cela s’organise pour ne pas perdre le joueur, pour ne pas empiéter sur le scénario qu’il doit tout de même nous narrer ?

Nous ne sommes point ici devant un véritable open world. La semaine est découpée en journées et en plages horaires. Durant les jours de cours, nous devons aller au lycée, étudier, possiblement nous rapprocher de nos camarades, etc. Le soir, un temps libre nous est octroyé pour nos activités annexes. C’est durant ces instants de répit que tout ce que nous avons vu plus haut peut être fait, à notre unique discrétion.

Bien entendu, en fonction de nos choix, l’avancée dans l’histoire sera très différente. Augmenter sa force, ses réflexes ou son intelligence nous ouvrira des portes disparates.

Durant les week-ends et périodes de vacances, plus de temps nous sera octroyé… mais pas que. Trouver un job peut devenir parfois indispensable, de même que certains événements qui viendront ponctuer notre progression.

Pour avancer dans le scénario, disons sans le moindre spoiler que nous sommes soumis à une limite calendaire. Au début de chaque chapitre, un délai est assigné pour terminer le donjon principal et vaincre le boss. Libre à nous d’essayer de le faire immédiatement, ou plutôt de vaquer à nos occupations pour ne nous y atteler qu’au dernier moment.

Last Surprise

Il est doucement temps de conclure ce test, malheureusement. Pourtant, nous n’avons abordé qu’une fraction de tout ce que Persona 5 a à offrir, de ce que nous en avons compris et interprété. Et si nous pourrions en parler durant des heures sans jamais nous en lasser, chaque mot rédigé ici ne nous donne qu’une seule envie : reprendre la manette pour une partie de plus.

Mais revenons à notre sujet en ajoutant quelques points d’une importance cruciale : d’abord, la localisation. Car oui, cette version Royal de Persona 5 est intégralement traduite en français. Mais est-elle au niveau ? Sans le moindre doute. Les équipes ont su avec brio saisir toute l’essence et les subtilités des textes d’origine, pour nous livrer un travail impeccable. Par chance, une partie du contenu s’inspire de la littérature de notre pays, et notamment des œuvres de Maurice Leblanc.

Musicalement… Persona 5 écrase tout ce qui a été fait avant. Shoji Meguro, compositeur historique de la licence, s’est surpassé pour nous offrir ce qu’il convient d’appeler modestement un chef-d’œuvre. Une dizaine de chansons sont de plus interprétées par la merveilleuse Lyn Inaizumi qui, de sa voix suave et jazzy, sublime les compositions et donne une âme au jeu d’Atlus. D’ailleurs, les titres de chaque section de ce test font partie des meilleurs morceaux de la bande originale.

Enfin, nous aimerions aborder les nouveaux contenus apportés par cette version de Persona 5. Car Royal est bien une édition plus complète de l’œuvre de base, avec son lot de changements. En vrac, on va donc avoir : un nouveau héros jouable, un semestre scolaire entier, le « Thieves Den » (une sorte de musée), de nouvelles cinématiques et d’autres refaites, un donjon et une zone de la ville supplémentaires, un club avec moult mini-jeux, deux Confidents, plus d’ennemis, d’armes, d’équipements, un grappin, les « Showtime » … ainsi que deux fins inédites. Et bien plus encore.

Oui, Persona 5R et Persona 5 sont deux jeux différents. Cette « version » Royal est en réalité bien plus proche d’un remake entier, changeant une bonne partie du gameplay et du level design ; et sans nul doute la meilleure manière de découvrir ce titre incroyable.

Testé sur Xbox One X.

Bilan

On a aimé :
  • Absolument tout. Rien n’est à jeter.
  • Et intégralement en français !
On n’a pas aimé :
  • Rien du tout
Wake Up, Get Up, Get Out There

Persona 5 Royal est-il le meilleur J-RPG qui ait jamais été produit ? Est-ce le chef-d’œuvre ultime d’Atlus, la création de toute une vie ? Chacun sera juge, mais pour notre part c’est indubitablement le cas et les jeux suivants du studio souffrent de la comparaison avec un titre qui est et restera dans les mémoires encore de très longues années comme la quintessence du jeu de rôle japonais.

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Persona 5 Royal

Genre : Action RPG

Editeur : Koch Media

Développeur : Atlus

Date de sortie : 21/10/2022

Prévu sur :

Xbox Series X/S, Xbox One, PlayStation 5, PlayStation 4, PC Windows, Nintendo Switch

6 reactions

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Messire Loup

17 oct 2022 @ 16:08

Un test très laudateur mais mérité :-)) C’est sans doute actuellement le JRPG le plus aboutit qui soit ! Rien que la direction artistique est un vrai régal...

kalas68

17 oct 2022 @ 17:18

Le bilan fait très fanboy :-))

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EverFish

17 oct 2022 @ 19:43

Pour l’avoir sur PS5, l’ambiance est très sympa et le gameplay remplie de petites choses pour le rendre captivant. Mais je ne l’ai pas terminé malgré le confinement. Peut-être repartir de zéro aidera.

Darlink60

17 oct 2022 @ 21:13

Le genre de jeux que j’adore et qu’il manque cruellement sur Xbox !!

Surtout que celui-ci est un des meilleurs du genre apparemment (oui j’ai jamais touché à un seul jeu de cette série...).

Je vais le faire direct (en même temps que A plague Tale : Requiem !!) et avec Scorn aussi, j’ai pas assez de temps .... 😭😭

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Yubah

17 oct 2022 @ 21:31

Malheureusement je ne pense pas que ce sera un carton malgré l’entrée sur le GP car c’est assez chronophage et il y a beaucoup de dialogues (JRPG Visual Novel). Mais pour le peu qui vont y jouer, ils vont se régaler.

kalas68

17 oct 2022 @ 22:40

Il est très chronophage, il faut être prêt à se lancer dans une centaine d’heures !