Gylt est un peu passé sous les radars du grand public lors de sa sortie en exclusivité, sur Google Stadia, fin 2019. Le studio Tequila Works avait alors un challenge plus que difficile en proposant la seule licence exclusive de la plateforme. Un poids bien trop lourd pour cette production modeste, même pour les développeurs derrière l’excellent Rime. Après la fermeture du service de cloud gaming, c’est aujourd’hui sur PC ainsi que sur les consoles PlayStation et Xbox que le titre s’offre une seconde vie. Le portage réalisé par Parallel Circles supportera-t-il de descendre de son nuage ?
Il était dans ma classe, il vivait dans ta rue
Après avoir abordé le thème du deuil avec le titre Rime, c’est ici le harcèlement scolaire qui est au centre de notre histoire. Nous incarnons Sally, une jeune collégienne qui est à la recherche de sa cousine Emily, ayant disparu depuis plusieurs semaines. Alors que nous parcourons la ville afin de placarder des avis de recherche, nous sommes pris à partie par un groupe de harceleurs qui nous contraignent à la fuite. Chevauchant notre bicyclette, nous tentons de semer nos poursuivants. Cette course effrénée prend brusquement fin lorsque nous perdons le contrôle de notre engin et que nous finissons en contrebas de la route. Les dommages sont trop importants pour espérer utiliser de nouveau notre véhicule, nous décidons donc de prendre le funiculaire pour rentrer. C’est alors qu’un étrange phénomène se produit et que notre point d’arrivée n’est pas celui que nous espérions.
Notre petite ville minière est méconnaissable. Elle semble avoir été le théâtre d’événements horribles l’ayant plongée dans la mélancolie. Alors que nous pensions nous retrouver seuls au milieu de ce cataclysme, nous retrouvons la trace d’Emily, mais celle-ci semble face à un danger imminent alors qu’elle s’est réfugiée dans l’école. Rapidement, nous comprenons que les étranges occupants des lieux ne sont pas étrangers aux angoisses de notre cousine. Dès lors, nous mettons tout en œuvre pour lui porter secours.
Tu riais de lui car il était différent
Nous étions très curieux de découvrir ce titre après avoir pris une claque narrative sur Rime. L’écriture ici nous a un peu déçus. Nous avons l’impression que le studio n’a pas trouvé où placer le curseur entre le narré et le suggéré, du moins pas avec la même réussite que pour leur précédent titre. Le harcèlement scolaire est un démon pernicieux, parfois invisible, qui passe la plupart du temps inaperçu si l’on isole chaque acte. C’est probablement ce qu’ont voulu retranscrire ici les développeurs en posant çà et là dans le décor des inscriptions, des mises en scène de mannequin en bois ou des pages de journal intime. Malheureusement, ce n’est pas assez subtil pour obtenir l’effet escompté.
Il y a également un manque de prise de risque dans la construction des mécaniques de gameplay. La plupart du temps, nous devons éviter de nous faire repérer par les monstres qui peuplent la ville, mais leurs déambulations sont tellement prévisibles qu’il n’y a pas vraiment de challenge, du moins dans les deux premiers tiers du jeu. Nous sommes toutefois dotés d’une lampe puissante qui peut être utilisée comme arme pour les éliminer, si l’envie nous en prend. Les piles nécessaires à son rechargement foisonnent tellement que nous n’en manquons jamais. Ce qui est dommage, car une gestion de cette ressource aurait pu relever un peu la difficulté du jeu. Il en est de même d’ailleurs pour les inhalateurs qui permettent de restaurer notre santé.
L’apparition dans le dernier tiers du jeu d’un extincteur et d’un nouveau type d’ennemi renouvellent un peu le gameplay et relève légèrement le challenge, mais cela arrive trop tard dans l’aventure pour éviter un sentiment de lassitude. Les énigmes environnementales et les puzzles sont bien trop classiques et convenus pour rompre ce sentiment qui s’installe sournoisement comme l’effet du harcèlement. À moins que nous ne soyons passés à côté d’un coup de génie des développeurs qui souhaitaient retranscrire ici le caractère pernicieux du thème traité.
Dans les beaux bureaux en glace
Ce que l’on ne peut cependant pas retirer au titre, c’est la qualité de sa réalisation et de sa direction artistique. Les graphismes sont du même niveau qu’une production des studios Pixar. Malgré son portage, le titre ne souffre d’aucun bug si ce n’est çà et là un micro ralentissement dans un déplacement de caméra. La bande son est également réussie et souligne à la perfection l’atmosphère angoissante. Les bruitages sont quant à eux un poil en dessous, notamment les bruits de pas qui ne nous ont pas convaincus. Les scènes de transitions auraient mérité selon nous des cinématiques, mais le choix de recourir à des dessins n’est pas détonnant puisque leur intégration est plutôt bien réalisée.
Malgré ces défauts, qui découlent principalement d’un manque de prise de risque, nous avons passé cinq heures plutôt agréables. La présence d’une fin alternative peut doubler cette durée de vie pour ceux qui souhaitent la découvrir. La présence de collectibles, tout au long de notre parcours, ravira les complétistes dont la tâche est facilitée par un mode exploration, accessible une fois le titre terminé.
Testé sur Xbox Series X.
