Test - Company of Heroes 3 Console Edition - Le retour du roi du STR ?

«Nein, nein, nein, nein, nein !» , - 0 réaction(s)

En 2006, le studio canadien Relic Entertainment sortait le premier opus de la désormais célèbre licence de STR (Stratégie en Temps Réel), Company of Heroes. Forts de l’expérience acquise grâce à d’autres jeux tout aussi cultes (Homeworld, Impossible Creatures, Warhammer 40,000 : Dawn of War), les développeurs étaient parvenus à retranscrire, à l’époque et avec une déconcertante fidélité, toute l’horreur de la guerre dans un titre riche et puissant.

Quelques années plus tard, en 2013, ils sortaient une suite encore meilleure. Et pendant dix ans, plus rien. Pourtant, Company of Heroes 2 continue d’avoir une base solide de fans assidus et d’être considéré comme l’un des meilleurs jeux de stratégie sur la Seconde Guerre mondiale à ce jour.

Dix ans... Il aura donc fallu dix ans pour que Relic Entertainment nous apporte un troisième opus. Entre-temps, ils ont pu démontrer toute l’étendue de leur talent avec des titres tels que Dawn of War 3 ou encore Age of Empires 4. Les fans, tout autant que les amateurs des autres franchises du studio, les attendaient donc avec impatience. Et ceux-ci (dont nous faisons indubitablement partie) risquent malheureusement d’être quelque peu déçus…

La guerre ne meurt jamais

Comment apporter de la nouveauté avec du déjà-vu ? C’est sans doute la première question que le studio s’est posée avant même de lancer le projet Company of Heroes 3. Après tout, l’histoire de la Seconde Guerre mondiale a été traitée de manière exhaustive à travers tous les médias imaginables. Même les deux précédents opus ne cherchaient guère à renouveler l’expérience, se contentant de situer leur action sur les fronts est et ouest.

Par « chance », la principale caractéristique de cette guerre, c’est qu’elle était... mondiale. Ainsi, Relic Entertainment a choisi de changer de perspective en nous proposant une campagne se déroulant en Afrique et en Italie.

Se voulant résolument historique, le jeu nous permet d’incarner, lors de la campagne africaine, le général Erwin Rommel du côté allemand. Quant à la libération de l’Italie, elle nous donne l’occasion de rencontrer des personnages emblématiques de cette époque, tels que Dwight D. Eisenhower ou encore Bernard Montgomery.

Une première approche très positive donc, puisque rares sont les jeux vidéo à s’être attaqués à ces fronts si particuliers. Et pour ne rien gâcher au plaisir, ce sont bel et bien quatre factions qui sont jouables : deux du côté de l’Axe, à savoir la Wehrmacht et le Deutsches Afrikakorps, et deux du côté des Alliés, à savoir les armées américaines et britanniques.

Comme toujours, le jeu se divise entre le mode solo et le multijoueur. Si le jeu en ligne ne diffère que peu de ce que l’on connaît, nous allons particulièrement nous attarder sur l’autre.

La campagne solo nous plonge au cœur de la bataille d’Italie dans une forme qui n’est pas sans rappeler celle des Total War. En pratique, le jeu se divise en deux parties : une première sur une carte stratégique au tour par tour, où il faut gérer les ravitaillements, les mouvements de troupes, etc. ; et une seconde en temps réel, davantage dans l’esprit des deux précédents opus.

Si l’idée d’avoir voulu s’inspirer des jeux de grande stratégie est excellente, ce Company of Heroes 3 pèche malheureusement par sa volonté de bien faire. Car, contrairement à ses principaux concurrents dans ce domaine, le jeu de Relic ne parvient jamais à apporter la moindre plus-value à son œuvre.

Nous commençons en Sicile, direction Rome. La victoire, c’est tout droit et le pays semble totalement désarmé face à la puissance des troupes alliées. Les forces adverses ne tentent jamais de se défendre, de mettre en place une stratégie ou des mouvements de troupes originaux ou désespérés. Après avoir essayé plusieurs modes de difficulté, nous n’avons jamais ressenti le moindre sentiment de menace.

Et pour cause, la difficulté ne s’applique qu’aux batailles réelles et non à cette phase au tour par tour.

Une petite déception donc, rehaussée par le sentiment que Relic avait d’excellentes idées pour magnifier leur jeu. Les actions disponibles sont nombreuses, d’autant que cette campagne ajoute un système de loyauté, la possibilité de capturer des positions adversaires afin d’obtenir divers bonus... qui se révèlent totalement superflus et inutiles au regard de la déconcertante facilité de ce mode.

Deutsche Qualität

Voici une partie qui risque de faire jaser. Les amateurs de STR historiques aiment deux choses : la stratégie... et l’histoire. Et si, jusqu’alors, les deux premiers Company of Heroes parvenaient sans peine à faire la part des choses en nous livrant un récit historique souvent glaçant, mais diablement fidèle, les développeurs de chez Relic ne sont cette fois-ci pas parvenus à réitérer l’exploit.

Tout ceci est représenté par la seconde partie du mode solo, sobrement intitulée « Opération ». Dans cette dernière, nous incarnons les Allemands et plus précisément les forces de la Deutsches Afrikakorps de Rommel. Mais, contrairement à la Campagne qui se contentait d’une narration très classique dans sa forme et dans son fond, le point de vue choisi par Relic est celui des Alliés et des victimes.

Autrement dit, jamais Relic ne cherche à livrer un récit simplement basé sur les choix stratégiques et tactiques de l’armée en question au gré de leur progression, afin de mieux nous immerger dans les batailles à venir. Non, au lieu de cela, nous avons droit à la perspective des Juifs berbères, de leurs tourments et de leur exode.

Certes, l’intention est louable et il est intéressant d’en apprendre plus sur le tragique destin d’une population souvent oubliée par l’Histoire (tout comme l’ensemble du front Africain). Mais n’aurait-il pas mieux valu que les équipes nous livrent les résultats de leurs recherches via des scènes externes, voire pourquoi pas, un petit documentaire ?

Car, en l’état, le joueur ne peut se départir de l’impression de ne pas être réellement impliqué dans les actions des forces qu’on lui demande pourtant d’incarner. Les enjeux des missions sont passés au second plan, comme s’ils n’étaient guère importants… Là où, au contraire, pour mieux nous immerger dans leur production, les développeurs auraient dû se focaliser sur un point de vue plus militaire. Comme c’est le cas justement lorsque nous incarnons les Alliés.

Et si nous comprenons parfaitement les intentions du studio derrière ce choix, nous ne pouvons que regretter cet étrange sentiment de culpabilité lors de nos parties. Car bien qu’il soit important de ne jamais oublier les horreurs de la guerre, nous ne sommes pas ici en présence d’une œuvre à caractère éducatif… mais bel et bien d’un jeu vidéo. Il est donc nécessaire de le juger en tant que tel.

Il y a comme une sorte de dissonance entre ces moments suspendus et narratifs et les phases de jeux totalement épiques qui suivent. Pourtant, d’autres productions sont parvenues avec brio à nous livrer un regard neutre, uniquement centré sur les enjeux immédiats de chaque mission, à l’image d’un Men of War.

D’ailleurs, il est assez singulier de constater le traitement des Allemands dans Company of Heroes 3. Ces derniers sont intégralement doublés en anglais, avec un accent digne de la Septième Compagnie. Encore un point négatif qui entache la crédibilité et l’immersion.

Pourtant, ce second mode solo est indubitablement le meilleur. Dans la droite ligne des deux opus précédents, il nous permet de vivre via huit cartes successives des batailles intenses.

Contrairement au second, les cartes sont bien plus vastes, nous contraignant à penser notre stratégie sur une échelle plus large. De même, les objectifs sont nombreux, les chars bien plus présents et importants. Enfin, le sentiment d’être au cœur de la guerre n’a jamais été aussi prégnant grâce à d’excellentes idées de mise en scène, comme la prise de maisons ou des décors entièrement destructibles. Chaque mission est réellement impactante et digne de ce qui se fait de mieux dans le genre. Tout simplement.

La 4K des années 40

Malheureusement, Company of Heroes 3 ne parvient jamais à sublimer son aîné sur le plan purement technique. Sur console, il est même parfois assez délicat de faire la différence entre les deux opus. Les textures sont datées, les modèles de personnages des copiés/collés sans saveur. Même les effets d’explosions semblent venir d’un autre âge. Pour parfaire ce sentiment, Company of Heroes 3 propose un mode 4k natif... mais jamais nous n’avons réellement l’impression d’être devant un titre l’exploitant pleinement.

Bien que le niveau de zoom soit impressionnant, force est de constater qu’on va souvent garder un certain recul sur l’action pour éviter de trop constater les malfaçons et les visuels ratés.

Pourtant, et bien que cela puisse sembler paradoxal, Company of Heroes 3 peut compter sur une direction artistique du plus bel effet. Les cartes sont très différentes, pensées avec justesse et permettent de réellement ressentir le poids de la guerre.

Bien entendu, les amateurs de STR ne seront guère sensibles à ce côté technique, le plus important étant le plaisir indéniable du gameplay. Et de ce point de vue, le jeu de Relic est une belle réussite.

Enfin, un dernier mot sur la maniabilité sur console. Relic n’a malheureusement pas fait les meilleurs choix de mappage des touches, se contentant de décalquer ce qui existait déjà sur PC autant que possible. Très loin de la fluidité d’un Age of Empires 2 : Definitive Edition, nous nous sommes régulièrement retrouvés coincés par le manque d’explications claires et précises, ou encore par des choix discutables pour cette plateforme.

L’exemple le plus concret entre les deux jeux tient à la sélection des unités. Si AoE2 avait fait le choix de simplifier au maximum la vie du joueur en lui permettant de regrouper les soldats en appuyant deux fois sur le bouton A, Company of Heroes 3 nous impose de maintenir ce même bouton enfoncé pour faire apparaître un rectangle de sélection. Dans le feu de l’action, il n’est donc pas rare de devoir s’y reprendre à plusieurs reprises avant de pouvoir réellement effectuer l’ordre que l’on avait en tête.

Ce genre de cas se multiplie malheureusement et est fortement préjudiciable à l’expérience. Une fois quelques heures passées cependant, nous prenons nos marques et parvenons sans peine à effectuer la grande majorité des actions, sans pour autant jamais avoir ce sentiment d’être maître du champ de bataille.

Testé sur Xbox Series S

Bilan

On a aimé :
  • Le mode Opération, clairement excellent
  • La Direction Artistique, tout simplement magnifique
  • Le sentiment d’être au cœur de la guerre
  • Le choix des fronts africains et italiens, originaux
On n’a pas aimé :
  • Le mappage des touches sur la manette
  • Techniquement très, très daté
  • Le manque de prise de risque côté allemand
  • Un mode Campagne trop simple
Un bon STR qui ne surpasse pas son prédécesseur

Company of Heroes 3 ne parvient malheureusement pas à réitérer l’exploit du second. Pourtant, les amateurs de STR ne peuvent pas se tromper devant les qualités indéniables du titre. Si on regrette amèrement le manque de prise de risque du studio, le gameplay de ce nouvel opus est tout simplement jouissif, même malgré les défauts de la manette.

Accueil > Tests > Tests Xbox One

Company of Heroes 3

Genre : STR

Editeur : SEGA

Développeur : Relic Entertainment

Date de sortie : 30 mai 2023

Prévu sur :

Xbox Series X/S, PlayStation 5, PC Windows