Test - Chernobylite - L’appel des radiations n’a jamais été aussi fort

«Chernobylite ou l’effet d’une petite bombe dans le monde vidéoludique» , - 1 réaction(s)

Développé et édité par The Farm 51, à qui l’on doit le très bon Get Even, Chernobylite est un projet qui débute grâce à un kickstarter. Celui-ci récolte pas moins de 148 000 $ en mai 2019 et l’équipe de développement se penche alors sur un portage sur console fin 2020 via un contrat avec l’éditeur polonais All In ! Games. Avec 206 671 $ récoltés au terme de cette campagne, Chernobylite finit par débarquer sur PC en juillet 2021 et sur console en septembre de la même année. Plutôt bien accueilli par le public, ce RPG prenant place dans la zone d’exclusion de Tchernobyl peut se targuer d’être un jeu indépendant égalant certains AAA sans la moindre prétention.

Добро пожаловать в Чернобыль

“Fais confiance, mais vérifie”

Le compteur Geiger, l’outil indispensable pour survivre dans un environnement irradié

Nous sommes le 26 avril 1986 en Ukraine, à seulement 3km de la ville de Prypiat, dans l’oblast de Kiev. Il est 1h23 et un incendie se déclare dans le réacteur n°4 de la centrale nucléaire Vladimir Ilitch Lénine, ce qui provoque, à terme, la fusion du cœur du réacteur. Cet accident déclenche des mélanges de substances chimiques, donnant lieu à un nuage radioactif ainsi que la propagation de matières radioactives dans les environs de Prypiat, provoquant une tragédie humaine et écologique sans précédent mais difficile à quantifier au vu de la nature de la catastrophe. En effet, 300 000 personnes sont évacuées (évacuation qui ne devait être que temporaire) et si l’Union Soviétique dénombre environ une cinquantaine de décès directs dans les jours suivant le drame, certains rapports évaluent à 4 000 le nombre de décès par cancers, avérés ou à venir, tandis que d’autres études estiment les pertes à environ 200 000 personnes. Encore aujourd’hui, le sujet reste sensible et propice à la polémique et au débat mais ce qui est certain en revanche, c’est que les humains ne pourront pas vivre en sécurité à Tchernobyl avant 24 000 ans, ce qui témoigne bien de l’ampleur de la catastrophe.

Voici le pistolet à portail, le must pour naviger dans les trous de vers

C’est ici même que s’arrête l’Histoire et que commence la fiction avec Chernobylite. En effet, nous nous retrouvons 30 ans après la catastrophe nucléaire de Tchernobyl, au cœur de la zone d’exclusion. Nous incarnons alors Igor Khymynyuk, physicien et ancien employé de la centrale, qui décide de revenir sur les lieux du drame pour récolter de la tchernobylite, une pierre faisant office de source d’énergie exotique. Mais pourquoi a-t-il absolument besoin de ces pierres ? Igor a fabriqué une sorte de pistolet alimenté par la tchernobylite lui permettant de créer des trous de vers et de se déplacer à travers le temps et l’espace. Mais ce n’est pas tout, lgor est avant tout retourné à Tchernobyl pour enquêter sur la disparition de sa femme quelque temps avant l’accident. En effet, il semblerait qu’il fasse des rêves curieusement réalistes dans lesquels Tatyana, son épouse, l’appelle à l’aide. C’est pour cela que notre héros, accompagné de deux mercenaires, Anton et Olivier, se retrouve par la force des choses au cœur d’une bataille sur fond de science-fiction. Alors qu’Igor et ses camarades sont confrontés à une milice armée connue sous l’acronyme NAR, ils font subitement face à un autre problème de taille : un individu avec les mêmes connaissances qu’Igor sur les pouvoir surnaturels de la tchernobylite et qui ne veut vraisemblablement pas que celui-ci avance dans ses recherches. L’équipe se rend donc vite compte que l’intrusion dans la centrale nécessite un plan solide et un entraînement acharné.

Aménagez correctement votre base pour augmenter le moral de la troupe

Les camarades se réfugient alors dans un entrepôt déserté qui surplombe la zone d’exclusion. C’est dans ce lieu que nous allons installer tout notre attirail : une armurerie, des plans de travail pour différents types d’armes, des conteneurs, des purificateurs d’air, des générateurs mais aussi un réchaud, des couchages et de la décoration. Ça a l’air surprenant de parler de décorations mais pour faire court, nous devons maintenir le moral de nos compagnons au top et pour ce faire, il faut de quoi leur changer les idées et leur octroyer un minimum de confort, d’où l’aménagement de plantes vertes, de lits, d’un tourne-disque, d’une télé ou bien de fauteuils. Au fur et à mesure des quêtes, nous pouvons recruter jusqu’à 5 compagnons qui peuvent eux-même partir en mission sur nos ordres. Au préalable, il faut être vigilant à l’équipement que nous leur donnons ainsi qu’à leur santé et leur état moral car cela influe sur leur pourcentage de réussite selon le type de quête que nous leur assignons (récupération de munitions, de vivres, de médicaments…). Nous pouvons également leur donner la responsabilité de faire les quêtes principales et annexes (chose que nous n’avons pas fait, nous préférons prendre la tête des opérations) mais il sera plus compliqué d’atteindre un pourcentage assez élevé pour être sûr qu’ils reviennent en vie.

“Pourquoi s’inquiéter d’une chose qui n’arrivera pas ?”

Entraînez vous et améliorer vos compétences pour devenir un véritable soldat

Chernobylite est un jeu mêlant adroitement FPS, RPG, science-fiction et survie. Du côté FPS, nous nous contentons de la vue à la première personne et de quelques passages de gunfight. En dehors de ça, Chernobylite se rapproche davantage d’un RPG à travers son gameplay : compétences du personnage à améliorer via les points d’expérience, loot, crafting et upgrade des armes. Chaque compagnon que nous recrutons nous permet de débloquer et améliorer 3 compétences chacun, contre 1 à 4 points d’expérience. Notre base reste le point de départ de chaque journée, et donc de chaque mission et l’amélioration de notre personnage se fait exclusivement en soirée au retour d’une grosse journée de boulot.

Soyez vigilants aux relations que vous entretenez avec vos camarades si vous ne voulez pas qu’ils vous lâchent

Pour entretenir la bonne entente au sein de la bande, nous devons penser à soigner nos camarades s’ils sont blessés et surtout leur octroyer une ration de nourriture pour maintenir leur moral et leur santé à flot. Si nous négligeons nos compagnons, ils finiront par se lasser et nous détester au point de quitter le groupe. D’ailleurs, durant les différentes missions principales comme annexes, nous devons prendre certaines décisions qui ont des conséquences sur nos relations avec les autres : faire exploser un convoi ennemi va assouvir la soif de vengeance de l’un mais nous faire passer pour un monstre sanguinaire qui n’a pas réfléchi aux pertes civiles pour l’autre. Il est donc important de réfléchir à notre niveau relationnel avec chaque membre de l’équipe avant de prendre une quelconque décision. Le niveau de relation va d’excellente à désastreuse et si ce dernier stade est atteint, le coéquipier en question nous claque la porte au nez sans retour possible. Enfin presque…

Mourir, ça devient intéressant quand on peut changer ses choix passés

La science-fiction dans Chernobylite est palpable à travers des créatures étranges, quoique trop peu diversifiées, capables d’ouvrir des portails inter-dimensionnels à l’instar de notre pistolet, de se téléporter ou bien de nous balancer des projectiles radioactifs mais pas seulement. En effet, lorsque nous mourrons, nous atterrissons dans une dimension alternative et dans ce lieu, nous avons la possibilité de modifier les choix faits auparavant et espérer changer le cours de notre histoire. Nous pouvons donc ici réécrire notre destin et de ce fait, améliorer à nouveau nos relations mises à mal jadis. Évidemment, tout cela a un prix puisqu’à chaque décès, nous perdons du stuff aléatoirement. Il ne faut donc pas en abuser mais cela est clairement un atout de taille car dans Chernobylite, il est important de maintenir des relations cordiales avec tous nos camarades, leur présence étant essentielle pour la quête finale qui nécessite des compétences bien particulières propres à chacun. Si nous en perdons un, la mission peut facilement tourner au vinaigre, d’où la nécessité de les choyer !

“Vous faites face à quelque chose qui ne s’est encore jamais produit sur Terre”

Chaque personnage peut faire des missions, mais attention à son pourcentage de réussite

Une fois réveillé, nous devons choisir qui doit partir en mission et laquelle assigner à chacun. Ces missions de récolte, annexes ou principales se déroulent au travers de 5 zones dans lesquelles nous retournons à loisir selon la mission choisie. Au fil de l’histoire, nous remarquons que les zones évoluent, changent, se détériorent. En effet, du haut de notre tour de graphite, nous repérons davantage d’hélicoptères en vol, de projecteurs à la recherche de civils à effrayer ou de stalkers à faire sortir de leur trou. En parallèle, des dômes et des amas de matières verdâtres font leur apparition et laissent présager une présence accrue de créatures dans la zone d’exclusion. Une fois sur le terrain, libre à nous d’opter pour la furtivité ou au contraire, de rentrer dans le tas comme un bourrin. Le jeu est très bien réalisé, au point que nous n’ayons pas à choisir une méthode par dépit, ce qui offre un sentiment de liberté vraiment agréable, tout comme les zones semi-ouvertes, pas forcément gigantesques mais qui nous permettent d’aller où bon nous semble. Chaque map propose différents points d’intérêt comme des flash-backs, des événements aléatoires ou bien des PNJ mettant à disposition des munitions, du stuff ou des ressources.

N’hésitez pas à installer des pièges pour surprendre vos ennemis

En tant qu’ancien physicien de Tchernobyl, nous avons en notre possession un compteur Geiger nous permettant de détecter les hausses de taux de radiation et équipé d’un scanner pour déceler les différentes ressources disponibles autour de nous comme des herbes, des champignons, des produits chimiques, des munitions, du combustibles ou des composants électroniques. Toutes ces ressources permettent de crafter des armes (revolver, fusil de chasse et le célèbre AK-47), des armures (rudimentaire, tactique, lourde, de camouflage), et des soins (médicament anti radiation, alcool, kit de soin…). Et comme si tout cela ne suffisait pas, nous pouvons également construire des pièges comme des mines, des explosifs, des lasers etc mais aussi des modificateurs d’environnements. Une fois sur la zone et après un certain temps passé sur place, nous pouvons rencontrer des tempêtes environnementales se résumant à des éclairs de tchernobylites pouvant nous irradier et l’apparition du Stalker sinistre, cet individu aux pouvoirs surnaturels qui nous pourchasse. Les pièges environnementaux servent donc à réduire voire à contrer les effets des tempêtes.

La désolation comme si on y était

Graphiquement, Chernobylite est très beau excepté peut-être les animations des personnages et des créatures légèrement à la ramasse. Cependant, le rendu des paysages est particulièrement immersif et effrayant de réalisme grâce à l’Unreal Engine 4, mais surtout, grâce à une équipe de développement au taquet qui est allée jusqu’à modéliser en 3D les vrais environnements de la zone de Tchernobyl, rien que ça ! Il va sans dire que les jeux de lumières sont parfaitement maîtrisés et que l’ambiance à la fois contemplative et inquiétante est au rendez-vous. L’immersion du titre est aussi due à une bande sonore réussie qui oscille entre un silence pesant seulement brisé par le bruit du compteur Geiger qui s’emballe, et les musiques d’action entrainantes durant les passages de gunfight. Ajoutons ici un doublage frôlant la perfection en russe sous-titré français pour une plongée quasi-totale en république socialiste soviétique d’Ukraine. Pour conclure le tout, les passages de dialogues au sein de votre base sont très souvent agrémentés d’informations et détails historiques comme par exemple la critique de la politique slave et de la gestion de la catastrophe nucléaire ou encore la référence à ce projet de réacteur mobile décidément abandonné ou également cette théorie selon laquelle la catastrophe aurait été le moyen de camoufler l’échec technologique du système Duga (une antenne radar trans-horizon). Les échanges sont incroyablement captivant de par leur maturité, leur sérieux et leur profondeur. Petit bémol cependant, nous sommes totalement absorbés par la musique du menu tout bonnement merveilleuse mais apprenons qu’elle a été utilisée sans l’accord de son auteur, Frédéric Biraud. Mauvais point pour vous The Farm 51, le vol, c’est pas bien. Comme l’irradiation en fait.

“Nous, nous restons ici. Et nous serons morts dans les 5 ans à venir”

Tuer discrétement les soldats du NAR, le meilleur moment d’une journée de Stalker

Si la méthode infiltration est efficace et permet de terrasser un ennemi (sauf les plus lourdement armés et les monstres), il faut savoir que tuer sabote notre moral qu’il faut restaurer à l’aide d’alcool ou d’une mixture préparée par nos soins. Côté gunfight, on déplore une mécanique trop pauvre et sans réel challenge, surtout une fois que nous avons amélioré nos armes. Sans parler de l’IA qui, à notre grand regret, est complètement larguée. Soit les protagonistes sont omniscients et nous repèrent à travers les murs, soit ils sont aveugles et ne nous voient pas, même accroupis juste devant leur nez. Sans parler du fait qu’ils ne réagissent que si nous leur tirons directement dessus : un tir qui frôle leur oreille ne leur fait ni chaud ni froid et ils continuent tout simplement leur petite vie tranquille, sans même voir l’impact de balle à 2 cm de leur tête. Nous avons donc privilégié, et fortement apprécié, la méthode furtive qui nous fait nous sentir ninja et espion dans l’âme.

C’est un bug graphique ou un mur avec des bras ?

Concernant le gameplay d’Igor, nous affectionnons tout particulièrement ses réactions comme l’essoufflement après un sprint ou ses tremblements lors de la visée. Rappelons-nous tout de même qu’Igor est un physicien, pas un militaire entraîné ou un guerrier et ses facultés dans Chernobylite sont justement plus proches de la réalité que celles de beaucoup de personnages du genre. Félicitations donc à The Farm 51 qui a réussi à rendre Igor humain malgré un monde apocalyptique que nous aurions aimé être fictif. Nous regrettons aussi quelques bugs graphiques lors des chargements, et sonores lors d’une des quêtes finales. Mais au-delà de ça, nous avons dévoré les 30h de jeu de Chernobylite et n’en avons perdu aucune miette.

Testé sur Xbox One

Bilan

On a aimé :

  • Les graphismes réalistes
  • Le doublage russe réussi et la BO efficace
  • Les choix décisifs et la très bonne durée de vie
  • L’histoire prenante et l’atmosphère immersive
  • Les personnages bien écrits

On a pas aimé :

  • L’IA très inégale
  • Le bestiaire limité
  • Les gunfights moins intéressants que la furtivité
”- 3,6 Röntgen ? C’est loin d’être dramatique. - Ce n’est pas 3,6 Röntgen, mais 15 000 !”

Chernobylite est clairement la très bonne surprise de cette fin d’année. The Farm 51 réussit avec brio à retranscrire les environnements de Tchernobyl et parvient à immerger son joueur dans une ambiance à la fois intrigante et terrifiante. Ce triomphe est principalement porté par le réalisme des paysages et surtout celui des dialogues et documents trouvés ça et là dans la zone d’exclusion. Que ce soit les tourments des personnages, les critiques politiques ou bien les évocations de projets ayant réellement existé, tout est mis en place pour recréer une sensation oppressante empreinte de curiosité malsaine sur ce qu’il s’est passé durant la catastrophe nucléaire de Tchernobyl. D’un côté plus fictionnel, on regrette que l’IA et le bestiaire n’aient pas été plus travaillés mais cela n’entache en rien la qualité du titre et sa faculté à nous tenir en haleine durant environ 30 heures pour apprécier une fin digne des plus grands jeux. En parallèle de l’incroyable mini-série Chernobyl, il est clair que les catastrophes (nucléaires ou non) ont de beaux jours devant elles et restent sources des plus beaux projets audiovisuels et vidéoludiques. Tant mieux pour Chernobylite et tant pis pour nous.

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Chernobylite

PEGI 0

Genre : Survival Action

Éditeur : The Farm 51

Développeur : The Farm 51

Date de sortie : 07/09/2021

Prévu sur :

Xbox One, PlayStation 4, PC Windows

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Frederic BIRAUD

05 jui 2022 @ 13:03

Petit bémol cependant, nous sommes totalement absorbés par la musique du menu tout bonnement merveilleuse mais apprenons qu’elle a été utilisée sans l’accord de son auteur, Frédéric Biraud. Mauvais point pour vous The Farm 51, le vol, c’est pas bien. Comme l’irradiation en fait.

Bonjour. Et merci pour cet hommage. A leur decharge, ils ne l’ont pas vraiment volé cette musique, mais ils l’ont acheté sur une plateforme de musique et elle leur a été vendu par quelqu’un qui lui, me l’avait volé. Jamais pu obtenir de la part de la SACEM la moindre reclamation, je me suis heurté à un refus pur et simple de leur part malgre mes multiples relances. J’ai fini par laisser tomber, ayant compris que cet organisme etait bidon ou alors, reservé à une categorie de gens à laquelle je n’appartient pas... Neanmoins, ce n’est pas The Farm 51qui m’a volé cette musique, et en ce qui me concerne, cela reste pour moi un honneur que de voir un de mes morceaux utilisé dans ce jeu, meme si malheureusement, je n’y suis pas et n’y serais probablement jamais crédité. Encore une fois merci à vous. Cordialement,

BIRAUD Frederic