Test - Arkham Horror : Mother’s Embrace - Les Demeures de l’Épouvante sur le seuil

«Les Grands Anciens sont mieux en figurine» , - 0 réaction(s)

Je ne vais pas vous faire l’affront de vous présenter Howard Phillips Lovecraft en guise d’introduction du test d’un énième jeu adapté de son œuvre culte. Si vous ne connaissez pas, je peux toujours vous inviter, car il n’est jamais trop tard, de vous lancer dans la lecture de ses romans et autres nouvelles, de regarder un documentaire sur sa vie ou de découvrir l’un des films influencé par ses écrits ou même de jouer à l’un des nombreux jeux de société inspirés par son mythe. Car oui, les auteurs de jeux de société se sont emparés très tôt de l’œuvre de ce cher H.P. Lovecraft pour la décliner à toutes les sauces. Après le jeu de rôle L’Appel de Cthulhu de 1981 et le jeu de plateau Horreur à Arkham de 1987, on trouve une pléthore de jeux ou d’extensions comme Pandemic : Le Règne de Cthulhu pour rester dans l’actualité du moment, une version de Monopoly bien entendu et même un Twister ! Cette petite parenthèse “Cthuluesque” vers le jeu de société n’est pas innocente car Arkham Horror : Mother’s Embrace est l’adaptation vidéoludique d’un jeu de plateau : Les Demeures de l’Épouvante.

Horreur à Arkham, les Demeures de l’épouvante

Photo maison des Demeures de l’Épouvante

Horreur à Arkham, c’est l’histoire d’un jeu qui est devenu une franchise. C’est en 1987 que Richard Launius propose à Chaosium Inc. un jeu de plateau coopératif tiré de leur jeu de rôle L’Appel de Cthulhu. Ce jeu qui devait s’appeler initialement, et tout simplement, L’Appel de Cthulhu : Le jeu de plateau prit le nom de Horreur à Arkham. La première version d’Horreur à Arkham ne fut jamais rééditée par Chaosium et il fallut attendre 2005 pour voir la licence renaître sous la houlette de l’éditeur Fantasy Flight Games qui avait auparavant mis la main sur le Mythos de Chaosium, le jeu de carte à collectionner Cthulhu. Fantasy Flight Games changea radicalement les règles du jeu original sur cette deuxième version en y ajoutant des éléments issus du jeu de cartes.

Mother’s Embrace ne va pas nous cantonner à Arkham, son asile et son université...

C’est le début de l’aventure Cthulhu pour Fantasy Flight Games qui va décliner cet univers dans ce qu’ils vont appeler les dossiers Arkham Horror. Dans cette collection on va retrouver deux versions du jeu de plateau original, celle de 2005 et la troisième sortie en 2018, une excellente version sous forme de jeu de cartes évolutif sortie en 2016, le Signe des Anciens un autre jeu de carte et de dés sorti en 2011 et la même année la première édition des Demeures de l’Épouvante, un “mansion crawler” avec des figurines dont la deuxième édition est sortie en 2016. Cette dernière repose sur une expérience coopérative mixte entre le jeu vidéo et le support d’une application tablette essentielle pour pouvoir jouer et le jeu de plateau avec de très belles figurines, de grosses tuiles joliment illustrées et pleins de pions. Toutefois le jeu a le cul entre deux chaises : ce qu’il gagne en autonomie et en aide de jeu, il le perd en cohérence et en immersion.

Chaque investigateur ne peut porter que 4 objets

Ce petit tour d’horizon ludique demeurait essentiel pour connaître l’origine de Arkham Horror : Mother’s Embrace, son développeur Asmodee, géant du jeu société, étant à ce jour la maison mère de Fantasy Flight Games. Initialement, le jeu devait même s’appeler Mansion of Madness : Mother’s Embrace, mais le nom d’Arkham est quand même plus rattaché à la mythologie Lovecraftienne. Je vais arrêter là de vous parler du jeu de plateau, juste vous inviter une nouvelle fois à le découvrir si vous en avez l’occasion, de même que pour les autres jeux de la gamme. Sachez simplement que le jeu de plateau “Les Demeures de l’Épouvante” est bien meilleur que Mother’s Embrace et pas seulement parce qu’il permet d’assouvir notre besoin essentiel, quoiqu’en disent certains, de socialisation vu qu’il peut se jouer jusqu’à cinq, il est aussi plus profond, plus dense, plus immersif. Mother’s Embrace a toutefois quelques qualités, il est largement moins cher (19.99 euros), beaucoup plus facile à ranger, les règles sont beaucoup plus simples et il peut vous donner envie de découvrir le jeu de plateau !

Par delà le mur du sommeil

Chaque investigateur a ses forces et ses faiblesses

1926, Arkham, États-Unis. Pour l’investigateur de l’étrange que vous êtes, tout commence par une étrange invitation : celle de la professeure d’astronomie de l’université de Miskatonic, Wilhelmina Tillinghast qui vous demande de la rejoindre dans son manoir. Elle souhaite vous parler d’une bien étrange découverte qu’elle a faite lors de ses recherches. Mais lorsque vous arrivez sur les lieux, il est déjà trop tard, ce n’est que le corps atrocement mutilé de la scientifique que vous découvrez. Ce n’est que le début d’une effroyable plongée dans l’abîme à la frontière de la folie et de l’horreur.

Le jeu alterne enquête et combat

On choisit notre personnage de départ dans une liste bien connue des habitués de la série Horreur à Arkham. Il s’agit d’une petite sélection des investigateurs les plus emblématiques de la franchise comme Jenny Barnes, Roland Banks ou Rex Murphy. Au fil des scénarios, l’équipe s’étoffe considérablement, mais reste limitée à deux investigateurs sur le terrain. Les autres resteront au bureau pour se reposer et panser leurs plaies aussi bien physiques que mentales. Ces investigateurs disposent de caractéristiques réduites à leur plus simple expression comparé au jeu de plateau. Fini les points de force, d’agilité et consorts, on se contente ici de talents et de capacités de combat montrant que le détective s’exprime mieux avec un flingue, qu’avec une batte de baseball ou un livre de sortilège. Les talents ne servent pas à grand-chose, mis à part d’aiguiller le joueur lors de choix multiples arrivant durant l’exploration.

Mother’s Embrace embrasse (oui, je l’ai fait et je n’en suis pas fier !) le rythme du jeu de plateau, alternant les phases d’enquête et de combat. Les phases d’enquête se résument à explorer les jolis environnements figés du jeu, qui bien évidemment comportent les lieux les plus emblématiques d’Arkham, tel que son asile de fous et son université. Les endroits remarquables sont bien apparents, ce qui réduit le gameplay à “cliquer sur A” sur toutes les icônes “loupes” qui apparaissent dans le décor. On a connu plus passionnant. Cette exploration empirique est aussi le moyen le plus sûr de sombrer dans la folie pour nos chers investigateurs, tout semble être un prétexte pour passer un test de santé mentale.

Si ça saigne...

Ce dernier est totalement automatisé, passif, on ne fait que constater les dégâts et rigoler sur sa cause : un disque rayé, une coupure de journal, une tâche qui semble être du sang, un tableau moche et beau à la fois, et j’en passe. Au début, on stresse un peu devant la chute implacable des points de santé mentale de nos personnages, jusqu’à ce que l’on se rende compte que les effets négatifs donnés par les traumatismes sont si superficiels qu’ils rendent la folie acceptable. Ce manque de stress se ressent aussi sur l’avancée du mythe. Dans le jeu de plateau, cela définissait un mécanisme qui obligeait les joueurs à lutter contre le temps, à maximiser leurs actions afin d’éviter un game over qui s’approchait inexorablement. Dans Mother’s Embrace, l’évolution du mythe symbolisée par une horloge avançant selon nos mauvais choix d’exploration et à certains éléments clés du jeu, ne sert qu’à ajouter un malus totalement anecdotique et donc ne sert globalement à rien.

Tout sauf Profond

Les vélos Cthulhu vous connaissez ?

On regrette le même manque d’ambition et de créativité pour la phase des combats. On se retrouve devant un énième jeu au tour par tour, à gérer les points d’action de nos personnages pour utiliser armes, soins, sorts et déplacement. L’aspect tactique est réduit à son minimum à cause de la pauvreté de l’environnement et des actions disponibles, en gros on tape le plus fort possible sur un adversaire jusqu’à ce qu’il tombe avant de passer au suivant. Les combats souffrent, tout comme le jeu, d’une mise en scène atone, molle et sans inspiration. Les créatures innommables et autres cultistes belliqueux apparaissent au petit bonheur la chance dans le décor comme un poil de Cthulhu dans la soupe.

Heureusement que les traumas ne sont pas si handicapant que ça...

Le jeu reste très narratif, comportant beaucoup de textes, en français, et un doublage anglais assez moyen. Il est de plus soutenu par la voix de la défunte Wilhelmina qui va commenter les évènements post-mortem, un choix étrange, qui nuit à l’immersion en lui donnant un recul malvenu ou en anticipant la rencontre avec des personnages et la visite de certains lieux. Cela s’accompagne de gros problèmes d’incohérence, mais nous ne sommes plus à ça près, pour un jeu qui ressemble à un Grand Ancien jeu. Les musiques et l’ambiance sonore sauvent un peu Mother’s Embrace du marasme (pas facile à lire hein ?) en étant agréables et possèdent un cachet que la direction artistique du jeu n’a malheureusement pas.

Mother’s Embrace a été testé sur Xbox One X et sur Xbox One. Le jeu comporte 20 succès pour 1000G, assez faciles à obtenir.

Bilan

On a aimé :
  • Peut donner envie de découvrir le jeu de plateau
  • Les musiques
On n’a pas aimé :
  • Une narration dans l’abîme du temps
  • Un rythme qui hante les ténèbres
  • Un gameplay qui est resté sur le seuil
Celui qui chuchotait dans les ténèbres que les Demeures de l’Épouvante c’est mieux.

Ceci est un avis d’amateur et donc à prendre comme tel, un amateur de Lovecraft et des jeux Horreur à Arkham coopératifs de Fantasy Flight Games. Arkham Horror : Mother’s Embrace est une déception, une sorte d’ersatz épuré et dénaturé d’un jeu de plateau sympathique qui mérite d’être découvert, et je ne vais même pas parler de mon amour fou pour Horreur à Arkham JCE. Mother’s Embrace est une transposition vidéoludique, sans créativité, un peu feignante, très molle mais les habitués de la série vont peut-être retrouver avec plaisir certains personnages emblématiques de la franchise et rester sensible à son ambiance. Pour les autres, le jeu peut faire office d’excellent somnifère plutôt que d’une bonne entrée en matière dans l’univers de H.P. Lovecraft et des jeux de société de FFG. Et c’est bien dommage...

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Arkham Horror : Mother’s Embrace

Genre : Action

Editeur : Asmodee Digital

Développeur : Artefacts Studios

Date de sortie : 23/03/2021

Prévu sur :

Xbox Series X/S, Xbox One, PlayStation 4, PC Windows, Nintendo Switch