Test - Far Cry 5

«J’vais te manger le mulet» , - 11 réaction(s)

Après le retour gagnant d’Assassin’s Creed Origins, on était curieux de voir quel virage allait prendre la licence Far Cry. Depuis le succès critique et public du troisième, il faut dire que la recette Ubisoft était appliquée à la lettre au point de laisser un arrière-goût rance, celui du jeu bricolé avec les restes d’ingrédients du précédent, le tout édulcoré d’une dose d’épices exotiques. Car ce qui faisait le sel des précédents opus, c’était principalement le voyage qu’il proposait de faire depuis son fauteuil. Cette fois-ci, direction le Montana avec ses rednecks fanatiques et ses habitants à la gâchette facile. Mettez de la Bud au frais, l’immersion n’en sera que meilleure.

Redneck Rampage

Ange ou démon ?

Tout jeune rookie que vous êtes, vous commencez le jeu par une mission périlleuse qui a toutes les chances de partir en cacahuète au moindre regard de travers. Accompagné de votre boss le shérif du coin, d’un autre adjoint et du marshall Burke, vous vous rendez tranquillement en hélicoptère dans l’église de Joseph Seed, un fanatique religieux qui met à feu et à sang la vallée de Hope County. Un plan brillant d’intelligence et de finesse chapeauté par le marshall. Bien sûr, les dizaines de membres de la secte, tous armés jusqu’aux dents mettent la pression au groupe au point de faire basculer cette sympathique sortie dominicale en une course poursuite effrénée dans les bois.

La mort est dans le prè

Cette introduction met carrément l’ambiance. D’une part parce que l’idée d’aller casser du redneck sur son territoire sauvage est assez jubilatoire. D’autre part, parce que déciment une secte d’illuminés pensant suivre la voix du seigneur Dieu, ce n’est pas une proposition courante. Enfin, et surtout, parce que le jeu nous lâche directement dans une course-poursuite dans les bois sans prendre le temps d’indiquer un objectif ni de nous rabâcher un de ces tutoriels sur comment se déplacer qui agace tout le monde. Jouant à cache-cache sans trop comprendre ce qui se passe dans la région émoustillera grandement le joueur en vous qui aime la liberté d’action, élément dont il sera grandement question dans la progression du jeu.

Les Bad Seeds sans la poésie de Nick Cave

À visiter en scooter

La secte de la famille Seed se divise le territoire de Hope County pour mieux régner. Dans votre tête, vous comprenez déjà que vous allez devoir tuer les seconds avant de pouvoir atteindre le père et vous avez entièrement raison. Chose aussi commode pour vous, chacun des trois frères et sœur garde un de vos collègues entre ses griffes, raison de plus pour aller les récupérer avant de revenir en force sur l’îlot central de la map qui sert de cachette au grand méchant Joseph. À vous de décider si vous préférez vous diriger chez Jacob, le militaire qui aime triturer les esprits, chez Faith, la jeune hippie adepte de la défonce sous psychotropes, ou enfin chez John, le petit sadique de la famille qui fait une fixation sur les péchés des gens. C’est d’ailleurs à ce moment là que l’écriture du jeu montre ses premières faiblesses.

Il y avait pénurie de clou

Chaque région prend une idée d’un autre bon jeu pour essayer de casser la monotonie. Seulement, cela donne l’impression d’un jeu morcelé qui bouffe à tous les râteliers pour plaire aux joueurs. Vous aimiez les délires hallucinogènes de Far Cry 4 ? Vous les avez. Bioshock reste une référence en matière de mind-fuck ? C’est ici repris. Dans l’idée, cela ne fait pas de ce Far Cry 5 un mauvais jeu mais cela lui laisse un arrière-goût de déjà-vu plutôt gênant dont on n’arrive pas à se débarrasser. Aussi, en proposant plusieurs antagonistes, l’aura de chacun en pâtit. Ils manquent cruellement de profondeur puisqu’on les rencontre peu de fois. Il en va de même finalement avec le big boss qui intervient par-ci par-là sans être assez présent dans le jeu pour marquer les esprits. La narration est aussi totalement décousue. À des moments inopinés, les ennemis viendront vous kidnapper pour vous faire subir moult choses sans jamais vous tuer. Une fois, passe encore, mais trois fois par région, c’est un poil abusé. Les incohérences sont nombreuses mais ce n’est pas l’unique déception du jeu. Alors que l’on aurait voulu que l’histoire décolle avec un ton plus corrosif envers les États-Unis, envers la société actuelle qui fabriquerait ses fanatiques religieux,... elle n’est finalement qu’une petite farce potache dont la violence des mises en scène macabres ne prend jamais corps dans ses propos. Les personnages passent leur temps à geindre sur les péchés des gens et de la société déjà foutue, discours éculés de piliers de bars alcoolisés.

Crève MAGA !

L’Amérique et ses barbecues

Une fois tous les espoirs sur la narration envolés, il reste fort heureusement la partie gameplay du titre pour se satisfaire. On peut se réjouir d’une chose : la disparition des mécaniques répétitives des tours de guet à escalader pour découvrir des points d’intérêt. Ici, il faut se promener et aller à la rencontre des habitants afin qu’ils servent de guide touristique en apprenant au joueur les coins intéressants à voir dans la région. L’exploration en devient plus agréable et moins itérative même si elle tombe dans un autre travers : tout le monde à son petit quelque chose à dire et dans chaque maison vide il y a une jolie note pour indiquer comment rentrer dans la grange blindée de matos. L’artifice est facile mais au moins on ne se retrouve pas avec une carte illisible martelée de points d’intérêts. Tout comme pour les missions principales, cette approche scénarisée des objectifs, très GTA dans l’âme, amène un peu de vie dans la région. La progression se fait via l’expérience et chaque mission augmente la jauge de la région. Dans chacune d’elles, trois paliers sont à atteindre, déclenchant une mission faisant intervenir le boss du coin jusqu’à la dernière où l’on peut délivrer la région de sa présence. Bien sûr, on peut picorer le jeu en se déplaçant librement d’un coin de la map à un autre.

Gardez la pêche entre deux massacres

Hope County est très agréable à parcourir. Entre ses montagnes se cachent des rivières, des lacs, des champs, des forêts denses, des villages. Dans l’ensemble, la palette de couleurs ne varie pas trop d’un coin à un autre ce qui donne l’impression, en regardant de haut la map, que tout se ressemble. Pourtant, les trois secteurs comportent des spécificités permettant de les distinguer et d’y varier les activités. Quoi de mieux que de partager des bières en allant chasser l’élan ou rester paisiblement assis au bord d’une rivière à taquiner le goujon ? Tout cela est possible mais n’apporte finalement que peu d’intérêt au jeu puisque toute la partie crafting d’équipement est ici passée à la trappe. Il reste quelques courses en avion et autres engins pour se distraire mais le jeu semble avoir misé sur ses habitants qui racontent des histoires pour nous occuper au lieu de mettre en scène des phases de gameplay plus variées. Car au bout du compte, on ne fait que tuer des ennemis qui gardent en otage machin ou squattent la maison de truc.

Toujours faire du repérage avant de choisir son hôtel

Ce manque de variété est aussi accentué par le jeu dans sa manie de vouloir toujours mettre quelque chose en scène ou multiplier les raisons de sortir les armes. Comme aux USA tout le monde est armé, c’est bien connu, les fusillades sont nombreuses. Il est impossible de se balader plus de quelques secondes sans tomber sur un groupe d’alliés en pleine rixe, des ennemis qui gardent en otage un civil, un barrage routier, un VIP de la secte qui se promène dans la nature, des animaux féroces... Même en se baladant à couvert dans les bois loin des routes, il faut qu’un engin volant ennemi repère le joueur pour le mitrailler. Le jeu ne laisse que rarement le temps de profiter de ses merveilleux décors afin de faire un peu d’exploration. On peut dire qu’on ne s’y ennuie pas, si tant est qu’on ne se lasse pas de tirer. Tel un enfant pourri gâté, on reste constamment occupé avec des nouveaux jouets mais cela ne se fait-il pas au détriment des stimulis qui mènent à l’épanouissement intellectuel ?

Le tir sur hélico, tellement mieux que le ball-trap

Évidemment, il est tout à fait possible de réussir à s’amuser en mode bas du front, mitraillant à tout-va et faisant exploser tout ce qui peut l’être. Le gameplay est toujours aussi arcade et permissif rendant possible des assauts sur des places hautement gardées en fonçant tête baissée. Il faut dire que l’IA d’huître des ennemis rend la sauvagerie telle que l’on ne peut que garder le sourire quand, dopé aux drogues renforçant vitesse, défense et force, on fait valser d’une pichenette n’importe qui, le tout sur fond de musique religieuse diffusée par les mécréants. L’approche furtive est aussi possible même si l’on est parfois repéré de manière surprenante. Heureusement, on est quand même loin des soucis du deuxième opus avec les gardes qui repéraient le joueur à des kilomètres pour placer des headshots à l’arme de poing. Ici, on regrette surtout le manque de diversité des ennemis qui, en plus de tous avoir la même tronche, proposent des archétypes éculés et peu variés. Soit on a affaire à un péquenot à la mitraillette ou fusil à pompe, soit un chasseur à l’arc ou alors un molosse surprotégé à l’arme lourde. Le carnage prend aussi une autre ampleur lorsque l’on convie des amis à la sauterie, qu’il s’agisse d’une ou deux IA furtives ou rentre-dedans ou d’un autre joueur en ligne. Là où la difficulté un peu aléatoire du titre peut donner du fil à retordre en solitaire, c’est une tout autre chose une fois accompagné. Le plaisir de la bestialité à plusieurs. Finalement, les pires de la région ne sont peut-être pas ces marginaux illuminés qui veulent vivre dans leur coin en tuant ceux qui se promènent sur leur terrain.

L’Amérique en carte postale

Ouais, vive la liberté o/

Le grand intérêt de ce Far Cry 5, celui qui laissera tout le monde d’accord, c’est la qualité de sa réalisation. Le jeu est splendide et tourne à merveille (en dehors de quelques saccades en engin aérien même sur One X). Les environnements sont très détaillés et réalistes. Les textures ne sont pas en reste et la gestion de la lumière est vraiment terrible. Le plus impressionnant reste cependant le rendu des flammes et leurs propagations dans les champs et hautes herbes. On a souvent envie d’allumer le barbecue pour faire griller du redneck juteux. La distance d’affichage en impose aussi par sa profondeur, même avec de nombreux arbres à perte de vue. Ceux-ci semblent au demeurant assez figés, très peu perturbés par des bourrasques de vent. Ubisoft est coutumier de ce genre de performance et ils ne dérogent pas à leurs habitudes : on se croirait vraiment dans le Montana. Le jeu vient aussi avec ses petits bugs comme des ennemis qui se glissent ultra rapidement d’un point à un autre (visible quand on les observe de haut) quand ils ne donnent pas l’impression de surgir de nulle part. Les collisions sont plutôt bien gérées dans l’ensemble mais en montagne, on a parfois du mal à escalader des rochers pourtant pas bien grands. En dehors de l’IA et du pathfinding chaotique, rien de tout cela ne vient vraiment gâcher les fusillades. Pouce bleu pour l’OST qui arrive à placer du The Vines ou du Eels au milieu de vieux classiques et autres chansons de cul-bénit.

Pouf c’est tout

Avec ses centaines de mission, il y a moyen de passer beaucoup de temps sur ce FarCry 5. Si on veut s’amuser à tout faire pour débloquer un max d’armes, de véhicules ou de compétences, il faut prévoir bien plus qu’une trentaine d’heures à parcourir la map de long en large. Bien sûr, il y a un système de micro-transactions qui permet d’acheter des crédits du jeu mais cela n’est vraiment pas obligatoire. En plus de la campagne conséquente, le jeu est livré avec un éditeur de map communautaire dans le mode Arcade. Il est possible alors de se créer son niveau et ses règles dont les autres joueurs pourront profiter par la suite. La qualité du contenu dépendra de la communauté mais en tout cas, les outils semblent permettre de belles choses. À voir sur la durée si la mayonnaise prend.

Bilan

On a aimé :
  • Beau comme un camion
  • Bye-bye les tours de guet
  • Défoulant et nerveux
  • Des habitants pour nous conter des histoires
  • Ambiance sonore au poil
  • Une VF pas trop mal gaulée
  • Du redneck à griller…
On n’a pas aimé :
  • ...mais ça manque un peu de mulet
  • Des méchants pas très intéressants
  • La narration trop hésitante et décousue
  • Des ennemis tout le temps, partout
  • Des missions secondaires sans grand intérêt
Make Far Cry Great again

Far Cry 5 est aussi défoulant que décevant. La zone de jeu plaisante, en plus d’être éblouissante visuellement, est le théâtre d’une progression moins mécanique ; Ubisoft continue de s’éloigner de sa manière habituelle de créer des open-worlds. Cette liberté accrue se fait au détriment parfois des logiques de la narration qui est un des points faibles du jeu. Alors même qu’il faut passer du temps à échanger avec les différents PNJ pour découvrir les points d’intérêts et des missions secondaires, les grands méchants Seed ont finalement trop peu de place au milieu de tout cela pour être marquants autant dans leur background que dans leurs propos. Il ne reste alors qu’un immense défouloir qui saura ravir le forcené qui sommeille en vous ou le justicier ravi d’en découdre avec des illuminés perdus dans la nature sauvage américaine.

Accueil > Tests > Tests Xbox One

Far Cry 5

PEGI 0

Genre : FPS

Éditeur : Ubisoft

Développeur : Ubisoft

Date de sortie : 27/03/2018

Prévu sur :

Xbox One, PlayStation 4, PC Windows

11 reactions

Batto

04 avr 2018 @ 12:01

C’est quand même plaisant de se promener dans ces décors magnifique (je joue sur la X), je me surprend a admirer et regarder partout comme pour un Skyrim et Oblivion, bon après ça reste du Far Cry oui mais c’est bien fun, des ennemis partout oui mais c’est bien fun (bis).

En fait le seul truc qui manque dans ce jeu pour que l’intérêt grimpe en flèche c’est un système RPG comme pour le dernier AC.

12