La sortie de FIFA 22 n’a pas été une surprise cette année non plus, mais nous avons néanmoins noté que la monétisation de FUT a été décriée par beaucoup, et encore plus sur cet épisode. La question revient régulièrement sur la table, mais sans régulation comme l’a fait la Belgique - en associant les loot box à un jeu d’argent/de hasard - EA ne semble pas décidé à changer ses habitudes. Electronic Arts répond aujourd’hui au sujet au travers des questions sans filtre de Eurogamer.
Pay to Win dans FIFA : « c’est comme dans le monde réel » pour Electronic Arts
L’interview est en anglais, mais ô combien intéressante et enrichissante de par les questions posées par le journaliste Wesley Yin-Poole. Si vous le pouvez, on vous conseille de la lire en entier pour saisir toutes les subtilités des réponses apportées par EA et de la position adoptée par l’éditeur qui semble nier tout problème.
C’est Chris Bruzzo, Chief Experience Officer chez EA, qui a répondu à l’épineuse question de FIFA et des loot boxes. Après avoir défendu les équipes de développement derrière FIFA, Chris Bruzzo explique pourquoi il y a des loot boxes dans FIFA. Selon lui, il s’agit de « renforcer le lien entre le sport du monde réel et le jeu, le jeu FIFA auquel vous jouez. Progrès, engagement, cela se construit, comme dans une vraie saison mondiale ».
En fait, nous avons créé ces choses sur une longue période de temps pour refléter ce que l’on ressent, les choix stratégiques difficiles que vous devez faire lorsque vous mettez sur pied une équipe qui fonctionne de manière unique, comme cette équipe que vous voulez gérer et avec qui vous voulez jouer. C’est pourquoi tout s’emboîte comme cela. Et n’oublions pas qu’il y a un marché des transferts.
Le journaliste va alors plus loin et évoque que le problème de FIFA et des loot boxes, c’est qu’il est possible d’acheter des choses avec de l’argent réel et que cela affecte le gameplay, y compris en mode multijoueur. Autrement dit, il est possible de payer pour avoir plus de chances de gagner. Et la réponse de Chris Bruzzo à cette question est aussi cinglante que très claire : « Tout simplement comme dans le football du monde réel ».
Le journaliste rebondit alors en disant que ce n’est pas tout à fait vrai. Dans le monde réel du football, un club achète un joueur s’il dispose d’assez d’argent. Alors que dans FIFA, les joueurs dépensent de l’argent réel pour avoir une chance d’obtenir ce joueur. Bien qu’il y ait désormais un système de probabilité d’obtention, l’issue n’est toujours pas certaine. « Ce n’est pas le vrai football », ajoute le journaliste.
Sans nier ce point, Chris Bruzzo précise que 9 packs FUT sur 10 sont obtenus avec des points FIFA obtenus en jouant au jeu, sans les acheter. Le journaliste dit accepter que la majorité des joueurs ne dépensent pas d’argent dans FIFA, mais le fait est que cela reste possible. « Comment pouvez-vous nier cela ? », demande-t-il.
Eh bien, ce que vous venez de dire il y a une minute, c’est que dans le football réel, vous pouvez utiliser des ressources pour constituer la meilleure équipe possible. Et dans notre jeu vidéo, vous pouvez utiliser des points FUT ou des Points FIFA. Et 9 packs sur 10 sont ouverts avec des points FUT qui sont gagnés par les joueurs qui jouent au jeu.
Et l’autre chose vraiment importante est que 78 % de tous les joueurs de FIFA 21 ne dépensent jamais rien dans le jeu.
Alors que Electronic Arts dit que le fait de payer est finalement un choix de la part du joueur, le journaliste ne semble pas satisfait de la réponse et regrette profondément qu’il soit possible de payer pour obtenir de meilleurs joueurs et ainsi bénéficier d’un avantage sur ses adversaires en ligne.
Les loot boxes assimilées à un jeu d’argent et un danger pour les enfants
Vient ensuite la question de la législation et du danger que représente ce type de mécanique dans les jeux, que certains gouvernements assimilent à un jeu d’argent comme on peut le trouver dans un casino. Le journaliste évoque alors une étude universitaire récente qui a pu faire un lien étroit entre les loot boxes et les jeux d’argent.
Chris Bruzzo rétorque alors que d’autres personnes confirment que les loot boxes ne peuvent pas être assimilées à des jeux d’argent et qu’il n’y a pas de consensus à ce stade sur le sujet.
Nous l’avons évoqué sur Xboxygen, le Royaume-Uni envisage de classer les loot boxes comme des jeux d’argent et Electronic Arts est donc directement concerné. Chris Bruzzo confirme que des discussions sont en cours avec le gouvernement et d’autres partenaires de l’industrie et se dit prêt à « nous engager sur de vraies solutions, parce que nous sommes de vraies personnes. ».
Plutôt que de modifier le système à la source, Chris Bruzzo préfère encourager le contrôle parental ou soutenir des initiatives telles que Internet Matters ou « accroître massivement la sensibilisation sur le nombre de contrôles que les parents ont sur les dépenses ». Plusieurs études montrent que ce sont bien les enfants qui sont les plus exposés aux risques et aux dérives que peuvent causer les loot boxes. Et puisque FIFA est un jeu conseillé aux plus de 3 ans, cela pose question.
Chris Bruzzo dit travailler notamment avec Sony et Microsoft pour que des mineurs ne puissent pas dépenser d’argent dans FIFA, mais toujours est-il que c’est bien le cas. Lorsque le journaliste demande pourquoi EA a réalisé une publicité pour les points FIFA dans un magazine pour enfants, Chris Bruzzo évoque une erreur de la part de ses équipes dans le process de validation. « Nous avons dit que c’était une erreur. Nous faisons des erreurs ».
Pour avancer sur tous ces sujets, Chris Bruzzo dit entendre les plaintes, entendre les joueurs et les journalistes sur les loot boxes. « Je pense que nous devons travailler sur de vraies solutions pour ces joueurs qui se retrouvent dans une situation extrême où ils ont perdu le contrôle du temps qu’ils y passent. Je suis d’accord. Et encore une fois, nous agissons. Nous ne parlons pas seulement. Nous agissons. ».
Le journaliste conclut en rappelant les rapports financiers partagés publiquement par Electronic Arts qui montrent la machine à cash que représente le mode FUT de FIFA, et la perte qu’engendrerait une régulation. Questionné sur ce que ferait EA si le gouvernement britannique légiférait sur le sujet en classant les loot box comme des jeux d’argent, Chris Bruzzo se dit prêt pour venir à la table des discussions, sans apporter de détails.
Si nous proposons une grande valeur - et ça semble être le cas puisque 100 millions de personnes jouent au jeu - et que nous arrivons à autant de personnes qui jouent au jeu sous toutes les formes sous lesquelles vous pouvez y jouer, oui, c’est une assez grande échelle , et cela peut générer des revenus importants.
Et nous avons besoin de ces revenus pour continuer à payer nos développeurs afin qu’ils puissent continuer à créer plus de valeur et à rendre le jeu plus amusant au fil du temps. Je ne vois pas ça changer. Je pense que les joueurs réagissent clairement au plaisir qu’ils éprouvent avec le contenu continu qui sort dans le jeu. Je pense qu’on va continuer à faire ça.