Pendant l’E3, l’actu va très vite. Une news chasse l’autre, il y a beaucoup d’annonces, de trailers, de gameplay, et en fin de compte, quand on est sur place, on réalise qu’il y a pas mal de choses qui se passent sur le salon et dont on ne parle pas. Cela m’avait frappé l’année dernière, quand après une semaine en immersion je suis revenu en France et que j’ai regardé le traitement médiatique qui avait été fait du salon. Au moment où je rédige cet édito, je suis encore à Los Angeles (et il faut chaud, bordel !), donc j’ignore comment ce que nous avons vécu a été retranscrit, mais je voulais me pencher sur un certain nombre de choses qui, tout du moins j’en ai l’impression, ne sont que rarement traitées.
La première concerne les conférences. Depuis qu’elles ne sont plus professionnelles mais directement destinées au public, elles donnent l’impression d’être un résumé de ce qu’il y a sur le salon. Bien entendu c’est faux. Chez Microsoft, Gears of War n’était pas jouable sur le salon, mais seulement pendant un showcase. De même, Scalebound, pourtant exposé pendant la conférence, brillait par son absence. Chez Sony, si une place non négligeable était réservée à la réalité virtuelle, les autres titres n’étaient présentés qu’avec des trailers, les jeux n’étant jouables que par une sélection de médias. Il ne faut donc pas croire que ce qui est montré en conférence est réellement accessible, il y a un écart qui peut même être très important avec la réalité des stands.
Les stands, tiens, parlons-en ! Je ne vais pas tous les passer en revue, il faudrait cinq pages, mais pour ce qui est des constructeurs, celui de Microsoft était sans doute le meilleur du salon. Beaucoup de jeux jouables, et surtout une très grosse fréquentation. Les deux grands gagnants sont ReCore et Sea of Thieves, avec une file d’attente invraisemblable, mais tous les gros jeux ont connu un vrai succès. Le stand était clair, bien mieux agencé que l’année dernière, avec à nouveau une place importante laissée à des jeux indés de qualité qui ont bénéficié du succès général des gros titres. L’autre stand qui a connu le plus de succès, c’est Nintendo. Personne n’achète de Wii U, mais tout le monde voulait jouer à Zelda. J’ai entendu parler de 5h de queue… Du coup je ne l’ai pas essayé, et je n’ai pas pu entrer à l’intérieur du stand. Trop long ! Chez Sony, l’effet curiosité a bien marché pour la VR, avec un système de rendez-vous permettant de ne pas faire la queue pendant des heures. Une bonne idée, mais du coup l’impression sans doute fausse que cela n’a pas été aussi visité que cela. Sur le reste du stand, Gran Turismo avec de très beaux baquets trônait en bonne position en ne générant qu’une indifférence polie. Les gros jeux n’étant pas jouables, les files d’attente pour voir les trailers, longues le premier jour, sont devenues de plus en plus courtes les deux jours suivants, avec même un désintérêt affiché pour Days Gone. Ils ont peut-être fait une erreur de disposition dans leur organisation, car beaucoup de jeux indés ou plus modestes étaient là, dont beaucoup de choses très biens, mais les gens allant directement à la VR ou bien ne montrant pas un intérêt fou pour juste voir des trailers, les bornes se sont retrouvées peu fréquentées sur la moitié de la surface du stand. C’était cependant bien mieux que l’année dernière, où le stand Sony était l’endroit où aller pour respirer un peu sans être dans la foule. Et là, en me relisant, je réalise que je suis en train de dire que chez Sony, c’est moins bien que chez Microsoft, même si je parle des stands et non pas d’aspects qualitatifs. Je sens que je vais encore en prendre pour mon grade ! Mais bon, d’un autre côté je ne vais pas non plus inventer autre chose que ce que j’ai constaté de visu sur le salon, même pour me faire bien voir de tous ceux qui n’aiment pas qu’on dise quoi que ce soit qui n’est pas sympathique envers le constructeur dont ils sont actionnaires. Je ne vais pas me mettre à faire dans le virtuel...
La VR, justement, a sans surprise pris plus de place sur le salon. Il y a plusieurs fabricants de casques, donc autant de stands, et même sur des stands d’éditeurs tiers on retrouvait des démos diverses et variées. Les avis restent toujours aussi partagés. Si on peut voir des choses convaincantes, au moins visuellement, c’est encore uniquement sur des PC que bien peu de gens ont chez eux. N’étant pas passionné par ce sujet, et, je dois dire, pas vraiment convaincu, je ne peux pas vraiment en dire plus, si ce n’est que le porno s’est invité sur le salon. Par curiosité j’aurais bien jeté un œil, mais mon professionnalisme exacerbé m’en a empêché.
Revenons un instant sur les conférences. Vous vous souvenez du plantage d’Uncharted pendant la conférence Sony l’année dernière ? C’est exactement ce que personne ne veut voir en direct. C’est pour ça que des précautions sont prises, bien entendu. Pendant la conférence Microsoft, il n’a échappé à personne que John Carmack, avec son casque de VR sur le nez, ne bougeait pas du tout la tête en accordance avec ce qu’on voyait à l’écran. On additionne tout ça, et il en ressort un secret de polichinelle : les vidéos ne sont pas jouées en direct. Alors, arnaque ? Pas vraiment. En fait, les vidéos sont enregistrées avant les conférences, avec aux manettes les personnes qu’on va ensuite voir sur scène. C’est donc bel et bien du vrai gameplay qui est montré, même s’il n’est pas en direct. On peut tout de même avoir un doute sur cette méthode : en effet, quand on voit la séquence de gameplay de FF XV, où le joueur se plante en beauté, si cela n’est pas en direct, alors il est criminel de ne pas avoir recommencé l’enregistrement.
Pour terminer, j’aimerais revenir sur le lieu du salon en lui-même. Cette année, il ne faut pas le cacher, il restait beaucoup de place non utilisée. L’absence de gros éditeurs, préférant être en marge du Convention Center, est clairement préjudiciable à la portée de la manifestation. Si cela permet de facilement trouver des lieux sans rien où on peut se reposer, l’image que cela donne n’est pas extraordinaire, comme une désertion du lieu. Est-ce parce que cela est devenu trop cher pour les participants ? Est-ce parce que l’orientation plus grand public rend le business secondaire ? Je n’ai pas la réponse, mais je trouve cela assez préoccupant.
Ce positionnement du salon est ce sur quoi je vais conclure, car cette édition m’a donné l’impression d’avoir le cul entre deux chaises, et être installé sur une seule fesse de chaque côté, c’est être mal assis. D’un côté, il y a toujours cette volonté de faire de l’E3 un lieu de marché, avec beaucoup de rencontres entre concurrents, collègues, éditeurs, distributeurs et médias, et ce à une échelle mondiale. Mais alors, pourquoi en avoir fait un salon si ouvert ? Il y a beaucoup de monde dans le salon qui n’appartient à aucune de ces catégories, et cela rend les choses compliquées pour accéder aux jeux, ce qui reste tout de même l’élément fondamental dans la présentation d’un produit. A l’inverse, si l’E3 veut être un salon ouvert au public, alors pourquoi de grands éditeurs ou constructeurs ne montrent pas des jeux jouables, dans une logique de « show ». On nous a d’ailleurs souvent parlé de « show », alors que celui-ci n’est pas vraiment assuré. Je ne sais pas quelle est la meilleure direction à prendre, mais le fait de rester entre les deux me semble être la pire des solutions. D’ailleurs, et ce sera le dernier « E3 fact » de cet édito, les babes ont totalement disparu du salon, sauf, étrangement, chez Nintendo dont les critères de sélection des hôtesses est clairement évident.
Sans doute pour mieux patienter en attendant de pouvoir jouer à Zelda !