Désolation. Ce mot revient sans cesse dans ma tête, comme martelé au burin. Je suis incapable d’esquisser le moindre geste, paralysé par l’étendue du désastre. Même la tempête de grêle de 2008 n’avait pas ravagé nos champs comme cela. Les inondations de 2011, la sécheresse de 2012, la marée noire de 2013, la grande migration d’hippopotames de 2014, les faucheurs OGM de 2015 et l’attaque de Godzilla de 2017 n’avaient pas réduit nos parcelles, notre travail, notre vie à un tel état de désolation. Ce Pure Farming 2018 est la plus grave catastrophe vidéoludique agricole qui nous est arrivée. Il ne nous reste plus qu’à attendre le classement de notre console en catastrophe naturelle, espérer le versement des aides européennes et de l’état et repartir sur un Farming Simulator pour l’année prochaine…
Les raisins de la colère !
Oui, les raisins sont en colère, tout comme ses copains le blé, le riz, les vaches et les cochons. En colère et particulièrement moches. Tout partait bien pourtant avec de bien jolis écrans de chargements montrant les paysages bucoliques et colorés de la Sicile, de la campagne japonaise et de l’ouest américain. On se rêvait fermier-voyageur, s’adaptant aux cultures de chaque pays, apprivoisant petit à petit leur climat, leurs modes d’élevage. On voyait dans cette perspective la possibilité de mettre un peu de diversité et de rompre la monotonie immense qui imposait pourtant le cœur de notre labeur. À l’écran de sélection de notre avatar on déchante déjà un petit peu, pour Pure Farming 2018, le fermier ne peut être une femme, il ne peut pas non plus être de couleur. Le fermier EST un homme blanc caucasien. Avec une veste à carreau. Étrangement, le b.a.-ba de la création d’avatar n’est jamais arrivé jusqu’en 2018 dans Pure Farming. On va dire que l’intérêt n’est pas là, malheureusement après des heures passés dans les champs on le cherche encore....
Horrible et affreux. Les jeux de simulation agricole sont par essence des jeux lents, austères, nécessitant de la part du joueur un amour irraisonné pour les machines agricoles mais aussi pour les longs aller-retours de labours et autres travaux dans les champs. Le seul élément capable de faire passer la pillule de la redondance et de cette ôde à la lenteur, reste le paysage. Pure Farming 2018 est d’une laideur sans nom, aliasé comme ce n’est pas permis, paré de couleurs fades, de fonds dégueulasses. Il m’a même rendu malade à cause du manque de fluidité de l’ensemble… Tout est moche, rien n’est à sauver. Les campagnes que proposent Pure Farming sont un ramassis de clichés fades, positionnés n’importe comment dans des cartes vides, sans âme, mis à part quelques véhicules tout moches et des zombies faisant des aller-retours mécaniques sur quelques trottoirs. Sincèrement, mieux valait concentrer tous ses efforts sur une seule carte bien faite, plutôt que d’en proposer cinq moches comme celles de Pure Farming 2018. Le cador Farming Simulator qui est loin d’être un parangon de beauté le surpasse même dans sa version 2015.
Qu’a donc Pure Farming 2018 pour sauver les meubles ? Si on arrive à oublier sa réalisation infamante, le jeu s’avère complet dans son côté simulation, proposant la culture de vignes, de riz, de céréales, l’élevage de bovins, de lapins, de porcs. Les modèles de machines agricoles sous licence sont assez bien reproduits malgré l’aliasing et leur conduite… souple qui fait ressembler les tracteurs à une gelée au moindre virage. Certains bugs encastrent les véhicules dans un objet du décor, les rendant inutilisables. Ce qui est lourd vu la somme que l’on peut dépenser dans un tracteur dernier cris. Pure Farming offre aussi une certaine facilité de gestion par l’intermédiaire d’un drone qui, en survolant nos champs tout moches, nous permet de faire des opérations de base, comme l’achat ou la vente, la construction d’éoliennes ou indiquer un repère sur la carte. On pourrait même lui donner le crédit qu’il avait vraiment tout pour un bon jeu de simulation agricole mais l’obstacle technique et esthétique est tellement haut qu’il semble impossible pour la plupart des joueurs d’aller au-delà.