Deep Fear est sorti en 1998 sur Saturn, et c’est le dernier jeu qui a vu le jour en Europe sur cette machine. Autant dire, vu que la console étant alors moribonde, que ça n’a pas été un franc succès et que le titre a été très peu joué.
Et pourtant, ce survival horror, d’un abord classique, ne se contente pas d’être un décalque de Resident Evil, et mérite qu’on se penche dessus. L’histoire raconte les aventures d’une équipe de secours cherchant à retrouver un sous-marin qui est allé se ravitailler à une station sous-marine après avoir récupéré un OVNI tombé dans l’océan. Depuis, on a perdu le contact. Une fois sur place, il est vite évident que quelque chose s’est passé. La base est en piteux état, et, surtout, son équipage s’est transformé pour devenir une brochette de monstres avides de chair fraiche…
Passons sur ce qui est ordinaire dans ce jeu. Quand on le regarde tourner, on a l’impression de voir un Resident Evil like. Même type d’angles de caméras, même maniabilité raidasse et un héros qui aurait pu faire partie du casting de la série qui se passe à Racoon. De même, autre point commun, le jeu propose des dialogues absurdes souvent à côté de la plaque. Resident Evil, de ce point de vue-là, est même battu à plat de couture !
Mais ne nous arrêtons pas à ça ! Deep Fear réussi à se démarquer sur plusieurs points qui en font un jeu unique. Le premier est son environnement, qui fait forcément penser à Abyss. On ne peut pas dire que le nombre de jeux se déroulant dans une base sous-marine soit impressionnant ! L’air de rien (ce début de phrase est une blague, mais vous ne le savez pas encore…) cela renforce fortement une atmosphère anxiogène s’appuyant sur la claustrophobie. Ce n’est pas un chien hargneux qui nous empêche de sortir, mais un océan ! La musique, très réussie, de Kenji Kawai, fait tout pour renforcer ce sentiment, en alternant avec de longs moments de silence total qui nous font réaliser à quel point on est seul, perdu au fond de l’eau, sans autre moyen de s’en sortir que d’avancer.
L’autre point fort du jeu est son gameplay, misant sur des choix inhabituels pour le genre. Ainsi, il n’est pas question ici d’économiser ses munitions : celles-ci sont virtuellement infinies. Cela s’explique par une visée peu précise : on a tendance a souvent rater les monstres, et on prend donc vite l’habitude d’arroser sans compter ! Les affrontements sont donc plutôt bourrins, et ce n’est pas de ça que vient la tension du jeu. Pour faire monter le niveau de stress du joueur, Deep Fear utilise à nouveau la logique de son environnement. En effet, le cœur du jeu se concentre sur le niveau d’oxygène qui entoure le joueur. Ainsi, il faudra toujours veiller, grâce à des pompes, à ce que l’atmosphère soit respirable. En voilà un ennemi, invisible, permanent, qui se pose là : on ne peut rien faire contre lui si ce n’est veiller à ce qu’on puisse toujours respirer. Cet élément est omniprésent et ajoute une couche à la tension qu’on ressent en jouant. En passant, malgré l’âge du jeu, on peut tirer et se déplacer en même temps, ainsi que se mouvoir dans l’eau (lentement, mais c’est possible) : le héros de Deep Fear botte donc le cul de son contemporain de Resident Evil !
Quel dommage que ce Deep Fear soit sorti à un aussi mauvais moment ! Il n’a même pas vu le jour aux States ! Ce titre réussi à dégager quelque chose de particulier, et dans un autre contexte (sur une autre machine ?) il aurait pu donner naissance à une franchise qui aurait permis une alternative aux Resident Evil. Qui sait, la série de Capcom ne serait peut-être pas devenue ce qu’elle est aujourd’hui si elle avait eu un concurrent l’obligeant à se remettre en question…