D’un joueur à l’autre, on n’accorde pas la même importance aux mêmes choses. Les joueurs qui fréquentent les forums et sites de jeux vidéo, en étant d’une mauvaise foi totale, disent en général en s’appuyant sur un niveau d’auto-persuasion remarquable qu’ils veulent tout. Bien entendu c’est faux. On aimerait bien tous tout avoir, mais fondamentalement on est plus sensible à un aspect qu’à un autre. Il y a celui qui veut de beaux graphismes, celui qui veut du 1080p, celui qui veut une animation sans faille, celui qui veut du réaliste, celui qui veut du style, celui qui veut un environnement sonore au top, celui qui s’intéresse avant tout à l’histoire, celui qui veut un concept, etc… Chacun peut piocher plusieurs points, mais de façon très naturelle, à partir du moment où un jeu nous donne satisfaction sur ce qui est important pour nous, on ne rechignera pas vraiment sur le reste.
Pour les consoles, c’est un peu pareil. On en attend diverses choses, sans être bien clair sur ce qu’on veut. On veut juste pouvoir jouer, mais en même temps ce serait totalement scandaleux qu’on ne puisse pas regarder des films ou connecter la machine. On veut quelque chose de simple mais il faudrait également que cela soit différent et comporte de multiples possibilités. On veut que les jeux évoluent, mais on refuse de considérer l’utilisation du mouvement et de la voix comme un élément sérieux, le rabaissant au niveau d’un gadget. On veut une machine pas chère, mais on veut qu’elle soit plus puissante que des PC qui reviennent à nettement plus. On veut la console qui a les meilleurs jeux, mais on veut aussi la console à la mode du moment…Bref, là aussi on peut continuer longtemps. Personne n’a raison, personne n’a tort, c’est juste chacun son truc.
Je vais vous parler aujourd’hui de ce que j’attends d’une console et que je n’ai plus avec ces nouvelles machines. Ou plutôt de ce que j’ai bien malgré moi gagné : ces putains de mise à jour.
Quand on remonte quelques années en arrière, cette notion même de mise à jour n’existait pas. Ne remontons pas trop loin, les supports de stockage sur K7 demandaient beaucoup de patience, mais juste après, avec les disquettes. Non seulement il n’était pas question de mise à jour, mais il n’était pas question non plus d’installation. En tant qu’enfant de l’arcade, cela répondait à ce que je cherchais : l’immédiateté du jeu. On a envie de jouer à un jeu ? En quelques secondes on le fait. Epoque bénie où attendre devant un écran n’arrivait jamais.
Jusqu’à l’arrivée du CD, l’influence de l’arcade est restée très forte. Les jeux se basaient donc sur une idée centrale de gameplay, dans un genre, et l’exploitaient au mieux. Les jeux de rôle sont les exceptions, mais pour le reste, on gardait cet état d’esprit de loisir immédiatement accessible. Quand le jeu débarque, il est fini. Pas forcément parfait, mais il est ce qu’il est, un produit terminé et vendu aux clients.
Les PC ont pris de la place, et pendant une période j’ai eu envie de me tourner vers cette machine pour assouvir ma passion du jeu. Le fait de devoir installer les jeux, de me coltiner des enregistrements de codes, de mettre à jour mon matériel, bref, de me poser des questions n’ayant rien à voir avec le jeu et m’obligeant à patienter, à rediriger ma passion vers les consoles, tellement plus appropriées et conviviales. Sauf que le CD puis le DVD ont introduit une nouvelle donne : l’attente. On découvrait les temps de chargement. Si j’avais dû écrire un édito à l’époque, il est clair que cela aurait été une diatribe contre un progrès pas au point puisque proposant du nouveau d’un côté, mais en créant une nouvelle contrainte de l’autre. Le pire était à venir…
La génération Xbox 360 – PS3 a posé les bases de contraintes qui sont devenues maintenant la norme. En particulier Sony et sa PS3, machine passant son temps à se mettre à jour avec un système d’une lenteur à épuiser un paresseux. Si on ajoute des temps de chargement sensiblement plus longs, voilà une des raisons, et pas la plus petite, pour laquelle je me suis tourné vers la 360, bien mieux faite de ce point de vue là.
Les machines étant connectées, elles ont enfin pu « bénéficier » des « progrès » du monde du PC. Quand les premières mises à jour ont débarqué, on s’est dit « chouette ! Le jeu va s’améliorer ». Quelle erreur ! La bonne chose à se dire aurait plutôt été de critiquer un jeu qui est sorti sans être optimisé. Cela n’a pas semblé poser plus de problèmes que ça aux joueurs, alors pourquoi se gêner avec la génération suivante ?
Avec la Xbox One et la PS4, autant dire que c’est un véritable festival.
Quand on glisse un jeu dans le lecteur, non seulement on se coltine une installation, mais en plus dans la majorité des cas on a le droit à une mise à jour, quand bien même on achète le jeu le jour de sa sortie.
UNE MISE A JOUR POUR UN JEU QUI VIENT DE SORTIR.
Ça ne choque personne ? On ne se moquerait pas un peu du monde ? Ce n’est rien d’autre que la pire habitude du monde du PC qui prend place sur nos consoles.
Où est le respect du client, qui paie le jeu auquel il va jouer ? On ne paie plus le jeu, mais ce qu’il pourrait être, éventuellement, une fois terminé à coups de mises à jour d’une taille gargantuesque qui frisent le ridicule. Pourquoi livrer un produit fini, puisqu’on peut revenir dessus ensuite, sans donner aucune garantie aux joueurs. Après tout, si le jeu ne se vend pas, on ne va pas se fatiguer à l’optimiser. Sur PC, on paie ses jeux moins chers, mais on a un corollaire de contraintes qui vont avec : il faut que le jeu fonctionne avec son matériel, la qualité sur l’écran dépend de notre machine, et la variété du matériel fait que les jeux ne sont pas optimisés, et qu’ils ont besoin de ces satanées mises à jour. Sur console, on a une machine et un système connus dès le départ, le même pour tout le monde. Comment justifier qu’un jeu nécessite des mises à jour après sa sortie ?
Sans compter la place que cela prend sur le disque dur de la machine. Peut-être que sur PC on est habitué à jongler avec la mémoire, et que la bidouille fait partie intégrante du concept général, mais sur console, l’immédiateté du jeu est encore une fois réduite par ce genre de manipulations qui rendent le concept de plug’n play obsolète.
Ces mises à jour, ainsi que dans une moindre mesure l’obligation d’installer les jeux, sont le symbole du fait que les consoles de jeux n’en sont plus. On retrouve également ça dans les jeux proposés. La course à la technologie fait qu’on nous sert sans arrêt du monde ouvert, des jeux dans lesquels on peut tout faire… Et qui se ressemblent terriblement. Il n’y a plus que sur feu le Xbox Live Arcade qu’on peut trouver des jeux avec des concepts simples, accessibles et conviviaux, pas prétentieux, mais misant sur le fun. Des jeux où on peut s’installer à plusieurs sur le canapé et avec lesquels on peut s’amuser. Kinect aurait pu remplir ce rôle, mais est absurdement négligé. Seul Nintendo a gardé cet état d’esprit. Dommage, je suis allergique à Mario et ses copains à force de voir leur tronches depuis tant d’années.
Je suis perplexe de constater que Sony et Microsoft s’entendent si bien pour sortir des produits calibrés de la même façon, prenant la même direction. Ils mangent ensemble et se mettent d’accord ou quoi ? J’avais fait un édito il y a longtemps parlant de la convergence des supports, et j’ai l’impression de vivre cette convergence, en voyant abandonnée sur le bas-côté une partie essentielle de ce qu’est pour moi le jeu vidéo. Le public d’aujourd’hui ignore ce qu’est une salle d’arcade, et est élevé dans un moule qui ne me plaît pas du tout.
Cette logique de mise à jour devenue maintenant courante et normale en est la pire illustration, comme un majeur levé vers les joueurs qui oseraient demander autre chose que ce qu’on leur sert.
Je suis un vieux con ? Peut-être bien, mais je constate que quand on ressort une Super NES ou une Megadrive, après les moqueries sur les graphismes dépassés et l’absence de 3D, on prend les manettes, et au lieu de poireauter, au lieu de configurer, au lieu de passer par un tutoriel de 30 minutes, on joue, tout simplement.