Que ce soit conscient ou pas, les parents sont tous les mêmes, et cherchent à transmettre à leurs enfants ce qui leur est cher.
En tant que Papa de deux enfants, je ne suis pas différent.
Qu'on le veuille ou non, on les fait baigner dans nos passions, et ils en retiennent forcément quelque chose. Si on aime les comics, ils seront incollables sur les origines des super héros, et nous attendrons avec impatience qu'ils aient l'âge de découvrir, émerveillés, notre vieille collection. Quand on aime un sport, sans s'en rendre compte (ou plutôt en faisant semblant de ne pas s'en rendre compte), on fera tout pour qu'ils l'aiment aussi, rêvant secrètement qu'on ira les applaudir sur le bord d'un terrain. Cette même logique s'applique à la littérature, au cinéma, à la cuisine, et va jusqu'à la façon de s'exprimer qui est souvent propre à chaque famille, chacun ayant ses expressions favorites (parfois de jolis néologismes) qui seront reprises par leur progéniture.
Les parents d'aujourd'hui (bon, soyons honnêtes, on parle surtout des pères !) sont les premiers pour qui le jeu vidéo a une vraie place dans l'héritage culturel que l'on va leur laisser.
J'en ai pris conscience alors que nous étions coincés à l'intérieur, sous la pluie, avec seulement une bonne vieille Xbox à disposition. Alors qu'on regardait une ânerie à la télévision avec mon fils, je l'ai regardé, j'ai regardé la console, et je me suis dit "ça y est, il doit avoir l'âge de jouer à Halo". Pas à un jeu HD hyper spectaculaire, non, non, le bon vieux Halo.
On a allumé la console, et je l'ai aidé à prendre en main son premier FPS. Ça m'a permis de constater que Halo est tout de même un sacré jeu ! Après une remarque perfide du fiston ("il est un peu moche le bonhomme"), il s'est plongé dans le jeu.
A ma grande stupéfaction, je me suis rendu compte que j'étais fier que mon fils réussisse à flinguer des Covenants !
Exactement le même genre de fierté qu'on ressent quand pour la première fois le gamin réussit à faire ses lacets tout seul.
Depuis, je m'applique à lui faire découvrir des jeux anciens, allant jusqu'à la période Megardive/Super NES, et c'est un vrai plaisir de constater que c'est avec un véritable intérêt et beaucoup de curiosité qu'il essaie tout ce que je lui montre.
Je dois me faire violence pour qu'il n'abuse pas de jeux vidéo, car c'est une véritable satisfaction, comme si je transmettais quelque chose de moi en mon fils. Et d'ailleurs c'est exactement ça !
Cette anecdote m'a fait réaliser à quel point les jeux vidéo font partie de la vie de trentenaires comme moi (plus proches de la quarantaine que de la trentaine, soit dit en passant !).
Cette culture, nous l'avons forgée nous-mêmes, en pionniers d'un loisir nouveau. Aujourd'hui, les jeux vidéo sont un produit de masse et font partie du paysage, mais pour nous, cela va au-delà. Nous avons connu ses prémices, et nous les identifions totalement à quelque chose de culturel, au même titre que le cinéma. Cette différence et cette connaissance, c'est ça que nous avons envie de transmettre, comme si cela allait être un plus pour notre bambin. Soyons honnête, ce n'est pas le cas, mais tout du moins on partagera toujours avec lui cette complicité de ceux qui en savent un peu plus que les autres sur un sujet. Aucun copain de mon fils n'a joué à Halo, tout au plus certains connaissent Halo Reach. Lui sait d'où ça vient et comment cette saga a débuté.
J'attends avec impatience le moment où il pourra s'essayer à Shenmue, et il a déjà découvert pas mal de perles du passé.
L'air de rien c'est une chance pour nous, jeunes parents accros aux jeux vidéo. Étant les premiers joueurs, nous resterons à jamais une génération unique, et c'est cette singularité que nous transmettons à nos gosses. Après ils en feront ce qu'ils voudront, ils joueront ou pas, s'intéresseront à ce qu'on leur raconte ou pas, mais cette envie de transmettre notre passion, et la satisfaction qu'on en ressort, on ne pourra jamais nous l'enlever.
Il ne faut pas le dire trop fort, rester discret sous peine de subir le joug d'une conjointe se demandant plus ou moins ouvertement si on va grandir un jour.
C'est encore mieux ! Cette transmission est une sorte de secret entre un père et son fils (ou sa fille, la nouvelle génération étant peut-être un peu moins stéréotypée que la précédente). Un truc terriblement machiste en contradiction totale avec le politiquement correct dont on nous abreuve. Chacun sa spécialité : Maman va apprendre aux enfants à faire sa fameuse recette qui se transmet de génération en génération, et bien encore plus fort, Papa va leur apprendre à jouer à Halo !
C'est futile ? Puérile ? Vous pensez que je raconte n'importe quoi et que je donne aux jeux vidéo une importance démesurée ?
Demandez aux Papa gamers ce qu'ils en pensent, vous verrez que j'ai raison !