Cette année, nous avons eu le droit à un E3 riche en nouveautés, et ce chez tous les intervenants.
En plus de nombreux jeux présentés, dont beaucoup d’un haut niveau, chaque constructeur s’est appliqué à nous présenter des nouveautés liées au hardware qui peuvent faire grandement évoluer notre façon d’interagir avec nos consoles.
Nintendo continue dans sa lancée, et avait une longueur d’avance, mais ce sont les deux autres larrons qui ont fait le plus fort.
Sony nous montre comment on peut réellement utiliser une wiimote dans les jeux, et propose une PSP novatrice et qui propose des fonctionnalités inédites.
Microsoft va encore plus loin en transformant le Live en un espace communautaire poussé, offrant tellement d’options et de possibilités qu’on pourrait y passer des journées sans jouer, l’utilisant comme outil central pour faire n’importe quoi. Et il y a le fameux Natal qui a fait forte impression et qui propose rien de moins que de changer nos habitudes.
Et pourtant ça grogne sur les forums spécialisés.
Je passe très vite sur les réactions des fanboys de toute espèce. Ces réactions là sont écrites à l’avance, sans surprises. Ce que font les autres marques est ridicule, nul, sans intérêt, et ce que fait la marque chérie est forcément bien, enterre la concurrence, génial. Si vous avez le temps et l'envie de vous amuser, vous pouvez cependant vous délecter de la lecture des forums remplis de fanboys, car c’est tout de même très drôle. En effet, on voit cette année pas mal de retournements de vestes chez Microsoft et surtout chez Sony. Ce qui était nul avant devient bien quand ça arrive sur la bonne machine… Je vous renvoie vers un édito que j’avais rédigé il y a déjà bien longtemps, et qui est plus que jamais d’actualité :
Non, ce qui est intéressant, c’est plutôt d’analyser la réaction des gamers, des vrais, de ceux qui se foutent du système et qui ne s’intéressent qu’à ce qu’on peut faire avec.
La première chose que je constate, c’est que comme d’habitude, la France est première en matière de grogne et de rejet de tout ce qui peut être nouveau. Les forums anglo-saxons sont bien plus enthousiastes, et au minimum bien plus mesurés, cherchant à prendre ce qui est bien plutôt que de chercher à démonter ce qui les intéresse moins.
La deuxième chose que je constate, et c’est là où je veux en venir, c’est que les gamers français sont incroyablement conservateurs d’une part, et ont un comportement très paradoxal d’autre part.
Je m’explique : une grande partie des opinions exprimées est systématiquement négative. Face à un Natal, on se demande à quoi ça va servir, comment on va faire pour jouer sans avoir une manette en main, ça va être fatigant, ce ne sera jamais assez précis…
Pourquoi ne pas se dire que ça peut apporter une nouvelle façon de jouer, un changement des habitudes ? Pourquoi ne pas attendre de voir ce qu’en font les développeurs ?
De la même façon, j’ai lu beaucoup de critiques concernant des conférences présentant des suites sans surprises. Il est bien évident que ce n’est pas faux, et moi-même je préfère largement voir de nouvelles choses. Pourtant c’est omettre que ce sont ces mêmes gamers qui acclament la sortie de la vingtième aventure de Solid Snake, la vidéo d’un God of War très réussie, mais qui ressemble au précédent avec un lifting HD, un nouvel Halo, qui tombe sur Xbox 360 avec une régularité déconcertante, etc…
C’est omettre aussi que de vraies nouveautés ont été présentées. Ce n’est pas la majorité, mais il y en quand même. Splinter Cell change d’ambiance et de gameplay : une vraie nouveauté. Alan Wake qui se montre enfin : une vraie nouveauté. Le concept même du Natal : une vraie nouveauté. Un nouveau jeu Rockstar pour Sony. Et des éditeurs tiers qui eux aussi proposent de nouvelles choses dans tous les genres.
C’est dommage d’occulter ces jeux. Ils existent, ils sont là, à côté des suites à rallonge.
A chaque manifestation, j’aime bien me promener sur les forums, histoire de prendre la température. Cette fois je ne l’ai pas fait seulement sur des forums de jeux vidéo, puisque j’ai étendu ma balade du net sur des forums nettement moins spécialisés, et donc plein de ce qu’on appelle avec mépris des « casuals ».
L’impression que j’en ressors, c’est que le gamer passe pour un vieux con.
Ces fameux casuals ont un esprit dix fois plus ouvert et sont prêts à s’enthousiasmer pour tout ce qui est nouveau. Pas seulement pour ce qui est plus accessible, non, tout ce qui est nouveau.
A côté, les gamers semblent encrés dans le passé, comme des traditionalistes qui prétendent être ouverts à la nouveauté, mais qui y réagissent avec un comportement méfiant, voire méprisant.
On dirait qu’ils ne peuvent pas se détacher de l’époque où ils ont découvert les jeux vidéo.
Un « vrai » jeu, ça se joue avec une manette, c’est fait par un japonais, il faut qu’on retrouve tel ou tel élément.
Que ça semble difficile de luter contre ce carcan ! Que ça semble difficile de dépasser une sorte de barrière mentale qui bride l’imagination !
Mais surtout, et c’est sans doute là le point essentiel, que ça semble difficile de ne pas raisonner et de seulement penser en termes de jeux, de fun, de plaisir éprouvé face à la console, de sim-pli-ci-té.
C’est sans doute le point le plus paradoxal chez le gamer. On parle de jeux vidéo, et donc de jeux. Cela implique le fait de…s’amuser, ou pas. C’est cette évidence qui semble absente du discours du gamer, et c’est là où ce fameux « casual » fait preuve d’un bon sens qui a quitté ces bons vieux spécialistes. Lui s’en fout d’avoir une manette ou pas. Il préfère quelque chose de très joli à l’écran, mais si ce n’est pas le cas ce n’est pas la fin du monde pour autant. Non, lui, il regarde, il voit de quoi il a envie, et sans intellectualiser, il essaie.
Sa démarche est plus naïve, plus directe, mais surtout plus honnête. S’il s’amuse sans se prendre la tête, c’est que c’est bien. Sinon ce n’est pas bien.
Aussi simple que ça.
En me relisant, je me rends compte que j’ai l’air de donner des leçons. C’est vrai, c’est exactement ce que je suis en train de faire.
Mais en premier lieu, c’est à moi-même que je donne une leçon. Je joue aux jeux vidéo depuis très longtemps, je suis ce qu’on appelle un gamer… Et je souffre donc des mêmes défauts que mes petits camarades. J’ai critiqué ouvertement la dérive vers les jeux casual, ne m’y intéressant pas. J’ai critiqué ouvertement tout ce qui m’a semblé n’être que du gadget. Je suis aussi un vieux con.
Heureusement, j’ai deux enfants qui une fois par semaine ont le droit de jouer à la 360 (à des jeux sélectionnés pour leur âge, naturellement, je suis un papa responsable qu’est-ce que vous croyez !). Leur naïveté, et leur bilan sans appel face à ce que je leur montre m’ont fait prendre conscience qu’ils s’amusaient sans doute plus que moi du fait qu’ils se contentent du plaisir procuré par le jeu avant tout.
C’est pour ça que cette année j’ai décidé avant le salon de l’E3 de garder l’esprit ouvert. De prendre ce qui me plaisait, et de considérer que ce qui ne m’attire pas mérite peut-être quand même d’être essayé, et peut intéresser beaucoup d’autres.
Sage décision : j’ai adoré cet E3. Je suis loin d’être intéressé par tout, je me pose pas mal de questions (en particulier concernant le Natal et l’absence de manette… et oui, comme mes copains gamers !), mais j’ai avant tout constaté que tous les constructeurs cherchaient à faire avancer les choses, et que c’est bien la diversité qui nous attend.
Vous trouvez que je me la raconte ? Vous n’avez pas tort, alors je vais vous confier où se trouve la limite de cet état d’esprit.
Rien à faire, ce qu’a montré Nintendo m’a semblé ridicule, inutile, et interdit aux plus de 10 ans.
Et oui, on peut toujours chercher à s’améliorer, à positiver, il y a des paliers qu’on ne pourra jamais franchir, même si je me dis que d’un certain côté je me plante et que je passe sans doute à côté de quelque chose. Ce sont les limites de l’être humain. Comme le dit Brassens : « Quand on est con…On est con ». Je vais juste faire l’effort de ne pas trop l’être.