Il y a deux ans, le studio allemand Deck13 nous livrait son SoulsBorne futuriste du nom de The Surge. Sans être exempt de défauts, ses bonnes idées ont suffi à récolter un joli succès critique et commercial, à tel point que le deuxième volet arrive à présent dans nos contrées. Vendue comme plus ouverte, plus équilibrée et plus nerveuse, cette suite est-elle la nouvelle héritière de la saga de From Software ? Laissez-moi aiguiser mon opinel et je vous réponds de suite.
- Mais où est donc l’avenue Charles de Gaulle ?
GÉNÉRICHO
The Surge premier du nom avait de la suite dans les idées, mais de nombreuses choses venaient casser l’ambiance : des environnements redondants, peu de boss et d’armes disponibles et une finition qui laissait à désirer. L’univers de ce deuxième opus nous place dans la ville de Jericho, une sorte de no man’s land post-apocalyptique divisé en plusieurs quartiers, contrôlés par des gangs pas très respectueux des grands-parents. Soulignons tout d’abord le fait que les développeurs ont écouté les retours des joueurs, en proposant un monde aux environnements plus variés, majoritairement à ciel ouvert. Outre la ville ravagée, vous serez amené à explorer une réserve forestière, une cathédrale de fortune, un gigantesque port maritime... Cela donne une impression de liberté bien sentie, tout en conservant la construction verticale des niveaux remplis d’ascenseurs gravitationnels et de tyroliennes qui font leur petit effet.
Pourtant, bien que cette sensation de liberté fasse le plus grand bien à l’exploration, c’est au détriment de l’ambiance générale du titre. Si on pouvait reprocher au premier opus son manque de variété des décors, il se dégageait néanmoins une atmosphère étouffante et oppressante de l’usine CREO et de ses couloirs tentaculaires. Ici, les environnements traversés ont beau être plus exotiques, il n’en restent pas moins très génériques. On a comme l’impression d’avoir déjà vu ces paysages désolés dans n’importe quel Fallout, ou plus récemment dans la série des Metro, pour ne citer qu’eux. Ce ne sont pas les PNJ insipides nous confiant des missions bien peu excitantes qui vont relever le niveau, ni nous donner envie de nous intéresser à l’histoire tout aussi banale. Au delà de la direction artistique peu inspirée, la technique de The Surge 2 est tout juste dans la moyenne. Les beaux effets de lumière et de particules côtoient trop souvent des textures mal chargées et des modélisations de personnage de quelques années de retard. Heureusement, le jeu a un argument de taille pour tailler dans le gras.
LES BRAS M’EN TOMBENT
Ce qui a fait le charme de The Surge, tout en lui permettant de se démarquer de son modèle, c’est la possibilité de cibler chaque partie du corps de son adversaire afin de lui trancher le membre de votre choix. Ainsi, vous pouviez récupérer l’arme ou l’équipement correspondant à la partie sectionnée pour vous constituer l’arsenal optimal. Que les étudiants en boucherie se rassurent, le démembrement est toujours au rendez-vous, pour un résultat tout aussi grisant et brutal. Les affrontements ont eux aussi gagné en technique et en nervosité, avec l’apparition d’un système de contre. En maintenant la touche de protection, il faut également orienter le stick droit dans la bonne direction et au bon moment, afin d’effectuer une parade vous permettant de placer une attaque dévastatrice. Malheureusement, malgré ce gameplay plus étoffé, le système de lock souffre de ratés bien trop nombreux, couplés à une caméra épileptique digne de la grande époque des premiers jeux 3D (coucou Croc et Tomb Raider). En plus de cela, les ennemis, particulièrement les boss, attaquent parfois de manière tellement fulgurante qu’il est quasiment impossible d’effectuer une parade sans un énorme coup de bol. À noter que notre personnage reçoit dès le début du jeu un implant permettant d’indiquer la direction de l’attaque ennemie, mais pas le timing. Imaginez donc un combo “lock aux fraises et caméra aux champignons” au moment de l’attaque ennemie, cela vous donnera une idée du nombre de tentatives avortées sur un boss et du nombre de traces de dents sur ma manette. Les affrontements se résument donc souvent à spammer le bouton d’esquive en espérant éviter la mandale fatidique. Devoir parer l’attaque au bon moment aurait été amplement suffisant, sans avoir à rajouter la direction en plus !
Pour vous aider à ne pas trop péter une durite, vous avez à votre disposition un drone de combat se gérant indépendamment de vos attaques de corps-à-corps. Bien utile pour détourner l’attention de certains mobs trop nombreux et se débarrasser des tourelles de sécurité, il possède également une attaque électromagnétique très efficace (pour ne pas dire craquée) contre la plupart des ennemis robotiques. Niveau sensations, on oscille donc souvent entre l’excitation de charcuter ses adversaires tel un chirurgien du futur et la frustration de crever à répétition à cause d’une esquive mal placée.
IMPLANTS BIEN HUILÉS
Même si les classes de personnage ont été abandonnées, les armes et armures sont plus nombreuses et variées, permettant aux amateurs de roleplay de privilégier un style d’attaque (rapide, à deux mains, lourd…) et de répartir les points de compétence comme bon leur semble, entre la vitalité, l’endurance et l’efficacité des batteries. Les menus manquent encore d’ergonomie, avec une énorme quantité d’informations affichées à l’écran et un système de comparaison d’équipement pas toujours très lisible. Par contre, la bonne idée du jour est de pouvoir switcher entre plusieurs combinaisons d’équipement à tout moment via le menu options, sans devoir passer un temps considérable à changer manuellement chaque élément. Gros gain de temps et d’efficacité qui permet d’alterner entre plusieurs styles selon la situation rencontrée.
L’amélioration de notre arsenal est un point crucial qui fait tout le sel de l’expérience de jeu. Que ce soient les armes, les pièces d’armure ou les implants vous conférant des bonus, ils seront souvent déterminants dans l’issue des combats. Cela force le joueur à tenter de nombreuses configurations afin de trouver la meilleure façon d’aborder certaines situations, en plus d’être constamment à la recherche de nouvelles pièces d’équipement. Qui dit pièce d’équipement rare dit souvent gros ennemi balèze et donc gros risque de crever, ce qui fait de The Surge 2 un jeu plus tactique qu’il n’y paraît, au-delà de son aspect bourrin. En parlant d’ennemis balèzes, les boss sont également plus nombreux et plus imposants qu’avant, même si certains sont complètement oubliables en plus de proposer des combats peu nerveux. Les plus réussis ont pour la plupart un design assez cool, mais les terrasser demandera une bonne dose de concentration (pour ne pas dire d’acharnement). Le challenge vient à la fois de leur barre de vie conséquente, du gros manque de lisibilité de leurs attaques et de votre résistance à subir l’agression auditive que représente la musique technocore qui n’aurait pas fait tache dans une boîte de nuit belge des années 90.
Le bilan peut paraître lourd de prime abord, mais si l’on prend le temps de bien comprendre les mécaniques du jeu tout en lui pardonnant ses défauts certes problématiques, les amateurs du premier opus retrouveront ce qu’ils avaient apprécié en 2017 dans une version upgradée ; tandis que les nouveaux venus y trouveront également leur compte dans cette aventure plus complète et mieux équilibrée.