Lorsque l’on a, pour la première fois, associé le nom de Batman à celui de Telltale, le fan absolu du chevalier noir qui sommeille en moi s’est soudain retrouvé en transe. Qu’allaient bien pouvoir faire ces développeurs réputés pour leur science de la narration et la qualité de leurs jeux d’aventure avec, comme base, l’un des plus emblématiques héros de DC Comics. Il y avait de la matière, le personnage se prêtait comme aucun autre au style et à l’approche de Telltale. Depuis cette annonce, je ne pouvais que ronger mon frein et contenir au mieux une irrépressible impatience. J’essayais intérieurement de me persuader que Telltale ne pouvait pas se louper en traitant l’homme sans peur. En cette fin août 2016, c’est avec des mains tremblantes et moites que j’ai saisi la manette et que je me suis lancé dans l’aventure. Pour la première fois en commençant une histoire de Batman, j’avais peur…
Batmou
Telltale a choisi d’aborder un arc pas évident car très connu et apprécié par les fans : celui de Harvey Dent et de la famille mafieuse de Gotham, les Falcone. Déjà superbement illustré et écrit par le duo Tim Sale et Joseph Loeb dans un Long Halloween et Amère Victoire, cet arc fabuleux est peut être la plus grosse faiblesse de ce premier épisode. On ne peut pas s’empêcher de faire la comparaison entre le jeu et le comics et à chaque fois, le jeu souffre de cette dernière. En fait, en avançant dans l’histoire on se demande si ce Batman de Telltale a été fait et pensé pour les fans. Outre cet arc très connu et malgré les différences et les quelques aménagements, il n’arrive à aucun moment à surprendre ou à émouvoir l’érudit. On se rend encore plus compte de cette véritable lacune lorsque l’on arrive à la traditionnelle confrontation de nos choix avec le reste des joueurs. Lorsque ces derniers sont choisis à plus de 80% on voit que ces derniers manquent franchement de nuance et que d’autres ne correspondent tout simplement pas au personnage de Batman.
Outre ces problèmes de choix, la caractérisation des personnages et les choix scénaristiques peuvent littéralement s’apparenter à de l’hérésie pure et dure. Par exemple, Harvey Dent procureur à la course à la Mairie de Gotham, ne place pas sa lutte contre la pègre comme une valeur inaliénable. L’identité secrète de Batman est découverte en deux secondes par un personnage de ce premier épisode. Oswald Cobblepot apparaît affublé d’un look proche de la série télé Gotham, etc, etc. Finalement la seule chose qui peut un tout petit peu combler ou satisfaire l’amoureux de Batman sera de jouer essentiellement son alter ego Bruce Wayne, ses rapports familiaux et le paraître qu’il doit donner comme change à la haute société et à sa ville. C’est peu, trop peu.
Pour le béotien de Batman, l’approche est tout autre, encore faut-il qu’il accepte les affres du moteur vieillissant de Telltale. Techniquement, le jeu est loin d’être satisfaisant, il souffre de ralentissements, de bugs, d’une animation lourde et se perd même dans l’affichage de certains doublages (VOSTFR heureusement). Les combats sont une succession de QTE qui donne l’impression que Batman se bat au ralenti sans aucune fluidité. L’histoire passe beaucoup mieux car évidemment moins téléphonée (encore que) et la découverte de Bruce Wayne peut s’avérer plaisante. Les quelques phases d’enquête sont certes anecdotiques de par leur conception (relier deux éléments entre eux, sans avoir beaucoup de choix) mais ont le mérite d’être présent. On espère en tout cas que ce premier épisode est trompeur quant à la qualité à venir de la suite car pour le moment il est bien loin de répondre à l’engouement et à l’attente qu’il a suscités.