Test - The Witcher 3 : Wild Hunt

«Une partie de chasse inoubliable» , - 11 réaction(s)

La pluie battante martelait sans cesse le sol dans un vacarme assourdissant. Malgré les trombes d’eau qui s’abattaient, les empreintes étaient trop profondes pour disparaître dans la boue. Je me trouvais seul face à mon destin, seul devant les ténèbres de l’antre de la bête. La chasse arrivait à son terme et malgré les nombreux RPG que j’avais traqué jusqu’alors, la peur m’envahit comme elle ne l’avait jamais fait auparavant… Mes anciennes chasses me revinrent alors à l’esprit. Le récent Dragon Age Inquisition s’était avéré être malgré son apparence imposante un jeu plutôt moyen. L’impressionnant Mass Effect avait dépéri sous mes yeux malgré l’âpreté du premier combat que j’avais livré contre lui. Seul l’imparfait Skyrim sortait du lot. Les autres proies étaient malheureusement boiteuses, ne sachant pas allier la technique, l’histoire, le gameplay et la profondeur de jeu. Je sentais que ce Witcher 3 Wild Hunt était bien plus grand, bien plus dangereux à la hauteur jadis du redoutable Baldur’s Gate II. Et rien qu’en me remémorant ce nom, la peur disparut derrière une gigantesque vague d’excitation.

Préambule

Geralt de Riv, le héros réccurent du Sorceleur

Avant de nous lancer dans cette longue liste d’éloges en tout genre, permettez moi de vous présenter brièvement le personnage principal et la série pour les non-initiés. Geralt de Riv est né sous la plume d’Andrzej Sapkowski (à prononcer comme vous pouvez), écrivain Polonais né en 1948 à Lodz. Économiste de formation, sa première nouvelle, parue en 1986, Le Sorceleur, rencontra un excellent accueil critique. Il continua à développer cet univers médiéval fantastique marqué par une moralité froide et cynique qui le rapprocherait in fine de l’ambiance de l’œuvre désormais mythique de George R. R. Martin, Game of Thrones. S’ensuivirent trois recueils de nouvelles et cinq romans qui propulsèrent son auteur comme l’écrivain d’œuvres fantastiques le plus connu des années 90 en Pologne.

Cd Projekt mange tout cru la concurrence

Lorsque le développeur polonais CD Projekt se mit dans l’idée de créer un jeu de rôle en 2002 c’est naturellement qu’ils jetèrent leur dévolu sur l’œuvre d’Andrezej Sapkowski. CD Projekt était à la base un éditeur polonais, le premier à diffuser sur son sol des logiciels CD-Rom et notamment des hits internationaux entièrement localisés. L’un de leur premier grand succès commercial fut le génialissime Baldur’s Gate et ils ont toujours soigné leur localisation en confiant les doublages à des professionnels. Cette recherche de qualité se ressentira dès ce premier jeu, The Witcher, sorti uniquement sur PC en 2007 et accueilli au niveau international par d’excellentes critiques. Le succès commercial qui en suivit fut tellement retentissant pour la Pologne qu’il hissa CD Project comme entreprise fleuron du pays et comme cadeau officiel de chef d’État lors de la visite de Barrack Obama. The Witcher et Geralt de Riv devinrent, en seulement deux jeux, des incontournables du jeu de rôle vidéoludique. Pour comprendre cet engouement il suffit d’analyser le traitement donné à son héros, Geralt de Riv par CD Projekt.

Le monument Geralt de Riv

Geralt, l’homme le plus classe du monde

Geralt est une icône médiévale à lui seul. Un mutant assassin entraîné depuis son plus jeune âge à chasser les créatures sauvages qui terrorisent les royaumes. Les jeux sont résolument adultes par le traitement de leur univers et de leur narration : sombres, violents, sans concession et sexués. Geralt de Riv est loin d’être une coquille vide. Il a déjà derrière lui toute une vie, une mythologie et un caractère bien établis au moment du premier jeu. Ce respect du matériau d’origine est ce qui rend Geralt de Riv, si particulier, unique même. Chaque dialogue est finement ciselé, pensé, n’épargnant rien au joueur tout en restant crédible et fidèle à l’univers. On retrouve ces bases dans The Witcher 3 : Wild Hunt. Même sans avoir joué aux précédents jeux de la série ni lu aucun livre de Sapkowski, on est happé par le charisme magnétique de Geralt, par sa stature athlétique, ses yeux d’ambre à la pupille féline, sa chevelure immaculée et son corps bardé de cicatrices. On le retrouve accompagné de son mentor, Vizimar à la recherche de son amour, la magicienne Yennefer délicieusement introduite dans un bref didacticiel. Ce jeu de piste avec Yennefer ne marque que l’introduction de The Witcher 3 dans un environnement déjà vaste mais ridicule par rapport à ce qui va suivre. Un apéritif parfaitement maîtrisé qui pose les bases d’un jeu sans concession, tout en permettant au joueur de se familiariser avec Geralt, son maniement et de découvrir le contexte politique de la région. Après ses retrouvailles avec Yennefer, Geralt se voit confié par l’empereur du Nilfgaard, Emhyr Van Emries, de lui ramener sa fille qui n’est autre que Ciri l’ancienne protégée de Geralt. Mais il n’est pas le seul à sa recherche, le mythique escadron de chevaliers noirs, la Chasse Sauvage a lui aussi lancé la traque…

Même les (décolletés des) PNJ sont travaillés

Wild Hunt commence dès son introduction à imposer son univers froid et sombre. La narration connaît un sans faute et on assiste là à un véritable travail d’orfèvre en la matière. Chaque personnage est finement écrit, chacune de ses réparties semble taillée pour lui, qu’il ait un rôle prépondérant ou secondaire. On ne peut que saluer l’excellente qualité du doublage français qui fait honneur aux textes. La voix rocailleuse et le jeu sobre de Daniel Lobé -déjà à l’œuvre dans le second opus- sied parfaitement à la stature de Geralt. Chaque second rôle est traité avec le même soin, la même qualité. Wild Hunt offre toutefois la possibilité d’y jouer en version anglaise sous-titré.

La visite de cette tour n’est qu’une petite quête secondaire annexe...

Les quêtes secondaires proposent toutes une petite aventure bien écrite, intéressante et au résultat à la morale parfois ambiguë, laissant le joueur avec un goût amer dans la bouche. Pour vous donner un exemple, laissez-moi vous déflorer une des premières quêtes secondaires que vous rencontrerez dans le jeu. Le forgeron nain du village de Blanchefleur a eu sa forge détruite dans un incendie criminel, il demande à Geralt de retrouver le coupable. Geralt est un traqueur hors pair, ses sens aiguisés, surhumains, lui permettent de localiser dans un environnement proche les objets utiles, les bruits lointains mais aussi des traces ou des indices imperceptibles à l’œil nu. Le joueur participe alors à une petite enquête, récoltant les indices et suivant les traces de l’incendiaire pour revenir dans le village et tomber sur un paysan se remettant difficilement d’une cuite durant laquelle il a incendié la forge. Geralt aura le choix de ramener le criminel au nain ou le laisser libre. Dans le premier cas, le nain le donnera aux autorités qui le pendront haut et court sans plus de procès. The Witcher 3 arrive à préserver sa qualité d’écriture et de mise en scène tout le long et à se renouveler sans cesse proposant au joueur l’une des expériences les plus abouties dans ce secteur.

Les Royaumes du Nord sont immenses

L’univers de Witcher est d’une richesse inégalée

Jamais on n’avait vu dans un jeu de rôle un monde ouvert aussi grand, aussi riche, aussi beau et aussi cohérent que celui de the Witcher 3. Lorsque l’on emprunte avec Geralt les premiers sentiers à cheval nous menant au village de Blanchefleur, on tombe sous le charme de cette nature foisonnante que le vent semble balayer continuellement. Puis on passe à côté d’un gibet de fortune où pourrissent trois corps de pendus sur lesquels s’acharnent des corbeaux qui remarquent à peine notre présence. La guerre fait brutalement son entrée, de même que la noirceur et la brutalité des Royaumes du Nord.

Les détails foisonnent et dotent ce monde d’une véritable identité en faisant de lui un personnage à part entière

Le premier hameau que l’on traverse a été rasé. Autour des ruines fumantes de quelques chaumières, le silence n’est profané que par les pleurs des survivants et les aboiements des chiens sauvages. Un enfant reste prostré sur un corps de son père étendu par terre en suppliant celui-ci de se relever… Les détails foisonnent et dotent ce monde d’une véritable identité en faisant de lui un personnage à part entière. On se plaît à découvrir sans cesse une facette de sa personnalité, un groupe de soldats cachés faisant la cour à une catin, un paysan marchant sur la merde d’un chien, une femme serrant dans ses bras son bébé, les poules et les oies s’ébrouant sur notre passage… chaque village, chaque lieu semble nous réserver un nouveau détail, une nouvelle surprise.

La ville de Novigrad vous réserve beaucoup de surprises

La météo et l’heure de la journée influent directement sur les réactions des PNJ, ils se plaignent du vent, vont s’abriter sous les toits lors d’une averse, dorment à même le sol de leur chaumière, vont se saouler, dessoûlent, se regroupent autour d’un feu pour manger, vivent tout simplement. Prêter l’oreille à leurs conversations apporte des fois des indications précieuses sur une quête, sur l’histoire du village et ses habitants. Les personnages avec qui Geralt peut discuter pour une quête ou un contrat de sorceleur ont bénéficié d’un soin tout particulier. Le doublage est toujours excellent et leur visage, buriné, cassé, fripé ne ressemble à nul autre. Devant cette vie et ce foisonnement de détails on regrette d’autant plus la facilité de voler tout intérieur de cahute sans être inquiété. Seules les affaires des gardes sont sujettes à cette infraction.

Le soir les villageois s’accordent un moment festif

Les villages et les villes ne sont pas les seuls endroits à avoir été soigneusement pensés. L’écologie des Royaumes du Nord bénéficie du même soin. Les plantes ne poussent que dans leur environnement propre, les créatures sauvages se nourrissent du gibier environnant et ont leur propre façon de chasser, leur propre territoire. Les ruines et les vestiges croisés ne sont pas placés en opus incertum ou pour le bon plaisir de rendre le paysage photogénique, chaque lieu a son histoire, sa raison d’être, les forts sont placées en haut des collines à des endroits stratégiques, les tours de guets fondent sur deux versants, les villages de bûcherons sont entourés d’arbres coupés etc. Cette cohérence renforce le plaisir de découverte et hisse the Witcher 3 dans un niveau d’excellence inédit. Le terrain de jeu est tellement énorme que le cheval est loin d’être un simple gadget, surtout qu’il est possible de combattre sur son dos. Geralt ne se contentera pas de son cheval pour parcourir le monde. Il naviguera aussi à bord de petites embarcations afin de rejoindre des îles trop éloignées de la côte et pourra même plonger explorer les fonds afin de récupérer des algues comme ingrédient d’alchimie et autres trésors oubliés. Le jeu est un véritable fantasme pour tout explorateur en herbe.

Les combats sont grandioses

La créature tapie dans cette caverne est particulièrement dangereuse

Avec ce troisième opus, la série The Witcher semble arriver à une certaine maturité et cela se remarque d’autant plus dans son gameplay. Geralt se dirige très facilement, son animation est fluide, féline et pour la première fois dans la série il acquiert la possibilité de sauter. Grimper sur les chaumes des maisons ou s’agripper aux rebords d’un escarpement pour atteindre un fort à première vue hors de portée est agréable. On n’évite pas malheureusement les bugs de collision et la désagréable impression de rebondir parfois sur les murs. Il ne peut s’accrocher qu’à des endroits particuliers ce qui peut engendrer de la frustration lorsque l’on butte sur des éléments à portée auxquels il refuse de s’accrocher. Sur son cheval, qu’il appelle Ablette, la maniabilité est mieux maîtrisée, plus souple et reprend les grandes lignes du génial Red Dead Redemption : lorsque l’on est sur un chemin il suffit de laisser appuyer sur le bouton de trop pour que le cheval suive automatiquement celui-ci.

Un monde sombre et violent

Pour les combats, CD Projekt a repris le gameplay du second opus en le rendant plus dynamique. Geralt dispose toujours de ses deux épées, l’une en acier pour les créatures normales et les humains et une en argent pour toutes les créatures magiques. Une simple pression sur la croix directionnelle permet de passer de l’une à l’autre. Le ciblage se fait de façon automatique mais on garde la possibilité de rester focalisé sur un adversaire à la fois à tout moment. Geralt peut parer, contrer, faire un pas de côté, rouler dans une direction et utiliser magie, arbalète, bombe, potion et nourriture. Le tout se fait sans aucun problème et les combats s’avèrent tactiques, nerveux et très maniables. Inutile de foncer tête baissée sur vos adversaires, The Witcher 3 n’est pas fait pour les bourrins, ils essuieront défaite sur défaite en pensant tout régler avec leur seule épée.

Chaque monstre dispose de ses techniques d’attaque et de faiblesses qu’il faudra assimiler afin d’éviter de finir en nourriture pour nécrophages

Le bestiaire présent dans le menu n’est pas là pour faire joli, Geralt est un guerrier entraîné mais en tant que sorceleur il se doit de connaître parfaitement les créatures qu’il rencontre. Durant son périple il trouvera les entrées des créatures rodant dans les Royaumes du Nord et devra se préparer méticuleusement à chaque affrontement contre les plus dangereuses d’entre elles. Chaque monstre dispose de ses techniques d’attaque et de faiblesses qu’il faudra assimiler afin d’éviter de finir en nourriture pour nécrophages. Geralt se doit d’utiliser à bon escient ses capacités magiques, enduire ses lames d’huile spécifiques et concocter des potions lui conférant les bonnes résistances. Les combats sont tactiques et nécessitent à chaque fois une bonne anticipation mais aussi une bonne préparation. La magie est toute aussi importante que les lames.

La bateau vous sera d’une grande utilité

The Witcher 3 propose un tableau de compétence étendu allant de ses compétences martiales, magiques, à sa résistance à la toxicité des potions et à divers effets généraux comme le regain de la vie en journée hors combat ou une augmentation sensible des points de vie maximum. Simple mais efficace. Comme tout bon Sorceleur Geralt est rompu à l’art de l’alchimie ; le système de création de potion est simple et les recettes nombreuses ce qui pousse à une cueillette régulière des plantes croisées sur notre route et la gestion d’un stock important d’ingrédient divers. Vu les prix exorbitants pratiqués par les marchands du jeu et la difficulté d’amasser de l’argent, il s’avère rapidement nécessaire de faire avec ce que l’on trouve et de privilégier la récup. Notre argent est vite englouti par les divers forgerons lorsque l’on va les voir pour réparer notre précieux équipement. Heureusement que les quêtes apportent un petit pécule et qu’un jeu de carte appelé Gwynt à la mécanique intéressante et addictive peut nous faire gagner un petit montant non négligeable pour autant tout en passant un très agréable moment.

Bilan

On a aimé :
  • Geralt de Riv et tous ses compagnons d’armes
  • Réalisation exceptionnelle
  • Un jeu de rôle d’une richesse inégalée
  • Une narration et une mise en scène totalement abouties
  • Un gameplay aux petits oignons
On n’a pas aimé :
  • Quelques bugs
  • La gestion du vol
  • Devoir s’arrêter d’y jouer pour s’occuper des enfants
Le meilleur, tout simplement...

J’entame la conclusion du test mais sachez que je n’ai qu’effleuré tout ce que The Witcher 3 a à vous offrir. Le reste de la découverte vous appartient, le plaisir qu’il vous procurera, sera vôtre. Il s’agit là du meilleur RPG sorti à ce jour sur console et l’un des meilleurs RPG tout simplement. Si vous n’êtes pas totalement réfractaire au genre, et si vous avez bien votre majorité -car le +18 présent sur la jaquette ne souffre d’aucune discussion-, vous allez pouvoir toucher du doigt une sorte de nirvana, de fantasme incarné, vous extasier devant un monde beau et sombre à la fois. The Witcher 3 Wild Hunt réunit dans l’excellence, l’écriture, la narration, la technique, la richesse d’un monde et le gameplay pour l’un des jeux les plus aboutis que l’on ait eus. Si vous ne devez avoir qu’un seul jeu pour les vacances, c’est celui-là !

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The Witcher 3 : Wild Hunt

PEGI 18

Genre : Action RPG

Éditeur : Bandai Namco

Développeur : CD Projekt

Date de sortie : 19/05/2015

Prévu sur :

Xbox One, PlayStation 4, PC Windows

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11 reactions

XB1 Hecate

11 jui 2015 @ 12:32

Merci pour ce très beau test que j’ai pris beaucoup de plaisir à lire et qui m’a fait sourire tout du long car je suis exactement dans le même état de transe et de jubilation que toi Jarel !

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