Test - D4 : Dark Dreams Don’t Die

«Kinect à la sauce aventure» , - 2 réaction(s)

Depuis Deadly Premonition, on connaissait la passion avouée du développeur Swery65 pour les jeux déjantés, les enquêtes criminelles à la sauce Twin Peaks, l’humour potache et la folie furieuse. Et le voilà justement de retour, exclusivement sur Xbox One, avec la ferme intention de montrer à la terre entière que Kinect est capable de faire autre chose que la danse de salon ou du scooter des mers sur canapé. Son dernier né, D4, Dark Dreams Don’t Die, est un jeu d’aventure sur fond d’enquête policière surnaturelle. Quand un détective privé inconsolable se lance dans une vengeance, on pourrait s’attendre à un film noir. Mais ce serait mal connaître Swery65 et ses délires profonds. D4 joue donc dans une toute autre catégorie et vise un cocktail inédit qui mêle science-fiction, sang, dialogues incessants, drogues, mini-jeux, humour potache, QTE, collectionnite aiguë et scoring acharné. Le tout à la sauce « série épisodique », sur le modèle de Walking Dead. Un cocktail intéressant, s’il en est ! Mais voyons s’il est digeste...

Assassinat et amnésie

Little Peggy n’est jamais bien loin

Le joueur incarne David Young, un ancien flic devenu détective privé après le mystérieux assassinat de sa fiancée. David, devenu amnésique après l’agression, n’a dès lors qu’une seule obsession : retrouver l’assassin. S’il est aidé par son ancien coéquipier, David dispose surtout d’un pouvoir exceptionnel : il peut utiliser certains objets chargés de souvenirs pour revivre le passé. Tout ce qu’il a à faire, c’est s’allonger dans sa baignoire et partir mener l’enquête, dans un demi-coma. Dans sa baignoire, oui, quoi de plus logique finalement ? Vous l’aurez compris : l’origine japonaise du jeu, c’est-à-dire totalement barrée, est évidente dès les premières secondes. Un exemple parmi d’autres : une jeune femme très court vêtue qui se prend littéralement pour un chat (elle miaule, griffe et saute sur les meubles) vit de façon permanente chez le héros, qui la garde comme animal de compagnie. Quoi de plus normal, finalement ? On l’aura compris, D4 s’adresse avant tout aux fans de Deadly Premonition : il vaut mieux adhérer d’emblée au concept de jeu tordu avant de se lancer dans l’aventure. Le titre est présenté sous forme de série : chaque épisode s’articule autour d’un objet qui sert de porte d’entrée vers un moment passé où il faudra recueillir des indices pour lier tous les éléments entre eux, résoudre l’épisode et... tenter d’améliorer son score. On y reviendra.

Un gameplay ultra assisté

Un gameplay parfois proche de Heavy Rain

Si le jeu démarre par un prologue qui sert de tutoriel pour apprendre à se déplacer, c’est clairement une fois plongé dans le grand bain (ah ah) que l’on découvre les mécanismes du jeu. Concrètement, D4 est un point’n click où le héros se déplace de zone en zone (des points fixes placés sur les lieux), observe ce qu’il entoure, fouille les éléments du décor (en cliquant dessus), interagit avec les personnages et passe à la zone suivante. Tout au long de l’aventure, le joueur doit surveiller 3 jauges : une barre de vie, une barre de fatigue et une barre de vision. Du moins, le joueur POURRAIT surveiller ces jauges, sauf que l’extrême facilité du jeu l’en dispense franchement. Si la barre de fatigue se vide à chaque action entreprise (ouvrir un tiroir, c’est tellement crevant), elle est facile à remplir en se gavant de la nourriture trouvée ici ou là, ou achetée dans une boutique tenue par un chat blanc, située au milieu de chaque niveau. Durant les deux épisodes qui sont compris au lancement (d’autres viendront s’ajouter par la suite, moyennant finances), gérer sa vie ou sa fatigue ne s’est pas montré nécessaire pour survivre jusqu’à la fin, je vous rassure. Les points de vie sont perdus quand le joueur rate un QTE, (s’il les perd tous, il recommence la scène), et la barre de vision lui sert à mettre en surbrillance les indices qui n’ont pas encore été trouvés.

On notera que ces scènes d’action sont bien rythmées et sont souvent l’occasion de conclusions humoristiques

Une fois que le joueur a pris le temps d’explorer, il peut papoter avec les PNJ croisés sur les lieux. Chacun a des choses à dire, parfois confuses, parfois marrantes, et leur rôle est de faire progresser l’histoire. Ces interactions déclenchent souvent des mini-jeux (ramasser des trèfles qui tombent vers le bas de l’écran, répondre à un quiz sur l’aéronautique...) ou des phases QTE assez longues (jusqu’à une quinzaine de gestes à enchaîner) qui donnent un peu l’impression d’avoir lancé Just Dance dans un moment d’inattention. On notera que ces scènes d’action sont bien rythmées et sont souvent l’occasion de conclusions humoristiques. Les phases d’exploration permettent au joueur de cumuler les indices nécessaires à la résolution de l’enquête, qui prend alors des faux airs de grand final à la Scoubidou. Là aussi on se surprend à sourire, même si c’est parfois de soulagement. On y reviendra aussi.

Next-gen ?

Bienvenue au Japon !

Techniquement, autant être clairs : si le jeu sort sur Xbox One, il aurait sans doute pu sortir sur Xbox 360 quasiment à l’identique. Le jeu est propre, mais on aura du mal à reconnaître un rendu 2014, surtout après avoir joué à Destiny, ou bien Ryse. Entièrement en 3D cel-shadée (et aliasée), le jeu propose un character design typique d’une production japonaise allumée (on pense très fort à Killer7). On y croise aussi les « tronches » stéréotypées que l’on retrouve souvent : du flic teigneux au junkie azimuté en passant par le spécialiste de la mode aux cheveux verts. Manquerait plus qu’un ennemi en armure de combat high-tech ou une lycéenne en jupe courte pour qu’on ait la totale.

Pour le reste, le jeu est plutôt fluide, assez joliment coloré, mais certaines textures sont un peu en-dessous de ce que l’on peut attendre aujourd’hui, quand elles ne sont pas tout bêtement en retard d’affichage sur le jeu lui-même. Quelques bugs d’installation corrompue ou de son manquant ont également été rapportés. C’est toutefois rare, rien de dramatique à signaler. Côté son, les voix anglaises sont intégralement sous-titrées en français, et l’ensemble est plutôt bien traduit. Le jeu d’acteur n’est ni brillant ni catastrophique, ce qui est plutôt une bonne nouvelle, car les dialogues sont souvent longs et fournis. Pour la musique, certains thèmes sont vraiment réussis et touchants, et on peut changer la musique de fond en se lançant à la recherche de disques disséminés sur les niveaux.

Avec ou sans les mains ?

Depuis son apparition sur les radars, D4 s’est fait remarquer pour une raison simple : il est intégralement jouable avec Kinect. Le jeu sans manette est effectivement tout à fait praticable, même si on a tendance à s’emmêler les crayons dans les phases chronométrées. Car si les QTE sont effectivement bien plus funs à effectuer avec les mains, les déplacements et l’exploration sont eux plus praticables à la manette, surtout qu’après deux heures les bras en l’air, ça commence à tirer un peu. On notera toutefois que Kinect a parfois du mal a reconnaître les « clics » du joueur (il faut fermer la main pour valider une action) et cela devient assez pénible de refaire plusieurs fois de suite le même geste pour accomplir une action « simple » (ouvrir un tiroir, boire un verre de tequila...). Pour les besoins du test, nous avons joué dans une pièce éclairée et dans une pièce obscure, sans y voir de changement notable. Si D4 remplit son contrat Kinectien, la plus-value de l’accessoire n’est toutefois pas démontrée, si ce n’est dans les QTE. Un système hybride mélangeant manette et Kinect aurait peut-être été plus satisfaisant. (?) On ne peut toutefois que louer l’effort d’intégrer Kinect dans les jeux, et ce simple fait mérite d’être salué.

Extra ball

Pour boucler l’aventure des deux premiers épisodes ainsi que le prologue qui sert de tutoriel, il faudra compter environ deux heures. Si certains resteront sur leur faim devant le manque de challenge, ce sera pour les autres le point de départ du “vrai” jeu. En effet, D4 est une expérience un peu trompeuse, qui mise beaucoup de son gameplay sur le désir de collection et du high score. A chaque fin d’enquête, vous accédez ainsi au détail de vos stats et vous découvrez (horrifié) le nombre d’indices que vous avez laissé filer. Réussir le jeu à 100 %, cela signifie ouvrir chaque placard, fouiller chaque centimètre carré, exploiter toutes les possibilités des dialogues des PNJ, mais aussi faire preuve de réflexes surhumains pour réussir à toucher un point précis sur l’écran qui clignote un court instant puis disparaît à jamais. Dans ce cas, oui, le jeu devient nettement plus long et pourra montrer un peu de résistance. Les fans de scoring qui n’auront pas peur de redémarrer plusieurs fois la même enquête auront de quoi être aux anges… Les autres, un peu moins.

Un rythme qui se cherche

Le meilleur personnage du jeu

Le plus gros problème de D4 réside toutefois ailleurs, mais il est profondément subjectif. Plus on progresse dans l’aventure, plus on a l’impression de subir des dialogues creux et des mini-jeux insipides totalement déconnectés du reste de l’intrigue. Une question se pose alors : faut-il crier au génie pour une ambiance aussi fouillée, ou au scandale pour un remplissage un peu facile ? Les fans et les joueurs néophytes n’auront pas forcément la même réponse. Si Twin Peaks est le modèle déclaré de Swery, on ne retrouve hélas dans D4 ni la justesse de ton, ni la géniale ambivalence du chef d’oeuvre de David Lynch.

D4 semble manquer sa cible et trébucher de façon récurrente dans une absence de vision qui l’empêche de prendre son identité narrative

Mais ce n’est là qu’un aspect du problème. Nous l’avons mentionné plus haut : le jeu mêle enquête, QTE, angoisse, humour et folie, mais il le fait de manière assez maladroite d’un point de vue purement scénaristique. Si certaines scènes d’angoisse sont véritablement très réussies, elles sont parfois plombées par un geste soudain trop théâtral du héros ou par un trait humoristique lourdingue. Le jeu aurait pu choisir de partir dans le délire permanent le plus complet, comme dans une excellente production Suda51, ou de monter crescendo de la normalité vers la folie (comme dans Twin Peaks, justement), mais il oscille en permanence et un peu maladroitement entre les deux. De fait, D4 semble manquer sa cible et trébucher de façon récurrente dans une absence de vision qui l’empêche de prendre son identité narrative. Cela pourrait être anecdotique pour un shoot’em up ou un beat’em all, mais c’est hélas bien plus handicapant pour un jeu d’ambiance et d’exploration, où l’on se demande parfois quel mini-jeu pénible viendra clore une scène bien réalisée. Dommage.

Bilan

On a aimé
  • L’esprit japonais bien barré
  • Kinect exploité
  • Des QTE dynamiques et marrants
  • Le prix
On n’ a pas aimé :
  • Un rythme et un ton jamais justes
  • Un jeu court et facile
  • Des personnages trop caricaturaux
  • Des mini-jeux pénibles
  • Quelques soucis de reconnaissance gestuelle
D4 : Détective dépressif, décalé et… décevant

Si on ne peut que saluer la volonté d’exploiter Kinect, ce n’est hélas pas D4 qui va lui permettre de le rendre indispensable. Se payant le luxe d’être à la fois trop sage et trop fou, et d’une qualité d’écriture générale un peu discutable, il ne parvient pas à définir son propre ton et à tenir le joueur en haleine si ce dernier avait pour objectif de vivre une grande aventure point’n’click. Restent quelques scènes épiques, drôles et bien chorégraphiées en QTE, une ambiance onirique parfois prenante, et quelques passages intéressants, qui laissent à penser que la série pourrait s’améliorer sur des épisodes ultérieurs. Pour le reste, entre mini-jeux répétitifs, PNJ stéréotypés et une grandiloquence surjouée, on reste un peu sur notre faim. Si les fans de Deadly Premonition, les adeptes de la chasse au score et les passionnés d’univers décalés y trouveront évidemment leur compte (on ne peut que leur conseiller de se lancer), difficile de ne pas se montrer un peu déçu devant un résultat finalement plus mièvre qu’espéré.

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D4 : Dark Dreams Don’t Die

PEGI 0

Genre : Aventure/Réflexion

Éditeur : Microsoft

Développeur : Swery

Date de sortie : 19/09/2014

Prévu sur :

Xbox One

2 reactions

texazranger

22 sep 2014 @ 17:31

Plutôt mitigé donc.... J’attends de lire d’autres tests, mais l’achat de kinect semble s’éloigner, pour l’instant.

sisleur

02 jan 2015 @ 20:58

salut les gens est il en français svp ?