Test - Castlevania : Lords of Shadow 2

«Dédié aux amis de la poésie» , - 1 réaction(s)

En ressortant la saga Castlevania des cartons, la team Mercury avait réussi à faire émerger les vampires de leur sommeil vidéoludique de la plus belle des manières. Sans être une révolution, Lords of Shadow premier du nom empruntait au genre qu’il représentait tous les mécanismes éprouvés pour en faire une compilation de qualité aux yeux de tout fan de beat’em all. Mieux, il y avait cette douce poésie qui venait s’insinuer dans un jeu à la fois sobre et enchanteur, charmant les plus sensibles d’entre nous. C’est à eux que je dédie ce test, empli d’amour et de mélancolie, de Castlevania : Lords of Shadow 2. Si vous vous dites que ces sentimentaux sont ridicules, je pense que vous êtes sans coeur ; ça tombe bien, Gabriel en a quelques uns sous la main !

Mourir d’amour enchaîné

Le premier Castlevania : Lords of Shadow nous mettait aux commandes de Gabriel Belmont, membre d’un Ordre religieux appelé la Confrérie de la Lumière, cherchant à démêler l’âge sombre qui s’abattait sur la Terre. Celui-ci était mu par une volonté à toute épreuve puisque ce même mal avait eu raison de sa bien-aimée Marie et qu’il était prêt à tout pour honorer son souvenir, si cher à ses yeux. Au terme de son délicieux périple, il découvrira les manipulations dont il a été l’objet et éjectera de leur trône les Seigneurs des ombres qu’il avait juré de combattre…. pour s’y mettre à leur place. En effet, corrompu par le pouvoir noir qu’il avait anéanti, il devint le Prince des ténèbres, et ce sont ses aventures en tant que Dracula qui nous sont contées dans ce second opus sur consoles de salon.

Ce premier épisode proposait à l’époque des tableaux magnifiques composés de décors grandioses et maîtrisés, soutenus par des musiques magnifiquement adaptées au ton du visuel. Le tout, sans fausse note, était servi par un gameplay déjà vu, mais efficace, reprenant tous les arguments des meilleurs jeux des genres qui se côtoyaient dans l’aventure. L’histoire demeurait un peu en retrait, peut-être un peu trop simpliste ou prévisible, mais elle ne suffisait pas à entacher l’expérience, pour peu qu’on ait l’âme un minimum sensible. L’épisode sur 3DS, Mirror of Fate, quant à lui, avait refroidi certains amoureux du 1er titre ; moins maîtrisé, moins constant, il pourra néanmoins s’avérer utile afin de faciliter la compréhension de l’histoire de Lords of Shadow 2, même si elle est résumée en début de partie. Ce second épisode fait donc office de conclusion pour le conseil de classe. Cassons le suspense de suite : élève très capable, mais dont les idées sont parfois profondément discutables.

Bon sang ne saurait vampire

L’introduction du jeu rappelle à notre souvenir pourquoi Lords of Shadow occupe aujourd’hui encore une place toute particulière dans les coeurs de certains : on incarne un héros torturé, mystérieux, dans un contexte charmant. Les bases de l’histoire qui sont jetées sporadiquement suffisent à susciter l’intérêt et à soulever quelques questions. Même si elle reste assez prévisible et jonchée de raccourcis un peu faciles dans l’ensemble, elle demeure suffisante pour ne pas gâcher l’expérience, et toutes les questions trouveront réponse tôt ou tard dans le jeu. Le petit résumé d’introduction ne sera pas de trop pour aborder ce titre.

Gabriel est devenu Dracula. Il a combattu et tué son propre fils, Trevor, dont il ignorait l’existence. Sur le point de mourir, celui-ci lui confesse ce secret. Rongé par le remord, Dracula lui offre son sang pour le ressusciter. En vain. Du moins, c’est ce qu’il croit. S’en suivent des histoires de famille avec lesquelles vous êtes peut-être familier si vous connaissez la série : Trevor devient Alucard le vampire, jurant de tuer son père. Celui-ci a à son tour eu un fils, Simon. Il devient chasseur de vampires. Lui-même a un enfant, qu’il inscrit au catéchisme et au judo, même s’il préférait la danse, et la lignée des Belmont perdure encore et toujours…. Nous faisons un bond de plusieurs siècles en avant : Gabriel/Dracula est réveillé par Zobek après un sommeil qui a duré plusieurs siècles ; le même Zobek ami-ennemi du premier épisode. Il craint que Satan ne fasse son retour, et souhaite faire appel au Prince des ténèbres pour l’en empêcher. Pour convaincre Gabriel, qui ne porte pas vraiment cet ancien compagnon dans son coeur, il lui promet ce qu’il recherche plus que tout : la mort, la vraie, la dure.

Gabriel va alors se mettre en quête de cet ennemi juré, encore un, afin de le renvoyer ad patres avant qu’il n’en sorte. Sauf que les temps ont changé, et que Gabriel aura bien du mal après un repos de plusieurs siècles à se démêler les jambes, tout courbaturé qu’il est.

Quand on arrive en ville, ça fait peur à voir

C’est là le changement le plus radical du jeu : l’entremêlement des périodes. En effet, notre héros va se balader entre une sorte de monde parallèle dont le contexte est ancien, peu de temps après les événements du premier Lord of Shadow, et la réalité, l’époque actuelle. Tout se passe néanmoins au même endroit : dans le château où il a défait les vampires du 1er opus, la ville contemporaine ayant été construite sur la carcasse du bâtiment lui-même.

On assiste tristement à la démolition de la magie qui avait été posée avec tant de brio dans ce 1er épisode en arrivant dans l’époque contemporaine

Après un tutoriel dans le passé, rappelant les joies de Lords of Shadow 1, on assiste tristement à la démolition de la magie qui avait été posée avec tant de brio dans ce 1er épisode en arrivant dans l’époque contemporaine.

L’ambiance en prend un coup que les souvenirs tentent de soigner, en vain, et on se rappelle avec un frisson les mauvais moments passés à tuer les mutants dans Ninja Gaiden. La ville, ses poubelles, ses papiers déchirés, sa musique techno (certes occasionnelle), ses ennemis mécanisés ou “mutanisés”, armés de mitraillettes sont comme un doigt levé à destination de tous les mièvres romantiques que nous sommes, fautifs d’être tombés amoureux d’une sirène qui montre enfin les crocs. Les écrans qui la composent manquent un peu de variété, mais c’est surtout le décalage avec le ton si enchanteur de la partie médiévale qui rebutera les aficionados de l’ambiance du premier opus.

Les mondes que traversera Gabriel sont désormais semi-ouverts, permettant au joueur d’aller en sonder tous les secrets à chaque recoin, pour récupérer les améliorations de magie ou de santé, les illustrations, les mémoriaux ou encore les défis Kaidos disséminés un peu partout une fois les compétences pour y accéder acquises. Une plus-value pour la durée de vie du jeu qui est déjà conséquente (entre 15 et 20 heures) pour le genre, mais qui frustrera ceux qui comme moi apprécient à l’occasion les chemins tracés (ça reste un beat’em all quoi !). Les plus gourmands s’attaqueront aux défis susmentionnés auxquels ils accéderont chez le marchand afin de combattre des hordes d’ennemis en suivant des pré-requis bien précis (tuer tant d’adversaires en n secondes, sans se faire toucher, etc.).

Moi vouloir être un rat

Mis à part cet impair scénique de taille, le jeu reste égal à lui-même : une débauche d’effets chatoyants appuie des combats nerveux contre un bestiaire suffisamment varié, même si c’est parfois la confusion quand on déclenche l’un ou l’autre combo impressionnant. Il faut toujours enchaîner les coups verticaux et horizontaux ainsi qu’user des capacités de Gabriel (dont certaines vraiment intéressantes) pour occire ses opposants. On appréciera le remaniement de la touche d’esquive déplacée du stick R au maintien de la gâchette gauche + direction. L’esquive est du coup plus facile à sortir, mais rend la parade synchronisée (LT au bon moment) moins aisée, puisqu’on a tôt fait de combiner LT avec une direction.

Les autres principes demeurent : plus on tape, plus on remplit la barre de combo, plus les ennemis font tomber des orbes permettant de recharger les barres de magie. Celles-ci ont été remplacées par l’épée du néant et les poings du chaos ; la première permettra de récupérer de la vie, l’autre de briser les défenses les plus solides. A la manière de feues les magies, les agréments graphiques qu’elles provoquent rendent tout chose, et il faudra en user avec réflexion selon le mode de difficulté choisi ; sur les 3 niveaux de difficulté de base (un est déblocable par la suite), il arrive déjà de mourir régulièrement si on ne fait pas attention dans le niveau médian.

Dracula, grand Prince des Ténèbres, devra éviter des ennemis au chara-design complètement raté lors de phases d’infiltration, elles aussi complètement dispensables

La combinaison savante des 3 armes sera donc au coeur des combats, et sera couplée aux achèvements d’ennemis via les sempiternels QTE permettant de boire le sang d’un ennemi déjà proche de la mort, offrant la possibilité de récupérer un peu de vie au passage. Ces options, aussi simples soient-elles, impliquent un aspect stratégique loin d’être désagréable dans les combats un peu tendus.

Il est à noter que l’on peut enfin bouger la caméra soi-même avec le stick droit, puisqu’il n’est plus utilisé pour les parades. Pratique pour déjouer les quelques problèmes de caméra inhérents au genre.

Les phases de plate-forme ont bénéficié d’ajustements mineurs et à peine perceptibles, les rendant moins rébarbatives, mais cela ne fait pas d’elles une pierre angulaire du gameplay. Dans le fond, tout repose sur les mêmes bases : escalade, saut sur un point d’accroche prévu à cet effet, etc. A nouveau, l’alternance combats/plate-forme est suffisamment bien maîtrisée pour qu’on ne se sente assailli par l’un ou en manque de l’autre.

Ce qui se dénote plus, d’un point de vue nouveauté, ce sont les phases d’infiltration. Vous avez bien lu. Dracula, grand Prince des Ténèbres, devra éviter des ennemis au chara-design complètement raté lors de phases d’infiltration, elles aussi complètement dispensables et qui seront au coeur même du dégoût du joueur pour ce que le jeu a de plus vilain. Lors de celles-ci, vous aurez l’extraordinaire opportunité de vous transformer en rat pour aller ronger des câbles ou passer dans les trous vers d’autres pièces ou de distraire des gardes pour les posséder en vous faufilant derrière eux. Ces 2 points sont les principaux à mettre en oeuvre lors de ces banales et fatigantes et répétitives et abominables et... phases d’infiltration. Cette idée aurait pu être un ajout agréable s’il avait été unique et mieux pensé, car certaines de ces phases ne sont pas aussi atroces qu’il puisse paraître.

C’est d’autant plus incompréhensible qu’à côté de ça, de réjouissants petits bonbons d’inventivité se sont cachés pour éviter au joueur de tomber dans la monotonie, et leur rareté les rend d’autant plus savoureux.

De l’art ou du cochon

Le jeu propose une copie sans bavures, prouvant que la génération des consoles en fin de vie en a encore dans le ventre. La démonstration avait déjà été faite dans le premier opus, avec des décors et des effets splendides, sans chute de framerate lors des combats, mais avec un aliasing parfois prononcé. Le constat est similaire, même si l’impression d’aliasing semble moins forte, grâce sans doute à des décors plus sombres dans l’ensemble.

Les scènes dans lesquelles évoluera notre héros sont régulièrement décevantes, la faute au contexte contemporain, avec une ville qui ne revêt que peu de charmes, et un héros qui fait un peu tache au milieu de cette urbanité soudaine.

Le fouet claquant contre les crachats des fusils à pompe sera néanmoins adouci par une bande son de haute volée. Oscar Araujo a une nouvelle fois fait l’étalage de son talent avec brio, même si certains thèmes se dénotent par leur étrange banalité, pour ne pas dire médiocrité. Ceux-ci sont rarissimes et dus à l’environnement citadin uniquement, rassurez-vous. Du piano seul qui semble réfléchir comme le héros sur l’écran d’accueil aux cordes vives en plein moment épique, l’ascension d’un pic ou un combat dichroïque, on ressent à la fois la désolation du personnage, l’immensité de certains décors, ou des tâches qui l’attendent jusqu’à la délivrance, quand ce n’est pas l’anxiété des choeurs qui nous anime.

Au final, même si certains thèmes ne s’enclenchent pas au moment le plus opportun, on a presque l’impression que cette musique fait le lien entre un héros malgré lui et un décor qui lui donne sa force et l’affaiblit en même temps ; du grand art, une nouvelle fois.

Bilan

On a aimé :
  • L’esthétisme (visuel et sonore) dans le passé de Gabriel
  • L’ambiance de ces mêmes phases
  • Les mécaniques de combats intelligemment améliorées
  • Certains passages originaux
On n’a pas aimé :
  • Les parties d’infiltration
  • Les passages contemporains
L’oxymore métonymique

Que dire de ce Castlevania sinon qu’il en émane comme un doux parfum de nostalgie et de regrets lancinants, mais d’envie et d’enthousiasme en même temps ? Les développeurs ont fait des paris qui n’ont pas tous fait mouche, loin de là. Mais mises à part les épouvantables phases d’infiltration, les fondamentaux du jeu sont améliorés... Malgré tout, l’essentiel s’en est allé. La magie opère toujours, lointaine et diffuse, comme atténuée par un brouhaha émanant de la foule, de cette ville sans âme, la métaphore filée de ce jeu esquinté ; peut-être le charme est-il trop estompé pour justifier d’aimer le jeu comme on a pu aimer le 1er opus, plus loin que les rêves l’ont imaginé. Peut-être bien que les développeurs de la team Mercury sont de fins poètes. Peut-être bien que ce jeu qui démembre à grands éclats la poésie de Lords of Shadow 1 est une figure de style rappelant la beauté du passé, comme un beau souvenir du héros lui rappelant sa vie d’antan. Ou peut-être tout juste ont-ils eu des idées qui n’ont pas marché, et que ce jeu est une demi-claque dans la gueule des amourachés de la saga. Peut-être bien que ce Lords of Shadow 2, c’est en fait l’allégorie de Rimbaud écrivant Twilight, tout simplement.

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Castlevania : Lords of Shadow 2

PEGI 16

Genre : Aventure/Plates-Formes

Editeur : Konami

Dévelopeur : Mercury Stean

Date de sortie : 27/02/2014

Prévu sur :

Xbox 360, PS3

1 reactions

Soul-Fire

20 mar 2014 @ 14:20

La dernière phrase de la conclusion m’a tué xD Bravo pour le style :p et Sinon je l’ai pas encore fini mais j’apprécie bien le jeu pour l’instant !