Jeux en carton : The Witcher

«Le Sorceleur jette les dés» , - 5 réaction(s)

Soyons clairs ! Suite aux déceptions qui ont suivi ma présentation de Gears of War : Le jeu de plateau, je tiens à vous rassurer d’emblée. Oui, The Witcher : Le jeu d’aventure est bel et bien disponible, il est d’ailleurs sorti très récemment. Ouf. Mais cela montre bien la différence entre une grosse boite en carton pleine de figurines et un jeu vidéo. S’il serait assez facile aujourd’hui de recréer en émulation les lineups de la Xbox 360, de la Megadrive ou même de la Vectrex, les jeux de plateau n’ont pas cette chance : quand c’est fini, c’est vraiment fini. Pas de panique toutefois, ce ne sera pas tout de suite le cas pour le jeu de plateau The Witcher, développé avec la bienveillance de CD Projekt, car il rencontre un succès mérité. Oserez-vous partir à Novigrad sans manette ?

L’aventure, c’est l’aventure

Le jeu de plateau The Witcher ne s’appelle donc pas « The Witcher : Le jeu de plateau » (finalement peu glamour) mais « Le jeu d’aventure », ce qui a quand même un peu plus d’éclat marketing. Il est conçu pour 2 à 4 joueurs et on peut le recommander à partir de 12-13 ans. Comme la quasi totalité des jeux de société basés sur le thème du jeu vidéo publiés en France, il est édité par Edge (avec Doom, Gears, X-com et World of Warcraft à leur catalogue). C’est un jeu basé sur l’accomplissement de quêtes, d’exploration et de combats, où l’objectif est simple : accumuler plus de points de victoire que ses adversaires. Chaque joueur incarne un personnage emblématique de l’univers (Geralt, Triss, Jaskier…) qui a ses caractéristiques propres et souvent très différenciées les unes des autres : combat, diplomatie, magie… Il faudra bien évidemment booster ses compétences, trucider pas mal de monstres et accumuler des jetons pour venir imposer sa loi, en général au bout de deux heures de jeu.

Classe tourisme et tout risque

Si les habitués des jeux de plateau ont l’impression, à la lecture de ce qui précède, que je suis en train d’évoquer le bon vieux Talisman (un jeu qui existe depuis les années 80), il serait réducteur de comparer plus longtemps ces deux titres, tant leur gameplay est éloigné. Les aventures du sorceleur reposent en effet sur des quêtes que chaque personnage doit accomplir et qui correspondent à de nombreuses actions de jeu. Ces quêtes, symbolisées par une liste scénarisée de grandes ou petites choses à accomplir, rappellent vraiment le jeu vidéo d’aventure tel qu’il existe aujourd’hui, comme The Witcher évidemment, mais aussi les incontournables Elder Scrolls. Outre la quête principale, il existe également des objectifs annexes qui permettent de gagner des indices, de faire progresser les compétences... ou le porte-monnaie du héros si elles sont accomplies. Alors il va falloir voyager, beaucoup, sur le splendide (et grand !) plateau de jeu qui représente les royaumes du nord, mener l’enquête un peu partout et se préparer à rencontrer bien des dangers, parfois musclés, pour accomplir ces fameuses missions (le jeu s’arrête quand un joueur boucle sa 3e quête).

Le design général reprend peu ou prou celui du jeu vidéo, et on aura aucun mal à reconnaître les personnages et la map. Autant le dire tout de suite : l’immersion Witcherienne est réussie, et les références permanentes à l’univers d’Andrzej Sapkowski montrent que les créateurs du jeu maîtrisent parfaitement leur sujet. Les quêtes (j’y reviens) constituent vraiment le point fort de ce jeu. Certes, la contrainte de taille des cartes ne leur permet évidemment pas d’être très développées, mais il suffit d’une phrase bien écrite pour nous lancer à l’aventure. On se surprend souvent à faire son propre petit travail narratif dans son coin et se croire dans une aventure bien plus vaste qui sort du cadre de la table du salon. Une réussite incontestable de présentation qui va nous faire oublier qu’il s’agit juste en général de se déplacer de 3 cases pour ramasser deux jetons. Bel exploit.

Un système très bien pensé

De son côté, le système de jeu est lui aussi vraiment bien foutu. Votre personnage dispose de plusieurs actions disponibles à effectuer par tour. Il peut se déplacer, mener l’enquête pour récolter des pions indices, utiliser sa capacité spéciale, etc. Le problème, c’est qu’à partir du moment où le personnage reçoit des blessures et qu’il les place sur sa fiche, il perd la capacité de réaliser l’action correspondant à l’endroit de la blessure. Le joueur doit donc gérer ses blessures en permanence et se demander à quel endroit elles lui seront le moins préjudiciables, ce qui est très sympa à jouer. En cours de partie, il est toujours agréable de voir qu’un peu de gestion des ressources et de la santé de son héros est nécessaire pour tenter de le ramener à bon port. Les combats, quant à eux, se résolvent au moyen de jets de dés qu’il est également possible de modifier en utilisant certaines caractéristiques propres à son personnage. Chaque créature amène son lot de récompenses, à condition évidemment qu’on ait réussi à la tuer, mais aussi à se protéger de ses assauts, puisqu’il faut savoir gérer ses dés d’attaque et de défense pour bénéficier du meilleur loot possible.

The Witcher est un jeu bien plus équilibré qu’on ne le pense, les caractéristiques de chaque héros ayant été soigneusement pensées pour donner aux joueurs la possibilité de laisser parler leurs talents. Lorsque Geralt se fighte, par exemple, il lance plus de dés que les autres et peut ainsi massacrer Grizzlys et Goules sans avoir à se soucier du résultat. Mais si sa quête en cours demande une once de diplomatie, il se verra alors affublé d’un lourd malus pour convertir ses jetons indices durement gagnés en preuves accablantes. Chaque héros propose donc un gameplay relativement différent pour permettre une réelle rejouabilité. Bref The Witcher version carton a su utiliser des mécanismes éprouvés (on y retrouve un peu de A touch of evil, par exemple...), les adapter à son univers mais aussi les développer pour proposer des parties agréables et immersives.

Houhou, y’a quelqu’un ???

The Witcher, le jeu de plateau d’aventure serait-il donc un jeu parfait ? Hélas non, à cause d’un problème que le concepteur du jeu n’a pas réussi à dompter : le manque d’interaction entre les joueurs. Nous parlons ici d’un jeu de type compétitif, où les joueurs s’affrontent les uns les autres. Et pourtant, seule cette course aux points va déterminer le vainqueur. Chacun résout ses quêtes, développe son perso et vit ses aventures dans son coin : les occasions d’interagir les uns avec les autres sont assez faibles, pour ne pas dire inexistantes. Il y a bien un système permettant à un joueur d’intervenir sur la quête d’un adversaire, mais cela reste excessivement limité. Ceux qui sont habitués à se rentrer plus directement dans le lard risquent de sentir un peu esseulés si leur désir ardent se résume à en découdre avec leurs voisin de table. On regrettera amèrement toute la violence de phrases bien senties, comme « T’as pas dit Uno ! » ou « Feu rouge, espèce de loser ». La violence ultime en quelque sorte.

Autour de The Witcher, on papote et on commente la réussite des uns et des autres en début de partie, mais on glisse progressivement dans l’ennui profond pendant le tour des autres, et on se surprend à se lever de table pour aller se faire un café avec le célèbre “vous m’appelez quand c’est à moi”, car on sait qu’il ne se passera plus rien pendant les 5 prochaines minutes. Il est toujours frustrant d’être à quatre autour d’une table et de n’avoir aucune interaction directe en jeu, même lorsque les personnages se trouvent sur la même case. Peut-être aurait-il alors fallu envisager un jeu coopératif plutôt que purement compétitif, ce qui aurait permis aux joueurs solo de s’aventurer eux aussi dans ce jeu ?

Pour ces derniers, une seule solution : se tourner vers l’adaptation Steam, Android et iOS de The Witcher, The Adventure Game, pour une version 100 % identique à son homologue en carton (mais dispo uniquement en anglais ou en polonais). L’appli permet de jouer contre des joueurs humains online, mais aussi contre des IA, ce qui est toujours pratique quand on n’a personne sous la main. Même si on ne manquera pas de pointer l’ironie de mettre en avant un jeu Steam dans une rubrique dédiée aux jeux en carton, cela permet au moins de parler d’un jeu qui est disponible partout, tout le temps, que l’on dispose d’une grande table et de trois amis motivés… ou d’un simple écran d’ordi.

Ne vous y trompez pas : en dépit de son manque d’interaction, The Witcher est un jeu bien conçu, agréable à jouer et qui mérite le détour pour tout fan de la licence. Des variantes et des extensions (officielles ou non) viendront peut-être animer un peu plus les parties, et gommer le sentiment de solitude qui s’en dégage parfois.

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The Witcher 3 : Wild Hunt

PEGI 18

Genre : Action RPG

Éditeur : Bandai Namco

Développeur : CD Projekt

Date de sortie : 19/05/2015

Prévu sur :

Xbox One, PlayStation 4, PC Windows

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5 reactions

jmabate

22 aoû 2015 @ 20:15

les héro quest, space crusade étaient des jeux de plateaux super convivial ! dommage que the witcher ne propose pas de figurine :-(

TheBitMapBrother

22 aoû 2015 @ 21:30

Dommage cette présentation faisait bien envie. Mais le manque d’interaction est rédhibitoire pour moi. Aider ses compagnons, c’est quand même le sel de ce jeu.

Mr Moot

23 aoû 2015 @ 23:42

Bon plan : Destiny (version digitale) à 19$ sur gamedealdaily Perso j’hésite

Mr Moot

23 aoû 2015 @ 23:45

Ouuuups ça à l’air d’être en version boîte en fait.. désolé je ne peux plus éditer.

Jonyboy

24 aoû 2015 @ 21:38

Merci Longshot, notamment pour cette précision en début d’article ;-) Par contre je suis beaucoup moins séduit que par Gears du coup. Je vois en effet peu d’intérêt par rapport à faire le jeu vidéo avec un pote en chat’ en fait. Mais toujours une très bonne rubrique ! Please continue :-)