Véritable coup de tonnerre dans l’industrie vidéoludique, Microsoft a racheté Bethesda (officialisé en août dernier) pour la modique somme de 8,1 milliards d’euros. Alors oui, on commence doucement à l’assimiler (voire à le banaliser, en comparaison à certains rachats récents), mais seul un fou aurait eu l’audace de le prédire il y a de cela deux ans. Sous le nouveau giron de Microsoft se trouve donc le studio de Shinji Mikami, Tango Gameworks, à qui on doit les excellents The Evil Within. Et, entre parenthèses, le seul studio japonais du groupe. C’est dans ce micmac si particulier qu’intervient le jeu qui nous intéresse aujourd’hui, Ghostwire : Tokyo, exclusivité console temporaire pour Sony et sa PlayStation 5. Lié contractuellement avant le rachat, Bethesda avait promis de sortir deux titres en exclusivité avec Deathloop et Ghostwire, chose maintenant faite. C’est donc agrémenté d’une Dualsense et d’un pc que nous nous attaquons à ce ‘first party’ Xbox. Ça promet !
La menace fantôme
Présenté à nous lors de l’E3 2019, le premier trailer laissait penser à un survival horror, genre qu’affectionne particulièrement Tango Gameworks et son dirigeant. Ce dernier aura finalement réussi à prendre son public à contre-pied tout au long de la communication, les trailers suivants révélant un tout autre visage pour son nouveau bébé : celui d’un shooteur flashy à base de sorts psychiques en vue à la première personne, le tout dans un Tokyo cauchemardesque en open world. Cette dernière phrase résume d’ailleurs plutôt bien l’expérience globale proposée.
L’histoire prend donc place dans la capitale japonaise, lorsqu’une attaque de démons, dirigée par un énigmatique homme masqué, prend d’assaut la ville, transformant par la même occasion ses habitants en esprits. Sauf Akito, notre personnage, qui résiste à la possession et finit par fusionner avec l’entité qui essaye d’envahir son corps, ce qui lui confère des pouvoirs psychiques. Cet esprit, KK de son petit nom, se révèle être un compagnon très utile et à même de nous aider à percer le mystère planant autour de cette attaque. S’il est surtout un prétexte pour aller d’un point A à un point B tout au long de l’aventure ainsi qu’à éradiquer d’innombrables hordes de fantômes, le scénario a le mérite de capter l’attention durant ses premières heures. KK est charismatique et son doublage est joué avec justesse, les secrets en dévoilent d’autres et la soif d’explications est clairement là.
Mais l’histoire finit par lasser dans son deuxième tiers, faute de réels changements, entraînant une redondance plus que tenace. Jusqu’à finalement venir à bout de notre patience, car KK parle sans arrêt, les missions sont beaucoup trop linéaires et la ville se remplit de points d’interaction dupliqués à l’infini. Bref, la phase ‘lune de miel’ passe assez vite et on est content de poser la manette une fois le jeu fini. Malheureusement, Ghostwire : Tokyo est trop long pour son propre bien. Divisé en 5 chapitres qui se bouclent en une bonne dizaine d’heures, on a le sentiment d’avoir très vite tout vu. Et ce n’est pas le gameplay qui rattrape le coup.
Tu tires ou tu pointes ?
Présenté comme l’élément phare lors des dernières présentations, le gameplay s’apparente à un Naruto sous amphétamines. Notre personnage envoie des jujutsu à base de signes faits avec ses mains, le tout emballé par des effets pyrotechniques capables de provoquer une crise d’épilepsie aux plus résistants d’entre nous.
Quelle déception de se rendre compte qu’au final ces attaques ne sont qu’une présentation différente des patterns classiques des FPS actuels ! Un sort d’attaques rapides qui s’apparente à une mitraillette, un sort de zone à courte portée proche d’un shotgun, un autre dévastateur, tel un bazooka, etc. Vous l’avez compris, on reste dans un gameplay très classique et l’illusion graphique ne trompe pas.
C’est d’ailleurs aussi un des reproches que l’on pourrait faire à l’arbre de compétences, qui se débloque en accumulant des points d’expérience accordés pour la moindre action. Souvent superflus, ces ‘boost’ augmentent principalement la vitesse d’exécution ou alors tout simplement les dégâts infligés. On aurait aimé plus de diversité, voire même des compétences uniques qui auraient changé la dynamique du gameplay selon l’embranchement choisi.
Face à notre arsenal se dressent des ennemis avec des déplacements beaucoup trop simplistes se résumant souvent à avancer en ligne, la seule difficulté étant leur nombre de points de vie important.
De beaux punching-balls qui absorbent nos coups, en somme. En résulte des affrontements sans grand intérêt qui peinent à convaincre passé les premières heures de jeu. S’ajoutent à cela des petites subtilités comme une dimension infiltration très sommaire, même si une fois encore ces artifices ne font illusion qu’au début.
Heureusement, les sensations avec la Dualsense sont au rendez-vous. C’est d’ailleurs cette dernière qui est conseillée comme périphérique principal pour les joueurs PC. Chaque coup est retranscrit par des impacts dans la manette, les gâchettes se bloquent différemment selon les sorts, on sent qu’un grand soin a été apporté et c’est réussi.
Un Tokyo désolé
Impossible d’être passé à côté pour peu d’avoir vu une seule image du jeu, la direction artistique crève littéralement l’écran. Le Tokyo futuriste s’offrant à nous fourmille de fantômes en tout genre, s’inspirant librement des contes et légendes japonaises, pour un résultat plus que réussi.
C’est d’ailleurs une des grandes forces de cette expérience atypique, on en prend plein la tronche du début à la fin. Mention spéciale aux effets de ray-tracing, notamment en termes de réflexion, qui donnent corps à cette ville même si elle manque parfois de charme. Et ce ne sont pas les objectifs secondaires qui rattrapent l’ennui grandissant tout au long de notre partie. Ni la boucle de gameplay qui s’enchaîne sans cesse, jusqu’à l’overdose quasi inévitable. Les rues sont parsemées de points d’intérêt à compléter et on en arrive à procéder machinalement au ratissage de la carte afin de tout débloquer. Pour le reste c’est du vu et revu.
Côté optimisation, le jeu tournait relativement bien sur notre configuration, le DLSS proposé fait des merveilles et tout demeure fluide en étant poussé en Ultra. Encore heureux vu la qualité très moyenne de certaines textures. Le jeu arrive étrangement à être très beau sur certains effets de lumière pour ensuite proposer un rendu proche de l’ère Xbox 360.
Test réalisé sur PC avec une RTX 2070 Super, 16Gb RAM et un I5-9600K.