Test - Shiness : The Lightning Kingdom

«Sick sad world» , - 3 réaction(s)

Le projet Shiness est né il y a plus de 20 ans sous les coups de crayons d’un enfant, Samir Rebib, aujourd’hui Directeur Artistique du studio indé Enigami. C’est ce que nous dit le communiqué de presse de Focus Home Interactive et ce que nous disait la campagne Kickstarter qui a connu un franc succès. Shiness : The Lightning Kingdom, c’est le RPG pour lequel on peut crier cocorico le studio étant domicilié à Tourcoing. C’est un jeu sur lequel beaucoup de regards étaient posés car l’ambition était palpable durant sa gestation. Tous les voyants étaient au vert. Maintenant qu’il est sorti, c’est le moment de dire ce que l’on en pense. Et notre cœur est lourd.

It’s going to be a bright sunshiny day

En route pour l’aventure !

Des années pour étoffer son univers, écrire les règles qui le régissent, les peuples, les personnages, ont laissé présager une certaine maturité et un certain style. Pourtant, Shiness est finalement très classique et ne prend que peu de risques. L’histoire commence lorsque Chado et son ami Poky, deux jeunes Waki, échouent sur les îles célestes. Chacun de leur côté, ils tombent sur d’autres personnes qui semblent fuir une menace. Guidé par sa Shiness, un esprit de la terre que lui seul est capable de voir, Chado se retrouve embarqué dans un conflit entre deux peuples qui l’amène à voyager sur les restes de la planète Mahéra, composée de différentes îles.

Aime si t’es triste pour lui

Ce qui étonnera le plus, c’est cette capacité qu’a le jeu à nous plonger dans un univers qui paraît complexe en faisant référence à beaucoup de choses pour, au final, ne rien en faire véritablement. S’ils semblent riches et variés dans les textes, les lieux visités sont assez pauvres, et la faune comme le bestiaire ne sont pas très diversifiés. Cela est autant dû à une regrettable maladresse dans l’écriture, comme l’attestent quelques échanges entre les personnages et des enchaînements de situations pas très fins, qu’au manque de moyen. Cela a peut-être limité les très grandes ambitions du jeu et finit par l’appauvrir. Quoi qu’il en soit, durant tout leur périple, on a du mal à s’attacher aux personnages et encore moins à s’intéresser à ce qui les anime vraiment. On suit l’histoire comme on suit les objectifs, ces ronds indiqués sur la carte qui nous mènent d’un point à un autre, mollement.

En voilà un drôle d’animal

Comme dans tout RPG, l’exploration est une part importante du gameplay. Shiness n’est pas un jeu à monde ouvert comme la majorité de ses contemporains, mais un jeu divisé en zones plus ou moins grandes dans lesquelles le joueur évolue à sa guise. La première déconvenue vient du fait que le level design n’est pas bien brillant et que le jeu force à faire des allers-retours jusqu’à nous en dégoûter. La deuxième, c’est que les différentes énigmes qui sont censées nous faire réfléchir en observant l’environnement tout en utilisant les capacités spéciales propres à chaque personnage sont ridiculement simplistes. Enfin, la dernière vient d’une lueur d’espoir qui arrive à un certain point de l’aventure : on visite une plaine plus vaste qui apporte quelques promesses de liberté et d’aventures pendant quelques instants. On aurait pu crier au syndrome FFXIII, avec qui il donnerait l’impression de partagé une longue introduction en mode couloir avant de proposer quelque chose de plus ouvert ensuite, mais il n’en est rien. On se retrouve finalement à toujours aller d’un point à un autre en suivant nos quêtes. N’allez pas croire qu’il y a beaucoup d’objectifs secondaires, loin de là. Le jeu ne donne pas l’occasion de s’éterniser pour découvrir d’autres facettes de son univers puisque les objectifs sont assez simplistes et consistent à rendre service en allant récupérer ceci ou taper cela.

La fureur du dragon ball

Le système de combat est une part importante d’un RPG qui, s’il est réussi, peut satisfaire les aficionados du genre bien plus qu’une belle histoire prenante. Autant le dire franchement, si sur papier celui de Shiness parait complet, dans les faits c’est une plaie.

K.O. K.O.

Les combats sont en temps réel et on joue un personnage à la fois. On peut switcher entre les 3 actifs en fonction de nos besoins ou affinités. Coup de pieds, de poings, garde, esquive, et même combos avec coup ultime,... tout semble se rapprocher d’un bon BTA des familles. Mais le calvaire commence lorsque l’on se rend compte que la garde ne bloque rien de rien. Pire, on s’énerve souvent contre les ennemis qui enchaînent des combos sans que l’on ne puisse essayer de se soigner ou changer de personnage pour éviter un KO. On est bloqué, on subit la punition. Et cela est loin d’être rare.

Dragon punch

Pour se donner de la profondeur, le jeu fait illusion avec un système de magie qui se présente comme la partie combats à mains nues : on dispose d’items que l’on prête à tour de rôle aux personnages pour qu’ils puissent disposer de telle ou telle attaque. Plus on l’utilise, plus le personnage la maîtrise. Merveilleux, mais au final ça n’apporte rien de plus une fois assimilé. Les magies élémentaires sont représentées par des couleurs. Autour de l’arène de combat, elles s’affichent pour indiquer que l’on peut maximiser les dégâts d’une attaque durant ce laps de temps. Bien sûr, chaque personnage à des affinités élémentaires qui lui sont propres (même si on ne le ressent pas). Dans les faits, on peut spammer comme un porc à distance en abusant du système.

Le nom des items est parfois très recherché

S’ajoutent à cela quelques autres “finesses” comme la possibilité de programmer les soutiens alliés, la présence de consommables, des équipements,... tout est là mais rien ne fonctionne vraiment. On y croit quelques instants avant de se rendre à l’évidence : les combats sont brouillons et frustrants. Pire, ils sont mals équilibrés et le fait de ne pas pouvoir connaître le niveau des ennemis que l’on engage à l’avance n’arrange pas les choses. Difficile de prendre du plaisir avec un système aussi boiteux.

Un RPG Adibou’d’ficelle

Fichtre, une faille temporelle

Que reste-t-il alors à Shiness pour faire plaisir à son joueur ? Et bien n’attendez pas non plus que la partie technique vienne relever le niveau, elle aussi est complètement aux fraises. Il n’est pas question de grosses chutes de framerate ou d’aliasing insupportable mais plutôt de graphismes très simplistes (même pour du cel-shading), de soucis de scripts et de comportements étranges.

Les textures ne sont pas très propres et les décors semblent taillés grossièrement à la serpe. En plus de cela, on se retrouve constamment face à des murs invisibles et des bugs de collision assez improbables. Il est même possible de marcher sur l’eau, ce qui ne s’était pas vu depuis Jésus de Nazareth au moins. Et que dire de ce moment de gêne où, regardant une mare d’eau depuis une certaine hauteur, on a voulu y plonger heureux de ne pas se confronter à un mur invisible pour trouver pire : un écran noir suivi d’un retour à notre point de départ. Certes, cela n’a rien de grave sur le plan graphique mais toutes ces choses finissent par sauter aux yeux en plus de cette réalisation digne d’un mauvais jeu Xbox ou de 360 en début de vie.

Parfois, c’est un peu plus joli

On relèvera aussi ces personnages perdus dans la bataille qui reviennent à la vie sans PV ou full-life à la fin d’un combat de manière aléatoire, des ennemis qui tombent dans le vide pour y mourir une fois sur deux, ... Mais le plus insupportable de tout est la gestion de la caméra dans les arènes. On perd souvent de vue notre personnage lorsqu’elle sautille dans un sens ou dans l’autre sans raison, ou se coince dans des éléments de décor. S’il est déjà assez difficile d’esquiver les coups, sans les voir arriver c’est encore moins réalisable. À noter également que le jeu est sujet à des freezes et qu’il ne m’a pas été possible de le finir à cause d’un script foireux. L’idée de revenir en arrière de plusieurs heures (sur la quinzaine déjà effectuée) dans ma sauvegarde pour voir s’il se produisait à nouveau m’était trop douloureuse.

Le manque de finition est aussi visible dans les dialogues. Si le jeu propose rapidement des choix de question/réponse, il tourne des fois en boucle à répéter les mêmes phrases en virant les autres choix possibles, obligeant à écouter plusieurs fois quelque chose jusqu’à ce que les autres possibilités reviennent. Oui, le manque de moyen se fait sentir jusque là.

Les loadings permettent de profiter des artworks

Un dernier mot sur la direction artistique pour clôturer ce long test. C’est bien la seule chose qui pourrait un tant soit peu plaire car il n’est ici question que de goûts. Personnellement, je n’ai pas du tout adhéré. Il m’a suffit de voir apparaître Kayenne, cet étrange mix entre Sonic et San Goku en mode super Saiyan pour m’étouffer. Le jeu s’inspire avant tout de la culture manga de la jeunesse perdue de la génération Club Dorothée ou de shõnens à la Naruto. À noter qu’il se place dans un projet cross-media et qu’il existe un court manga. D’ailleurs, les scènes cinématiques du jeu, par souci d’économie et pour coller à cet aspect, se présentent sous la forme de cases animées.

Bilan

On a aimé :
  • L’impression d’un univers riche
  • Moins de 30€
  • Beaucoup de bonnes idées...
On a moins aimé :
  • ...très mal réalisées
  • De grosses tares techniques
  • Des combats brouillons
  • L’exploration sans saveur
  • Difficile de se sentir impliqué dans l’histoire
Une lumière terne

Shiness propose un dilemme à ses potentiels acquéreurs : acheter militant pour soutenir un studio indépendant français ou l’ignorer pour s’éviter du tracas. Le jeu nous rappelle amèrement que la barrière entre indépendant et amateur peut être très floue. Avec toutes ses tares techniques -qu’il s’agisse de mauvaises finitions par manque de compétence ou de choix délibérés dus au budget limité- le jeu du studio Enigami sombre définitivement en se noyant dans des clichés du genre et des travers de petit projet qui voyait trop grand. Là où sa longue gestation aurait pu lui permettre de briller avec un univers riche et lui attirer un certain capital sympathie de la part des joueurs, il n’est au final qu’un jeu très très moyen que l’on parcourt sans passion. Il est donc difficile de le conseiller et ce malgré tout l’amour qui a été mis dans son développement.

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Shiness : The Lightning Kingdom

PEGI 0

Genre : Action RPG

Éditeur : Focus Home Interactive

Développeur : Enigami

Date de sortie : 18/04/2017

3 reactions

Elawe

24 avr 2017 @ 14:11

Petite coquille dans le descriptif au bas de la page : le développeur n’est pas « Focus Home Interactive » mais « Enigami ».

:-)

Eboux

24 avr 2017 @ 14:14

Fiche corrigée, merci :)

Elawe

24 avr 2017 @ 14:23

Pour la caméra aux fraises en combat j’ai, en partie, corrigé le problème : j’ai enlevé le lock-on dans les options (je suis sur PC mais j’ose espérer que l’option existe sur consoles). Et d’un seul coup c’est bien plus agréable.