Revenons un petit peu en 1986 et pénétrons dans l’atmosphère enfumée et bruyante d’une salle d’arcade de l’époque. Au fond de cette dernière on pouvait facilement trouver une borne de Wonder Boy. Edité par Sega, Wonder Boy était un jeu de plateforme à défilement automatique, une sorte de run-game d’aujourd’hui en somme, qui eut suffisamment de succès pour être porté sur les consoles et ordinateurs de l’époque, et surtout connaître l’avènement d’une suite. Et quelle suite. Wonder Boy in Monsterland laissa de côté le défilement automatique pour proposer un jeu d’action/aventure vu de côté qui allait faire entrer la série dans la légende du jeu vidéo. Wonder Boy : The Dragon’s Trap en est le troisième épisode, sur sept, et l’un des plus appréciés. Des développeurs français de Lizardcube, fous amoureux du jeu d’origine, et aidés par l’éditeur DotEmu, nous offrent aujourd’hui un remake splendide. C’est le moment ou jamais de découvrir ou de redécouvrir un jeu merveilleux.
L’Action/Aventure avec deux grands A
L’histoire reprend au moment ou celle de Wonder Boy 2 se finit. À la fin du combat homérique livré contre le dragon Mécha, Hu-Man pensait enfin goûter à un repos bien mérité. Hélas, le terrible dragon, dans son râle d’agonie, lâche une malédiction contre son vainqueur et voilà notre héro transformé lui-même en dragon. Pour retrouver sa forme originelle, il devra à nouveau partir à l’aventure et tuer les dragons qui hantent encore le royaume. Seul petit bémol, ils réservent eux aussi au héro leur propre malédiction…
Wonder Boy : The Dragon’s Trap reprend non seulement la suite de l’histoire de Wonder Boy 2 mais aussi son gameplay et ses mécaniques de jeu : un bouton d’attaque, un bouton de saut, un autre pour utiliser les objets magiques, et le bouclier est toujours automatique. Pour le reste on retrouve ce savant et délicieux mélange de plateforme, d’action et d’aventure avec de multiples secrets, la possibilité d’augmenter son énergie en trouvant des réceptacles de coeur et bien sûr l’achat de nouvelles armures, armes et boucliers dans les boutiques du jeu. Le nerf de la guerre sera de trouver ces boutiques et de récolter suffisamment d’or en tuant des monstres ou dans des coffres afin de garnir notre armurerie. L’aventure est assez linéaire (et courte, comptez 4-5 heures, voire plus pour tout découvrir, voire moins pour les vieux joueurs ce qui est normal pour un jeu de l’époque) mais on sera amené à revenir dans des niveaux déjà visités pour accéder à certains secrets, ou acheter ce qui était hors budget lors d’une première visite.
Le cœur du jeu est toutefois situé dans la grosse nouveauté et l’originalité de ce Wonder Boy 3 : les transformations successives de Hu-Man. À chaque dragon occis, le pauvre garçon (ou fille, avec Hu-Girl, ce qui est une petite nouveauté du remake) va se trouver transformé en un nouvel animal doté de ses propres capacités et faiblesses. Le Dragon, forme initiale, n’a pas de bouclier mais possède une attaque dotée d’une grande portée, et a la possibilité de se baisser. La Souris est très petite et esquive la plupart des attaques adverses, et peut se coller à un certain type de mur. L’Aigle peut voler mais ne supporte pas l’eau. Le Piranha peut nager et enfin le Lion possède une attaque en arc de cercle bien utile. Attention toutefois, on ne peut pas changer de forme à la volée (sauf en découvrant une arme particulièrement bien cachée dans le jeu mais chut !), pour cela il faudra découvrir et se rendre dans des salles spécifiques plus loin dans le jeu. Autre petit détail et pas des moindres, chaque armure, arme et bouclier ont leur propre efficacité suivant la forme de Hu-Man. Un bouclier doté d’une défense ridicule pour le Piranha peut être bien meilleur pour l’Aigle ! Le jeu n’incite pas aux économies et pousse le joueur à de petites séances de collecte d’argent, ce qui permettra aussi de refaire le stock d’objets spéciaux comme les boules de feu, les éclairs, les flèches, les boomerangs et les tornades. Des objets qui sortiront souvent Hu-Man de situations particulièrement délicates.
Un amour de jeunesse
Lorsque l’on est amoureux, on magnifie l’objet du désir, et les développeurs de ce remake sont particulièrement amoureux de Wonder Boy 3. La réalisation, tout en gardant le gameplay de l’original, est une véritable pépite artistique. Le rendu BD aux couleurs pastel est magnifique et rend le jeu tout aussi plaisant à jouer qu’agréable à regarder. Chaque sprite a bénéficié d’un lifting total en tout point remarquable et dans le respect total du jeu originel. Les décors sont eux aussi magnifiques et renforcent le côté épique de l’aventure. Les musiques ont été réorchestrées avec le même souci de respect et de qualité. Ce remake est véritablement remarquable. Pour un ancien joueur, redécouvrir le jeu ainsi est un régal, avec en prime la possibilité de passer d’une simple pression de gâchette au jeu originel de la Master System, et même de choisir en passant dans le options si on souhaite conserver la musique 8-bits et/ou les bruitages. Les développeurs ont même poussé le vice jusqu’à permettre d’utiliser les vieux codes qui faisaient office de sauvegarde dans la version originale. Si on a toujours ces codes griffonnés sur un vieux papier dans le boîtier de la cartouche Master System de notre grenier, il est temps de la ressortir !
Les développeurs ne se sont toutefois pas contentés de ressortir une copie magnifiée de Wonder Boy : The Dragon’s Trap sur nos consoles, ils y ont apporté quelques ajustements, à commencer par 3 modes de difficulté. Le mode facile permet aux plus jeunes de découvrir le jeu sans heurts, malgré une difficulté toujours aussi relevée par moments. Dans ce dernier on dispose de continues infinis et d’une résistance accrue. Le mode normal présente des monstres plus résistants pour un challenge proche du jeu d’origine, et enfin le mode difficile qui ajoute en prime un temps limité pour finir chaque niveau (un petit sablier apparaît et nous fait perdre une moitié de cœur à chaque fois qu’il se vide). Les autres nouveautés sont plus subtiles, comme celle concernant l’épée de Tasmanie et son pouvoir spécial qui nécessitait d’appuyer sur le second pad de la version d’origine, possibilité évidemment remplacée et simplifiée désormais. La dernière concerne les pierres de charme, pierre spéciales nécessaires à certains secrets du jeu, qui maintenant ne se collectent plus que via de nouveaux donjons secrets (au nombre de six !) particulièrement retors et cachés ! Pour finir les développeurs nous offrent toute une série d’artworks, de croquis du making off et de petites vidéos sur le travail de réorchestration à débloquer au fur et à mesure de notre avancée dans le jeu. De quoi garder le sourire un long moment.