Avec l’excellente compilation Rare, certains ont pu découvrir ou se plonger avec joie dans les deux premiers Banjo-Kazooie sortis sur N64 à l’époque. Playtonic Games, studio fondé par des anciens de l’équipe de développement originelle, a sûrement été rassuré par le succès d’estime de la compilation, en plus de sa campagne Kickstater fulgurante, et nous propose enfin leur suite spirituelle : Yooka-Laylee. Seulement, est-ce que la recette fonctionne toujours presque 20 ans plus tard ?
Buddy game à l’ancienne
Tout commence lorsque notre duo de héros, Yooka le caméléon et Laylee la chauve-souris, se font voler un livre magique. Voler, dans le sens où celui-ci s’envole vers un énorme bâtiment industriel, lui comme tous les livres du pays coloré où ils vivent. Cette situation scandaleuse, on la doit à Capital B et son larbin Dr. Quack, une vraie tête de canard, qui se sont dit que ça serait bien comme plan pour mieux contrôler les masses ou un truc dans le genre. Bien sûr, comme il s’agit d’un monde imaginaire, la disparition des livres devient un drame suffisant pour animer les coeurs vaillants de nos héros et les motiver à partir à l’aventure. Dans la vraie vie, tout le monde s’en serait foutu, bien sûr.
Ce prétexte suffira au moins au joueur pour explorer les 5 mondes proposés ainsi que le hub du jeu, et y collecter les Pagies, ces pages de leur livre magique qui se sont arrachées et dispersées un peu partout. Celles-ci sont censées leur apporter de la force pour affronter le boss mais, bien sûr, il ne s’agit que d’un prétexte à la collectionnite. Quoi qu’il en soit, pour pouvoir affronter le boss de fin, il vous faudra en posséder au moins 100, c’est comme ça, ne cherchez pas à rationaliser un jeu de plate-forme. À l’instar des tribulations de Banjo et Kazooie, il n’y a pas qu’un seul objet important à collecter dans tout le jeu mais une multitude. Qu’il s’agisse des plumes, des Spectrauteurs (des fantômes, oui), des pièces d’arcade ou des items permettant de booster la barre de vie et d’énergie du joueur, il y aura de quoi faire.
Nostalgie FM
Le jeu propose, comme dit plus haut, un hub qu’il faut explorer de fond en comble afin de trouver les accès aux niveaux ainsi que des raccourcis cachés un peu partout. S’il est linéaire mais assez vaste, il représente déjà assez bien la qualité du level-design des niveaux. Le travail réalisé sur ce point est la plus grande force du jeu, indéniablement. Il y a des recoins partout, des choses cachées devant lesquelles on peut passer moult fois sans s’en rendre compte. On arrive même à se promener dans des sections du décor en se demandant si c’est normal d’arriver à atteindre cet endroit, ou si c’est volontaire et que l’on va y trouver quelque chose. Du très bon travail, même si on n’échappe pas à quelques soucis de collisions et des murs invisibles de-ci de-là. Il faut dire que les niveaux sont très vastes, surtout lorsque l’on débloque, moyennant quelques Pagies, leurs versions étendues contenant encore plus de défis et items à collecter, alors il fallait bien y placer des limites. On regrettera peut-être la mise en retrait du côté metroidvania où il faut revenir dans les précédents niveaux avec des pouvoirs obtenus en cours de route pour trouver de nouveaux passages. Il y a bien quelques défis qui utilisent ce principe mais trop peu au final. Plus dommageable dans le plaisir de parcourir les niveaux, la capacité de voler est une plaie car en plus d’être peu précise, elle ruine presque le principe d’exploration et certaines phases de plateforme.
Pour le reste, il est difficile de s’enthousiasmer pleinement. La recette n’a pas changé d’un iota et reprend les mêmes qualités et défauts qu’à l’époque tout en embarquant quelques tares supplémentaires. La première, et pas des moindres, étant le manque d’affection que l’on peut ressentir pour les personnages. Il faut dire que le duo et les personnages secondaires sont loin d’égaler ceux de Banjo-Kazooie. Non seulement ils sont assez moches - un caddie avec des yeux en guise de personnage, sérieusement ? - mais en plus ils s’essaient tous à un humour des plus lourdingues et souvent vaseux qui tombe à plat. Les dialogues à base d’onomatopées et cris d’animaux deviennent alors vite stressant et on cherche rapidement à les passer, en vain.
La deuxième vient des environnements proposés. Si le premier niveau rappelle avec joie la plaine du début de Banjo-Kazooie, par la suite on a de quoi rester sur sa faim, les deux derniers étant particulièrement ennuyeux et pas folichons. 2 sur 5, ça fait beaucoup quand même. En plus de cela, les défis qui sont disséminés un peu partout ne sont pas franchement originaux, voire même pas très bien ficelés. La faute au gameplay un peu flottant que l’on ne pardonne plus trop à notre époque et aux soucis de caméra parfois rageants. La moindre des choses aurait été d’assouplir un peu tout ça et de proposer un gameplay dans l’air du temps et mieux pensé. Bon, soit, on peut encore s’en accommoder mais il y a des moments où l’on ragera vraiment, comme dans l’interminable combat contre le boss final. Que dire aussi du retour des Quizz absolument dispensables qui irritent plus qu’autre chose, et qui sont nécessaires dans la progression afin d’accéder à d’autres sections du hub. Des petits soucis de finition ici et là et des idées foireuses qui viennent donc gâcher un peu le plaisir, tout comme ce framerate pas bien stable.
À noter, pour ceux qui veulent varier les plaisirs et s’amuser avec leurs amis, que le jeu propose des jeux “arcades” en guise de multijoueur. Malheureusement, on ne peut pas dire que la qualité soit au rendez-vous puisque le gameplay est en général trop permissif ou foireux pour que le premier venu y trouve son compte. D’autant plus qu’ils sont loins d’être innovants et que, pour le coup, la compilation Rare Replay fait bien mieux le taf pour distraire des nostalgiques de l’arcade et des productions du studio Rare. Dommage, l’intention était bonne.
En tant que jeu hommage, on reste finalement un peu sur sa faim avec ce Yooka-Laylee. La recette est appliquée à la lettre, ça, il n’y a pas de soucis là-dessus, mais il manque vraiment la petite touche de magie qui faisait le sel de la licence. La touche Rare en quelque sorte. On a l’impression que l’on peut sortir une checklist et cocher toutes les lignes constituées des choses qui plaisaient à l’époque et qui ont fait le succès de la licence, mais la mayonnaise ne prend jamais vraiment, à l’image de l’OST, certes qualitative, qui reprend le style mais ne parvient jamais à se démarquer pour étonner le joueur. En tout cas, le contenu est copieux et l’aventure est assez longue (comptez une vingtaine d’heures) même sans vouloir tout compléter, chose ardue pour qui s’y attèlera.