Test - The Witness

«Témoin que rien» , - 2 réaction(s)

Ne vous est-il jamais arrivé de vous réveiller mais douter, durant un court instant, de l’être vraiment ? Perdu dans une torpeur plus lourde qu’à l’accoutumée, encore hanté par les images et les impressions du rêve tout juste quitté, ne plus savoir réellement si vos yeux sont encore fermés ou ouverts sur la réalité ? The Witness débute sur un réveil. Un réveil étrange pour le dormeur vu qu’il se retrouve non pas dans la chaleur et le réconfort de ses draps mais dans l’obscurité étrange et froide d’un tunnel sans nulle autre possibilité que de rejoindre le bout de celui-ci, éclairé, se terminant par une porte et ne s’ouvrant qu’après la résolution d’un puzzle tout bête, nécessitant d’amener une boule d’énergie au bout d’une ligne. Le premier d’une longue, longue liste. Le premier auquel le dormeur sera confronté sur l’île étrange où il s’est réveillé avec pour seul et unique but de pouvoir s’en échapper et de voir quel rôle vous souhaitez endosser : celui de simple spectateur ou celui de témoin ?

Si le jeu vidéo est une œuvre d’art…

L’île de The Witness regorge de puzzles et de secrets

Jonathan Blow est entré, avec un seul jeu, par la grande porte du monde du jeu vidéo. Braid a été, et reste encore aujourd’hui,un petit bijou, une œuvre à part dans un média encore trop immature. Ce mix entre jeu de plate-forme et jeu de puzzle s’impose par lui-même comme une œuvre d’art à part entière, tant sur la vision qu’il propose, sur l’excellence de sa finition, sur sa beauté artistique et sonore que sur l’interprétation, libre, que peut lui donner le joueur. Jonathan Blow ne s’est pas contenté de créer un simple jeu, il a partagé avec le joueur sa vision du média, sa sensibilité, sa personnalité et le soin maniaque apporté à sa réalisation/confection.

Jonathan Blow nous offre son second jeu, The Witness, ..., qui montre une fois de plus que le jeu vidéo peut très bien être qualifié d’œuvre d’art à part entière

Près de huit ans plus tard, Jonathan Blow nous offre son second jeu, The Witness, un jeu de puzzle à la première personne qui montre une fois de plus que le jeu vidéo peut très bien être qualifié d’œuvre d’art à part entière et même se targuer de compter en son sein quelques chefs d’œuvres intemporels comme on peut en déceler dans la littérature ou le cinéma.

Un principe de puzzle simple qui se décline tout au long de notre avancée

Pourquoi se réveille-t-on sur une île déserte ? Pourquoi cette île est elle remplie de puzzles ? Quelle est son histoire, quel est son rôle, quel est notre rôle ? Dans The Witness, mieux vaut éviter de se poser les traditionnelles questions qui accompagnent le déroulement traditionnel d’un jeu narratif car The Witness n’est tout simplement pas un jeu narratif. Pas d’histoire, pas d’intrigue, pas de réponses et pourtant qu’il est plaisant de se perdre et de découvrir tous les recoins de l’île ! Sans jeu de mot, quoique, The Witness est un jeu contemplatif, il incite même le joueur à endosser pleinement son rôle de spectateur, mais pas celui d’un spectateur passif mais plutôt actif, curieux, sans cesse aux aguets. On n’arpente pas les chemins et les différents paysages de l’île, ô combien nombreux et somptueux, au pas de course sous peine de louper des moments magiques, poétiques, des énigmes cachées ou même pouvoir simplement résoudre l’un des nombreux panneaux/puzzle disséminés dans le moindre de ses recoins.

L’île regorge d’illusions d’optique comme celle-là

Se perdre dans l’île est comme se perdre dans un tableau impressionniste. The Witness est l’un des plus beaux jeux auxquels il m’ait été donné de jouer, tout simplement. Sans aucune esbroufe technique, la qualité intrinsèque de son panel de couleur, de son parti pris esthétique, de l’ingéniosité et le soin maniaque apporté à sa conception, l’île enchaîne les paysages somptueux, reposants, hypnotiques. On ne peut s’empêcher de s’extasier sur ses ambiances, de sa forêt de bambous, au sable fin de son désert, des couleurs éclatantes de son marais et des fleurs qui le composent, de sa forêt automnale bardée d’orange et de pourpre, jusqu’à son lac central où se reflètent glycine, nuages et cyprès. The Witness est une véritable mine à fond d’écran et on ne peut s’empêcher de capturer çà et là des moments de grâce ou l’une des nombreuses illusions en trompe l’œil que cache l’île : des branches d’un arbre mort qui dessinent le visage d’un vieil homme, à des tôles décharnées dont l’ombre portée fait naître le profil d’un ange au repos. Mais la contemplation n’est pas la seule motivation à nos promenades, de nombreuses énigmes sont cachées à même l’environnement, elles nécessitent généralement des points de vue particuliers pour parvenir, en trompe l’œil, à amener une boule d’énergie dont le départ est un cercle parfait à la fin d’un parcours de même couleur, même ton que celui du cercle initial.

…The Witness en est un chef d’œuvre

Des statues de personnages figés sont les seuls compagnons de votre périple

Beau, The Witness l’est à en pleurer, c’est certes un jeu contemplatif mais avant tout un jeu de puzzle. L’intégralité des puzzles que l’on aura à résoudre se résume à un seul type : sur un écran, on trouve une grille, plus ou moins grande, plus ou moins complexe, cette grille dispose d’un point d’entrée et d’un point de sortie, on devra juste amener un flux lumineux de l’entrée à la sortie. Tout en sachant que le flux ne peut pas se recouper. Les quelque 500 puzzles que l’on trouve dans le jeu ne sont que de multiples variantes de ce postulat de départ, des variantes aussi géniales que surprenantes, misant sur l’apprentissage et la découverte de nouvelles règles par le joueur, chaque paysage de l’île en introduisant une nouvelle jusqu’à toutes les mêler lors de la dernière ligne droite. Ces variations peuvent aussi bien faire jouer l’environnement proche, le soleil, les sons environnants que simplement coupler ou séparer des éléments présents sur la grille.

Des énigmes se cachent dans l’environnement

L’ingéniosité des variantes est tout simplement incroyable et The Witness parvient sans cesse à surprendre le joueur tout en mettant ses neurones à contribution. Et c’est peu de le dire, tant les énigmes peuvent être particulièrement ardues suivant votre faculté d’adaptation ou si vous vous retrouvez confronté à certaines faiblesses de votre logique (association de couleurs, vision dans l’espace, défragmentation de silhouettes etc.). Il est clairement conseillé de prendre son temps et de ne pas hésiter à lâcher une énigme afin d’y revenir par la suite, voire de faire appel à des membres de la famille ou des amis pour nous aiguiller sur d’éventuelles possibilités que l’on avait tout simplement pas vues. Malgré les énormes variations qu’il propose The Witness n’évite pas l’écueil de la répétitivité qui s’invite essentiellement vers la fin du jeu et notamment dans la gigantesque caverne optionnelle. Une petite pause pourra être, dans ce cas, salvatrice.

...libre à nous de visiter les environnements dans l’ordre que l’on souhaite...

The Witness a la bonne idée de ne pas être linéaire, libre à nous de visiter les environnements dans l’ordre que l’on souhaite même si certains nécessitent pour y entrer de résoudre une énigme dont le type est abordé ailleurs. On n’est jamais réellement « coincé » sauf peut-être à la toute fin du jeu qui arrive suivant votre sagacité après une bonne vingtaine d’heures, ce qui reste énorme pour le genre. Précisons toutefois que les joueurs daltoniens ou malentendants seront dans l’incapacité de finir le jeu sans aide extérieure.

Il ne reste plus qu’à descendre...

L’ombre de Jonathan Blow plane sans cesse sur son dernier bébé, le souci quasi-maniaque du détail et cette créativité protéiforme ne sont pas les seuls de ses démons à hanter les rives et les chemins de The Witness. Jonathan Blow assène au joueur sa passion et l’amour qu’il porte à la logique scientifique. On trouve çà et là des journaux audio très intéressants sur des réflexions de grands mathématiciens et scientifiques mais dont la teneur est loin d’être une simple vulgarisation et rend le tout assez indigeste pour peu que l’on ne soit pas déjà ouvert à cette réflexion ou simplement pas en état de se concentrer suffisamment pour en saisir toute la portée. Toute une série de vidéos, toutes aussi pointues et abruptes les unes que les autres, vient finir de nous enrichir ou de nous achever totalement laissant planer sur The Witness une portée aussi énigmatique que nébuleuse, mais c’est ce qui fait de The Witness un jeu qui ressemble tellement à son génial créateur…

Bilan

On a aimé :
  • Beau à en pleurer
  • Un jeu de puzzle long, riche et généreux
  • Grande diversité dans les énigmes
On n’a pas aimé :
  • Un discours scientifique sous jacent nébuleux et difficilement accessible
  • Une pointe de répétitivité vers la fin
Une magnifique balade intellectuelle

Un principe de puzzle simple décliné en une multitude de variantes, couplé à une balade magique, magnifique dans un cadre somptueux, voilà ce qu’est The Witness même si ce serait lui faire injure que de le restreindre seulement à ça. Car le dernier né de Jonathan Blow est bien plus qu’un simple jeu il donne au joueur un rôle de témoin, de spectateur, bien particulier, en ce sens qu’il est sans cesse mis à contribution, sans cesse stimulé. Un véritable éveil, une véritable mise en abyme de la pensée scientifique et de son rapport vis à vis de notre environnement proche. The Witness est une œuvre rare qui ne laissera certainement pas indifférent un esprit curieux et inventif capable de s’arrêter un instant apprécier un paysage et de s’extasier sur sa capacité à résoudre des puzzles complexes et mettant tous ses sens à contribution. Si le jeu vidéo est une œuvre d’art… The Witness en est un chef d’œuvre.

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The Witness

PEGI 0

Genre : Aventure/Réflexion

Éditeur : Number None Inc.

Développeur : Number None Inc.

Date de sortie : 13/09/2016

Prévu sur :

Xbox One, PlayStation 4, PC Windows

2 reactions

Spectree

29 sep 2016 @ 17:31

très frais, si j’ose dire B-)

Mattanys

29 sep 2016 @ 17:59

Fait sur PC il y a quelques temps, ce jeu est excellent ! A tous les amateurs du genre, foncez !