Test - Infinity Strash : DRAGON QUEST The Adventure of Dai - Rétro à tous les étages

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Librement inspiré par le premier jeu Dragon Quest sorti en 1986, La Grande Aventure de Dai a su trouver sa place, aussi bien auprès des fans de manga que de ceux de l’œuvre majeure du studio Enix, qui s’est longtemps opposée à armes égales à un certain Final Fantasy. Certains d’entre nous se souviennent peut-être de la série animée d’origine, diffusée sous nos latitudes en 1994, mais c’est avec le reboot complet de 2020 que les plus jeunes ont sans doute découvert cet univers à la fois épique et loufoque qui a défini les bases du J-RPG médiéval fantastique. Annoncé depuis près de deux ans et demi dans une optique cross-média aux côtés d’autres projets, Infinity Strash : DRAGON QUEST The Adventure of Dai arrive enfin sur nos consoles de salon après un parcours de développement légèrement compliqué. Entre-temps, le jeu mobile A Hero’s Bonds a tiré sa révérence en début d’année et a été remplacé par l’épisode Champions. Voyons donc si le titre ne risque pas de connaître le même destin funeste.

Grand-père Brass, raconte-moi une histoire

Baran, mystérieux chevalier moustachu à la grosse épée draconique (pour les néophytes uniquement, les vrais savent), joue ici brièvement le rôle du narrateur et reprend les éléments de lore présentés dans le trailer. Suite au refus de Dai, notre jeune héros, de s’allier à lui, la confrontation est inévitable et nous permet de prendre en main les bases du gameplay. Le duel est interrompu par un évènement pour le moins fâcheux, nous ramenant au tout début de la chronologie de l’histoire, offrant de revivre ou de découvrir l’origine de la légende.

Proposition irrecevable pour tout bon héros

Trois éléments jalonnent notre progression sur la carte du jeu : les séquences d’histoire symbolisées par un livre, qui nous content le périple de Dai et de ses amis, les quêtes d’aventure représentées par des drapeaux faisant office d’objectifs annexes et enfin les épées croisées pour les combats d’histoire, qui promettent de revivre les affrontements les plus marquants de la série.

Mettons tout de suite les pieds dans le plat : ce Infinity Strash ne sait vraiment pas sur quel pied danser et ce, à tous les niveaux. S’il s’adresse avant tout aux fans du manga et de la série en suivant scrupuleusement le scénario d’origine, il cherche également à capitaliser sur l’aura du reboot de l’anime pour amener probablement de nouveaux joueurs vers la licence. Sauf que le rythme imposé de bout en bout et les techniques employées risquent au final de ne contenter personne : les connaisseurs vont probablement laisser de côté les éléments scénaristiques connus pour aller à l’essentiel et les néophytes risquent de se perdre, tant le modèle présenté manque de pêche et de dynamisme.

Le trio se forme

Strictement linéaire dans sa progression, le titre impose ses éléments de narration via un lecteur vidéo qui ne propose bizarrement pas de séquences marquantes tirées de la série mais de simples suites de vignettes sommairement animées et recouvertes d’un filtre de film rétro sépia qui affadit complètement le rendu visuel. Lors des moments les plus dynamiques, nous bénéficions de flamboyantes mais beaucoup trop rares mises en scène intégrées avec le moteur du jeu.

Il est possible de se consoler en appréciant la qualité du doublage, mais ces saynètes traînent en longueur, surtout lorsque les protagonistes échangent les joyeusetés habituelles du genre avant de lancer leur attaque secrète ultime « à laquelle personne n’a jamais résisté ». Pis, il est impossible de se contenter de la lecture des sous-titres en appuyant sur un bouton pour accélérer ces phases. Soit l’on saute à la section suivante définie par le lecteur au risque de louper une information importante, soit l’on zappe purement et simplement toute la partie scénaristique en cours. Souvent pour se rendre compte que la partie suivante est… une autre icône de livre ! À certains moments, l’impatience de prendre enfin la manette en main devient tellement insoutenable que l’on commence à se demander si la structure même du jeu est celle d’un simple visual novel où les combats remplacent les traditionnels choix à effectuer. À ce niveau, autant regarder la série.

Souvent plus de blabla que d’action

Vous avez été frappé par la foudre

Justement, ces batailles majeures qui sont au cœur de la licence, nous mettent en situation avec un ou plusieurs personnages ainsi que quelques objets de soin imposés, soit dans un environnement de type couloir avec une série d’ennemis à défaire, soit en face-à-face contre l’antagoniste du moment. Oublions la finesse, le titre lorgne ici clairement vers le style musou (ndlr : comme la série des Dynasty Warriors, caractérisée par des combats de héros surpuissants contre des armées entières), mais sans réussir à rendre l’expérience réellement convaincante.

Ennemis d’hier, alliés d’aujourd’hui

Les ennemis sont trop peu nombreux pour soutenir la comparaison, mais compensent par une résistance aux coups accrue, avec quelques rares adversaires un peu plus imposants. Les boss, quant à eux, sont bien pénibles et n’hésitent pas à punir le joueur un peu trop confiant dans son matraquage de boutons. Leurs techniques d’attaque, surtout au corps à corps, encouragent clairement à adopter une stratégie à distance ou basée sur le hit-and-run.

Les quêtes annexes sont pour leur part complètement anecdotiques. Reprenant les environnements et ennemis de l’aventure principale, l’objectif reste rigoureusement le même : éradiquer l’engeance démoniaque qui se met en travers de notre chemin. Et ce n’est pas la limite de temps parfois requise pour gagner ou l’ersatz d’infiltration qui renouvellent l’intérêt.

Une arène, des vagues d’ennemis, la base

Au mieux, elles permettent de prendre un peu d’expérience afin d’être « à niveau » pour le combat d’histoire suivant. Les environnements n’offrent aucun secret, embranchement ou coffre à découvrir derrière un arbre ou un rocher. Quelques tonneaux et caisses sont néanmoins présents, leur destruction laissant échapper une poignée de pièces, un boost de notre barre d’ultime ou un regain de vie.

Pour distribuer généreusement les coups, notre petit Daï ainsi que ses compagnons bénéficient d’une palette de mouvements… pour le moins réduite : un combo de trois coups simples, le dernier pouvant être plus puissant s’il est exécuté avec un timing précis, trois pouvoirs spéciaux et un ultime, à choisir parmi ceux débloqués au fil de l’histoire. À cela s’ajoutent une action spéciale en fonction du personnage joué, une esquive et une parade pour faire bonne mesure. Le principal souci est qu’il est difficile d’enchaîner toutes ces actions avec grâce et élégance, car elles ne bénéficient d’aucune priorisation ; il faut attendre la fin de chaque animation pour effectuer l’action suivante. Impossible donc de lancer une furie en plein milieu d’un combo pour tenter de contrer une attaque dévastatrice de l’adversaire.

Popp réchauffe l’ambiance

Toute une partie du gameplay repose sur les parades et esquives parfaites à réaliser dans un timing serré, les premières déstabilisant l’ennemi alors que les secondes remontent notre jauge d’attaque spéciale. Tout ceci pour inciter à jouer de manière défensive, avec une précision que ne renieraient pas certains titres beaucoup plus « hardcore ».

Une parade parfaite accorde un petit bullet-time

Cela est loin d’être aisé, à plus forte raison lorsque nos compagnons contrôlés par le jeu s’en donnent à cœur joie pour courir et taper sur tout ce qui bouge à grand renfort de projectiles flashy, d’explosions et autres vagues d’énergie de toutes les couleurs, souvent au mépris de leur survie la plus élémentaire. Le tout donne une impression de rigidité mêlée de fouillis visuel pas franchement facile à gérer, surtout à haut niveau, quand les combats s’allongent et qu’il est possible de se faire mettre à terre très rapidement sans une bonne préparation et d’excellents réflexes.

Souvenirs, souvenirs, je vous retrouve dans mon coeur

Dernier élément de l’aventure et non des moindres, le Sanctuaire fait son apparition à la fin du premier chapitre de l’histoire. Sous ses faux airs de niveau bonus se cache en fait l’élément central du gameplay. Car oui, cet épisode trop fermement enchaîné à son scénario ne propose aucune des commodités qui font de la licence l’un des piliers du J-RPG : pas d’inventaire, pas d’équipement, pas de village, pas de boutique, pas d’auberge, pas de PNJ à qui parler. Rien ! Nada !

Récupération d’un nouveau souvenir

En contrepartie, le Sanctuaire nous invite à replonger dans l’ambiance des affrontements passés pour raviver nos souvenirs. Et franchement, on ne gagne pas forcément au change avec ce système.

Certaines de ces bribes de mémoire les plus basiques nous sont fournies au fil du scénario. Elles se présentent sous la forme de cartes illustrées par un détail d’une planche du manga original. Elles ne peuvent être assignées qu’à un seul membre du groupe et apportent des bonus de caractéristiques divers et variés, ainsi que des capacités passives spécifiques. Six emplacements au maximum sont progressivement activés pour chaque personnage et peuvent ainsi recevoir chacun un souvenir. Nous nous rendons rapidement compte que nous enfoncer dans les profondeurs du Sanctuaire est indispensable à nos victoires futures. Chaque chapitre de l’histoire complété débloque trois nouveaux étages au sein de cet unique donjon du jeu. Mais ici encore, point d’exploration avancée ou de trésors à trouver.

Déchaînement de fureur contre un gluant de métal

En effet, relever le défi du Sanctuaire nous place ici dans un pur gameplay roguelike, à commencer par le retour au niveau 1 de nos personnages à chacune de nos entrées, indépendamment de celui acquis dans l’histoire, qui lui n’est pas affecté. Chaque étage est composé de plusieurs arènes en enfilade. Dans chacune d’entre elles, des ennemis à tuer, bien entendu. Une fois cette tâche remplie, il faut choisir un bonus à activer uniquement pour le run en cours parmi trois selon la thématique de la salle.

Vérifier ce qui nous attend avant de passer le portail

Deux portails aléatoires apparaissent alors, ornés d’un icône indiquant la nature du bonus suivant à gagner (attaque, défense, magie et pouvoirs) et parfois de flammes violettes. C’est derrière ces sinistres failles que se cachent des boss ou mini-boss déjà rencontrés, au début seuls et en équipe par la suite. Leur défaite nous alloue plusieurs des précieux souvenirs du chapitre correspondant, d’une qualité de une à trois étoiles, tirés aléatoirement.

À la fin de chaque étage, nous pouvons soit poursuivre notre exploration au risque de tout perdre en cas de défaite, soit revenir à l’entrée en validant le butin amassé jusque là. Plus l’on avance dans l’intrigue principale, plus le Sanctuaire devient profond et plus les récompenses sont généreuses. Chaque duplicata de souvenir permet d’en améliorer le niveau en investissant une monnaie cristalline spécifique au lieu. De la même manière, des gemmes récupérées augmentent légèrement la puissance de nos différentes attaques spéciales. Et… c’est tout !

C’était moi contre le monde, j’étais sûr que j’allais gagner

Oui, c’est tout. Du moins le temps de finir les chapitres de l’histoire. En résumé : énormément de séquences scénaristiques, des combats expédiés rapidement (surtout si l’on passe le jeu en mode facile, qui trivialise complètement l’expérience), des missions annexes qui n’apportent rien de probant et quelques passages au Sanctuaire histoire d’augmenter sa puissance. Un cercle pas si vertueux que cela s’impose de bout en bout. Infinity Strash est donc un petit monstre de Frankenstein tout mignon qui emprunte timidement à plusieurs genres (Visual novel, musou et roguelike) sans arriver à en faire un tout cohérent.

Le Codex permet de revoir le scénario et les souvenirs

Le Codex, l’ouvrage regroupant l’ensemble de nos exploits se remplit ainsi petit à petit au fil de notre avancée dans l’histoire et nos runs de donjon, mais n’offre bizarrement aucun élément de lore supplémentaire ni aucun bestiaire, alors que les ennemis rencontrés sont quand même suffisamment particuliers pour que l’on s’intéresse à leurs caractéristiques, génèse et design. Malgré le casting particulièrement fourni, seuls les héros principaux restent jouables (quatre, plus deux variantes), ce qui entraîne une certaine déception.

Ce n’est qu’une fois le scénario bouclé, sonnant abruptement le joueur et la fin du match, tel un uppercut vicieux, là aussi sans surprise mais quand même moult désappointement, que les objectifs réels du jeu se dévoilent. Car oui, le titre ne couvre qu’une petite moitié du manga d’origine et laisse le joueur en plan à un moment charnière de l’intrigue. Destiné aux complétistes et aux acharnés, ce contenu optionnel invite à finir de rassembler tous les souvenirs du jeu, explorer patiemment l’intégralité du Sanctuaire à la difficulté exponentielle et venir à bout d’un mode supplémentaire particulièrement punitif. Si cette organisation de la progression en deux temps permet à tout un chacun de profiter sans entrave de l’histoire pour ensuite éventuellement relever de vrais défis bien corsés, seuls ceux qui auront été séduits par la proposition de base persisteront dans l’aventure.

Bien choisir ses souvenirs pour gagner en puissance

D’un point de vue technique, rien à redire, les graphismes très colorés rendent bien hommage à l’univers et offrent de fort dynamiques passages, particulièrement lors du lancement des différents pouvoirs ultimes de nos héros. L’animation ne souffre d’aucun ralentissement, mais aujourd’hui, les nombreuses adaptations d’anime à succès savent retranscrire parfaitement ces différents univers avec une grande fidélité. Les dialogues sont de qualité, et pour cause, car ce sont les doubleurs de la série qui prêtent leur voix aux personnages, autant en version japonaise qu’anglaise. Les thèmes musicaux qui ponctuent l’aventure collent bien à l’ambiance sans être pour autant mémorables. Mais il est difficile de se départir de cette impression que sans le support visuel et scénaristique de la licence, le jeu serait complètement anecdotique.

Testé sur Xbox Series X

Bilan

On a aimé :
  • La chronologie de l’oeuvre respectée
  • Graphiquement réussi
  • Le doublage de la série
  • Les défis du endgame
On n’a pas aimé :
  • La narration mal intégrée
  • Les combats à la fois rigides et chaotiques
  • Ni RPG, ni musou
  • Une moitié d’histoire
  • L’équilibrage de la difficulté
  • Un simple « habillage » Dragon Quest
Omae wa makeda !!! (Tu as perdu !)

Tel une canniboîte facétieuse, Infinity Strash : DRAGON QUEST The Adventure of Dai sait comment nous appâter pour mieux nous mordre le derrière. La promesse de revivre les pérégrinations de Dai et ses amis est partiellement remplie, mais plombée par une narration envahissante transformant le joueur en simple spectateur, chose dont les connaisseurs pourront se passer mais qui risque d’ennuyer tout le monde par son format contraignant. Le gameplay de combat manque d’ambition, en proposant quelque chose de moins complet et agréable à jouer que d’autres titres du genre, même estampillés Dragon Quest. Reste donc cet esprit roguelike lié à la collection des souvenirs qui est ici à la fois relativement léger dans son offre, d’un équilibrage douteux et surtout en rupture avec l’esprit de la licence : celle de la montée en puissance progressive des personnages au fil de confrontations épiques. En définitive, Infinity Strash n’est pas complètement à côté de la plaque, mais le titre manque quand même largement son objectif de pérenniser la légende, au moins d’une bonne longueur de dragon.

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Infinity Strash : DRAGON QUEST The Adventure of Dai

PEGI 12

Genre : Action RPG

Éditeur : Square Enix

Développeur : Square Enix

Date de sortie : 28/09/2023

Prévu sur :

Xbox Series X/S, PlayStation 5, PlayStation 4, PC Windows, Nintendo Switch

2 reactions

Battosai

04 oct 2023 @ 12:42

Faut reconnaître c’est pas la réussite de l’année, mais les vieux fan comme moi aimeront quand même le faire, rien que pour revoir l’histoire, malgré son gameplay très vide, pas de lore, pas de recherches, rien... Il y a beau avoir la garde parfaite ou l’esquive parfaite, les combats restent très fade... Dommage il y avait la possibilité d’en faire un grand rpg mais non fallait gâcher un grand nom une fois de plus.. Jeu destiné aux nostalgique qui ont 60€ en trop 😅

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Saitamouss

04 oct 2023 @ 13:39

@Battosai ne perd pas ton âme d’enfant 🟦👍