Un survival Canada Dry
Devenir une survivante... Voilà le but ultime qu’atteindra Lara au bout de ce long grand huit (comptez un peu plus de 15 heures de jeu pour tout faire) et voilà l’axe sur lequel essaye de se construire le jeu. Pour atteindre ce but rien ne lui sera épargné, aussi bien physiquement que mentalement. Lara en prend plein les gencives dès le début du jeu avec un ventre transpercé, une cheville cassée, des côtes fêlées et j’en passe. Crystal Dynamics fait subir le pire (enfin pas tout à fait quand même) à son héroine, allant même jusqu’à proposer des animations spéciales particulièrement gore lorsque qu’elle meurt sous les coups d’un Solarii ou lorsqu’elle loupe un QTE. Vu que ces blessures n’ont aucune incidence sur le gameplay (sauf lorsque la narration l’exige à un moment précis), on se demande pourquoi elles interviennent si souvent et pourquoi les morts de Lara sont montrées avec autant de complaisance. On nous répond que c’est pour souligner l’état de faiblesse de Lara, pour augmenter l’empathie du joueur envers elle, on peut en douter lorsque au détour d’un QTE, elle vient finir empalée sur une branche d’un arbre qu’elle n’a pas pu éviter.
L’explication de cet acharnement viendrait plutôt du genre cinématographique appelé “Survival”. Un genre particulièrement apprécié par les développeurs vu que Tomb Raider regorge de références, parfois grossières comme pour The Descent, parfois plus subtiles comme Délivrance. Le jeu essaye de coller au plus près du genre sans aller jusqu’à embrasser complètement ses codes et aller jusqu’au bout du concept. Alors que le “survival” au cinéma commence par une exposition des personnages, un moment où ils en prennent plein la tronche puis un passage ou ils sont poursuivis par leurs assaillant jusqu’à ce qu’ils arrivent à s’en débarrasser... ou presque.
Malgré sa classification +18, Tomb Raider préfère se complaire dans des cinématiques de mise à mort de sa guerrière plutôt que de passer par la case outrage ou violence envers le groupe de survivants. Lara est presque violée, pas ses copines qui n’ont pas eu de sex appeal suffisant pour les dégénérés Solarii qui fourmillent sur l’île. Alors que les Solarii font preuve d’une violence ahurissante envers Lara pour essayer de la tuer, ils préfèrent capturer ses collègues sans violence etc. etc. Le manque de cohérence et de jusqu’au boutisme nuit réellement à la cohésion de l’ensemble qui jouit pourtant d’une ambiance franchement réussie.
Pourtant tout avait très bien commencé, avec une Lara meurtrie, transie par le froid qui ne cherche qu’à manger et à se réchauffer. La découverte de l’arc est un premier pas vers ce que l’on pense être un véritable trip survie où l’on devra prendre soin de Lara, la réchauffer, la sustenter, la préserver. Mais finalement on déchante vite. Tuer un animal ne rapportera que des Composants et des points d’expérience pour accroître les aptitudes de Lara, simplement, sobrement mais efficacement. Le gain d’expérience traduit bien son évolution physique même si cela la transforme trop rapidement en machine à tuer, capable de tuer de sang froid un Solarii à grand coup de piolet dans la tête. Les Composants quand à eux serviront pour améliorer son arsenal. Dans l’île tout rapporte des Composants, nom générique donné à ces éléments que l’on retrouve partout et qui servent à tout.
Cette partie chasse, même si elle participe pleinement à l’ambiance magnifique du jeu, ne sert pas à grand chose. On peut en dire autant sur la détresse et la vulnérabilité physique de Lara qui n’entre en jeu que lorsque le jeu le demande, un passage obligé sans grande incidence et parfois maladroit. Les développeurs peuvent rire du short moulant et de la brassière de la première Lara en plein Himalaya, on peut de notre côté se demander comment leur nouvelle Lara peut rester en débardeur sans prendre la peine de récupérer un blouson sur l’un des 350 Solari qu’elle aura à occire durant son périple. Un détail certes qui ne nuit pas au plaisir qu’arrive à procurer le jeu, par sa mise en scène dynamique et spectaculaire, la variété des situations qu’il propose et le formidable rythme qu’il parvient à distiller.
Lara sous assistance
Si les anciennes Lara étaient exigeantes, raides, pointilleuses, la nouvelle est plutôt facile. Le jeu favorise l’action et la mise en scène. Un soin tout particulier a été apporté aux animations de Lara, un soin du détail tout particulier avec de nombreuses animations contextuelles qui se déclencheront automatiquement. Lara passe à côté d’une vague qui va s’écraser sur la roche ? Elle lèvera les bras pour se protéger des embruns. Le couloir qu’elle emprunte est étroit ? Elle glissera sur le côté en caressant la roche de sa paume. Le jeu prend un malin plaisir à nous prendre par la main, continuellement, parfois imperceptiblement, parfois obligatoirement. Vous ne voulez pas descendre tout de suite dans ce trou alors que rien ne vous y presse ? Pas de chance, vous serez bloqué avec aucune autre alternative. Vous ne voulez pas encore monter à cette échelle ? Inutile d’essayer de descendre Lara ne pourra pas quitter ce premier barreau à moins de vous décidez à monter. Un endroit semble trop sombre ? Lara sortira elle même sa torche et marchera lentement pour assurer ses pas.
Cette “surenchère d’assistance” est présente partout. Les sauts des précédents Tomb Raider étaient exigeants, millimétrés, dans la nouvelle génération il vous sera impossible d’en louper un seul. Sauf en n’étant suffisamment prompt sur le QTE qui suit. En matière de galipettes, Lara fait presque tout à votre place, arrivant à être encore plus permissive que ce vil Nathan Drake, d’Uncharted qui montre plus que jamais son influence, surtout si l’on regarde du côté des séquences de tir même si l’ambiance de celles-ci vous feront aussi penser à du Resident Evil nouvelle génération. Toujours très souples, les séquences de tir, verront Lara automatiquement se saisir de son arme et se mettre à couvert. Un système d’esquive assez jouissif permettra même à Lara de viser automatiquement son adversaire après une roulade réussie. La maniabilité assistée est souple, très souple et ne frustre jamais lorsqu’elle nous laisse les commandes.
Les combats même si ils manquent un peu de nervosité sont vraiment bien dynamiques et maîtrisés. On regrettera juste l’IA des adversaires assez catastrophique pour quiconque cherchant un peu de challenge dans les affrontements. Il suffira d’un peu de patience pour éliminer chaque adversaire à bout portant avec son fusil à pompe lorsqu’ils daigneront les uns après les autres montrer le bout de leur nez et ce quel que soit le niveau de difficulté choisi parmi les deux proposés au début. Tomb Raider réussi vraiment son coup dans les différentes approches qu’il propose dans les séquences d’action, les environnements offrent suffisamment de possibilités pour se débarrasser en toute discrétion des assaillants de Lara. Les passages sont nombreux et il est parfois possible de passer sans tuer quiconque en choisissant bien son itinéraire. Si vous avez du mal à vous repérer dans l’espace ne vous inquiétez pas car Lara possède maintenant un don appelé Instinct de Survie qui d’une simple pression sur le bouton de tranche mettra en sur-brillance chaque élément interactif du décors, chaque objet à récupérer et les adversaires, animaux présents dans votre champ de vision. La carte du lieu disponible à tout moment se mettra elle même à jour en indiquant où se trouvent les éléments à récupérer. On peut même y placer un repère qui rendra plus facile la chasse au trésor ce qui résumera à l’usage l’exploration à un simple jeu de piste entre les différents trésors, objets et reliques (dont certains sont identiques mis à part la texture). Certains devront toutefois attendre que Lara tombe sur un équipement spécial pour pouvoir y accéder...