Est-il encore nécessaire de présenter Milestone, ce studio italien qui ne cesse de grandir en enchaînant les sorties de jeux de sports mécaniques à tour de bras ? Jusqu’à présent indépendant, le studio vient tout juste d’être racheté par THQ Nordic, annonçant par la même occasion 3 nouvelles IP d’ici 2021 en plus des suites de leurs licences phares. MXGP 2019 est d’ailleurs l’une de ces dernières. Cette année, la franchise choisit de se concentrer sur le championnat en cours plutôt que celui de l’an dernier. En résulte donc une sortie un peu plus tard dans le calendrier, le temps de modéliser les pilotes, motos, teams et quelques nouveaux circuits de la saison 2019. Mais avaient-ils réellement les épaules pour ça ?
Du neuf avec du vieux
Cela fait maintenant plusieurs années que Milestone produit des jeux de motocross basés sur la licence officielle du championnat MXGP ; seulement voilà, au fil du temps et des opus rien ne changeait vraiment. Avec l’opus précédent, MXGP Pro, ils prenaient le virage d’une expérience de jeu se voulant plus authentique et “réaliste”. Le résultat était un gameplay un peu plus lent, ou chaque action était mieux décortiquée. Il fallait en effet soigner ses entrées en virage, freinages et surtout remises des gaz puisqu’avec tout ça, arrivait également une moto hyper glissante à la sortie des courbes, sans possibilité de grip, de prise d’ornières et d’appuis dans les virages extérieurs. La direction était elle aussi assez capricieuse avec un angle de braquage bien plus restreint. MXGP 2019 fait un mix entre MXGP Pro et Monster Energy Supercross 2 qui offrait lui une direction plus réactive et une plus grosse amplitude du fait des tracés serrés de supercross.
Malheureusement, on retrouve l’aspect savonnette ici, la cause venant surement d’une déformation des pistes qui n’est toujours pas assez impactante sur le pilotage. Là où de belles ornières devraient se former pour qu’on puisse s’y caler et virer à plus haute vitesse, il n’y a rien qui vient retenir la moto en glisse. Ce problème impacte directement le plaisir de jeu et les courses elles-mêmes. Prendre des appuis extérieurs à haute vitesse n’est pas vraiment possible, de même que virer court à la corde sans devoir donner un gros coup de frein arrière. On se retrouve ici avec des tracés souvent mono-trajectoire et un grip hasardeux selon la surface (circuit sablonneux, dur, boueux... ). Également plus rapide, le jeu récompense le passage en force plutôt que la finesse, et l’impossibilité de “jouer” avec le terrain trahit la limite dont la licence se rapproche avec ce genre de formule. On note également encore une fois un embrayage qui ne sert strictement à rien ; alors qu’on doit souvent s’arrêter pour virer, pouvoir relancer la moto à coup d’embrayage n’aurait pas été de refus, surtout sur les plus petites cylindrées.
Vient maintenant la question des sauts, et là, c’est encore plus compliqué. Toujours sans réelle physique en l’air, on ressent à nouveau une sorte d’emprise sur la moto qui empêche bien des choses. C’est dès les premiers tours de roues en carrière sur le circuit de Neuquén qu’on remarque vite que la moto semble aimantée au sol. S’il est vrai que par le passé on pouvait être face à un aspect un peu trop flottant une fois en l’air, ici, l’absence de réelle physique fait une nouvelle fois défaut. Vous l’aurez compris, toujours pas de whips non plus ou même de scrubs “manuels”. Bien que le système d’amortis se soit pas mal amélioré, le vrai problème réside justement dans le fait que ce soit une action prédéfinie à déclencher plutôt que le résultat d’une prise particulière de l’appel du saut. Cette absence de physique en l’air, et même, en allant plus loin, de physique de suspensions/amortisseurs, restreint une nouvelle fois tout le plaisir de pilotage dans bien plus de situations qu’on ne le croit. Par exemple, il est du coup impossible de prendre de la vitesse dans les successions de vagues qui jonchent certains tracés puisqu’on a trop peu d’effet d’impulsion ou de rebond pour permettre d’allonger ou absorber les obstacles. De plus, cette année, il faut une nouvelle fois jouer sur des pistes aux sauts sous-dimensionnés, mal dessinés, qui ressemblent souvent au petits jumps du circuit du coin plutôt qu’aux obstacles mémorables de différents circuits réputés. Ce constat est encore plus flagrant sur les quelques nouvelles entrées au calendrier 2019 qu’il a fallu, vraisemblement, créer à la va-vite sans modèle réel avec certaines pistes vraiment inintéressantes telles que Shanghai par exemple.
Comprenons-nous bien, si on pointe ici bien des défauts, c’est pour mettre en lumière une stagnation flagrante dans l’approche du gameplay dont fait preuve Milestone avec MXGP. Si en tant que néophyte la recette vous plait depuis le début, il y a fort à parier qu’elle vous plaira aussi ici. En revanche, si vous êtes passionné, que vous suivez chaque année la série avec énormément d’espoir face à un potentiel encore inexploité, vous resterez une nouvelle fois sur votre faim avec ce sentiment de jeu bien trop restrictif pour permettre de s’amuser des heures et des heures sans en voir trop vite les limites. C’est d’autant plus rageant que le studio fait des progrès sur certains points puis change totalement d’orientation à travers les opus, peinant à trouver un équilibre arcade/simulation exemplaire.
I did it (almost) my way !
Alors qu’on a critiqué plus haut le level design sous-dimensionné de certains des circuits, l’idée de l’ajout cette année d’un éditeur de piste avait de quoi émoustiller les foules rêvant déjà de reproduire les tracés des meilleures tracks du globe (coucou le championnat US). Introduit dans le premier opus Monster Energy Supercross, l’éditeur de piste de Milestone s’était montré assez convaincant de par son accessibilité, mais manquait cependant encore de pas mal de choses pour être vraiment complet. En effet, basé sur une multitude de virages et obstacles prédéfinis, nous dépendions obligatoirement de ce que le studio nous mettait à disposition, et malheureusement, ils n’étaient pas tous bien modélisés et surtout pensés. Nous avions beaucoup d’espoir de voir l’éditeur s’améliorer dans le second opus de Supercross, mais le peu d’avancée à ce niveau fut vraiment décevant. C’est donc un peu frileux que l’annonce d’un éditeur pour MXGP fut reçu, et pour être intéressant, ce dernier allait avoir besoin de sacrées évolutions.
Désormais, à la création d’une nouvelle piste, il est possible de choisir parmi 3 environnements (forêt, désert, côte) et une nouvelle fois se servir des modules prédéfinis. Autant le dire tout de suite, ces derniers sont encore bien trop peu nombreux pour permettre la création de tracés divers et variés. De plus, le manque d’un outil d’élévation permettant la création de montée/descente ou même tout simplement de sauts, se fait vraiment ressentir... On se retrouve en fait avec un éditeur de piste de “supercross” dans des environnements ouverts. Il n’est pas non plus possible de placer des objets de “décoration” pour combler le vide des terrains. Pas de public, tente, camion, stands… Un peu à l’image des jeux eux-même, Milestone peine vraiment à aller au bout de ses idées en ne parvenant pas à proposer des features complètes. Alors oui, on peut “s’amuser” à faire quelques pistes et il est facile de les partager avec la communauté, mais on est bien loin d’avoir un outil complet capable de donner vie à des circuits intéressants qui ressemblent à de vrais terrains de motocross.
2019 : check
Saison 2019 oblige, on retrouve l’intégralité des teams MXGP, MX2 et tracés de l’année en cours, et, il faut bien l’avouer, pilotes et motos jouissent toujours d’un soin particulier. C’est d’autant plus vrai lors des différents menus de customisation qui permettent une nouvelle fois un large choix de produits sous licence aux innombrables combinaisons de personnalisation possibles. Seul le constructeur Suzuki manque à l’appel des motos disponibles à l’achat, fait surprenant tandis que sont toujours présents KTM, Honda, Yamaha, Husqvarna, Kawasaki et TM à travers leurs modèles 2 et 4 temps que ce soit en MX2 et MXGP. Toutes avec un son qui leur est propre et également différent selon les pots d’échappements choisis. Il faut bien entendu toujours améliorer les performances de sa machine pour rester compétitif, surtout en mode carrière ou l’on démarre en bas de l’échelle. Tandis que différents sponsors sont disponibles si on souhaite rouler sous nos propres couleurs, il est également possible d’intégrer les équipes officielles. Longtemps réclamées par les joueurs, ceux-ci seront donc ravis d’avoir leurs idoles pour coéquipiers. Sorti de ça, il faut avouer que la carrière manque cette année cruellement d’intérêt ; bien que classique dans les précédents opus, ici, le contenu est encore plus léger. Fini l’intérêt de gagner auprès des plus grosses structures, il n’y a plus non plus d’objectif précis à réaliser pour garder son guidon et l’on peut changer, avant chaque course, d’équipe comme bon nous semble sans contraintes particulières. Il faudra d’ailleurs se montrer patient pour acheter de nouvelles pièces ou de nouveaux équipements pour notre pilote puisque les récompenses de crédits sont assez maigres et les prix élevés. Selon les pistes l’IA peut se montrer coriace, mais agit toujours comme si elle était seule au monde fonçant à travers tout. Il est dommage que Milestone n’ait pas récupéré son système ANNA de MotoGP 19 basé sur le deep learning pour un comportement plus “humain” des concurrents.
Avec un MXGP Pro fort séduisant visuellement, nous nous attendions cette année à ce que la barre monte encore d’un cran ; espérant également retrouver enfin un mode à 60 images par seconde. Rien de tout ça au programme, MXGP 2019 se montre inégal avec des circuits souvent assez vides et un rendu global tout juste correct sorti des pilotes et motos soignés. Pas de 4K au programme, mais un framerate stable à 30 fps, sur Xbox One X tout du moins, et le HDR est également de la partie. On note en revanche des animations du pilote réussies, ce dernier réagissant bien à la piste, loin de la rigidité d’antan.
Pour les amoureux de grands espaces, on retrouve une nouvelle fois le playground, carte ouverte en free-ride composée de divers circuits de motocross, supercross et cette année waypoint. Il est en effet possible de tracer ses pistes à travers l’environnement ouvert en plaçant des checkpoints grâce à un outil intuitif et de les partager à la communauté. Divers défis jonchent aussi le playground, du passage de portique à la récupération de médailles ; sympa sans pour autant occuper des heures, cela reste tout de même agréable à parcourir.
Enfin, et on a franchement l’impression de se répéter, mais il n’y a toujours pas de salon pour choisir ses parties en multijoueur. Il faut une nouvelle fois se contenter d’un simple “partie rapide” qui nous balance dans n’importe quelle session. Pour jouer selon ses propres paramètres, il faudra se tourner vers les salons privés, et avoir des amis à inviter pour combler les 12 places disponibles en ligne. Inutile de dire que c’est décevant, surtout après que MotoGP 19 l’ait proposé des mois auparavant.