Qu’il était difficile de faire oublier le sacro-saint Richard Burns Rally de Warthog Games paru en 2004, c’est pourtant ce qu’a réussi à faire un certain DiRT Rally en 2016 sur Xbox One. Après une longue période d’early access PC, le titre est sorti et a mis tout le monde d’accord avec un gameplay exigeant, bien loin des épisodes comme Dirt 3 et Showdown qui, bien que sympathiques, commençaient réellement à s’éloigner de l’ADN de la série. Aujourd’hui, c’est à la suite de ce fameux opus de 2016 que l’on s’attaque, sobrement appelé Dirt Rally 2.0.
“Dans la vie tu peux lever le bras mais pas le pied”
Si DiRT Rally est aujourd’hui encore si apprécié de la communauté des simracers, c’est justement parce qu’il a assumé, dès le départ, qu’il ne serait pas un jeu accessible. Avec sa conduite exigeante, il tournait le dos au grand public mais ouvrait grand les bras aux joueurs avides de réalisme et prêts à enchaîner les spéciales, tours et tonneaux pour s’améliorer encore et encore. La réelle satisfaction venant plus du fait de réussir à prendre le dessus sur la machine et jouer avec elle qu’à gagner des spéciales.
C’est avec ces souvenirs en tête qu’on s’est lancé dans Dirt Rally 2.0, et si les premiers tours de roue sont plutôt plaisants, après un petit moment on se dit que quand même, tout ça coule un peu trop de source. Deux possibilités s’offrent donc à nous, soit on est devenu excessivement bon, soit le titre est diablement plus accessible que son aîné. Il n’a pas fallu longtemps pour que la seconde option commence à se confirmer. Heureusement pour certains et malheureusement pour nous, le titre semble avoir perdu ça et là plein de petites choses qui faisaient le sel de la conduite du premier opus. Si l’on aborde directement ce point ici, c’est parce que quiconque a joué à Dirt Rally sait que le temps d’adaptation était assez important pour se familiariser avec les commandes et surtout la physique. Ici, on se surprend à enchaîner directement les tours, par exemple en rallycross, avec une facilité déconcertante mettant la voiture à l’envers dans tous les virages sans quasiment jamais être inquiété par un retour de bâton. C’est plaisant, pas de soucis, mais la courbe de progression s’en voit instantanément impactée et le plaisir qu’on avait à se battre avec la voiture n’est plus vraiment d’actualité. Globalement les véhicules semblent plus légers et l’inertie dans la direction grandement réduite. S’inscrire dans les virages est beaucoup plus facile puisqu’on est rarement déséquilibré sur les freinages appuyés et les appels contre-appels passent comme une lettre à la poste. Semblant emprunter beaucoup à Dirt 4, les transferts de masses se maîtrisent également plus facilement et un simple coup de volant dans la direction opposée remettra la voiture en ligne sans prendre de gros retours de force. Précisons également que faute de moyens, le test fut réalisé uniquement à la manette, et si on ne doute pas que le volant doit offrir de bonnes sensations, le “problème” ne vient pas du contrôleur, c’est que beaucoup de choses ont été aseptisées.
Ce qui a le plus perdu en termes de physique est le comportement des amortisseurs et tout ce qui touche au sur et sous-virage. La voiture semble ici parfois clouée au sol et dépourvue de suspensions, elle s’écrase moins au freinage et talonne à la réception de gros sauts où dans les cuvettes à haute vitesse n’est pas vraiment un problème. Une impression de rigidité se dégage donc du feeling de la voiture. En rallye le constat est assez similaire, on remarque en revanche que le contact au sol a gagné en crédibilité et les différentes surfaces semblent mieux retranscrites. C’est le cas notamment du tarmac qui offre un grip plus cohérent que dans Dirt Rally. De manière générale, la traction s’est améliorée et on ressent mieux les différences entre les transmissions. Inutile de dire que sous la pluie en propulsion, il faudra s’armer de patience et jouer de dextérité pour maîtriser les chevaux lâchés sur les roues arrière. Sortie de ça, il faut avouer qu’on reste un peu sur notre faim. Si certaines choses ont évolué dans le bon sens, d’autres semblent vraiment avoir été simplifiées alors qu’elles procuraient d’excellentes sensations dans le premier opus et on regrette ce revirement de situation après un Dirt Rally à la direction assumée.
Contenu léger et plus si affinité
Si le gameplay nous a déçus, on ne peut pas dire que la carrière (baptisée “mon écurie”) relève le niveau. Premièrement, il faut être connecté aux serveurs Racenet pour pouvoir y accéder, ce qui signifie que quelqu’un qui joue hors ligne devra se contenter des modes parties rapides. Bâtis sur les mêmes bases que celle du premier opus, le but est toujours de recruter du personnel dans son équipe, d’acheter ses voitures et gérer son budget. Au fur et à mesure qu’on roule avec nos véhicules, on débloque diverses améliorations. Malheureusement toujours très austère, on regrette que le système de sponsor et de livrée personnalisée de Dirt 4 ne soit pas de la partie. Véritable point noir de Dirt Rally, la carrière n’a pas vraiment bougé d’un poil et propose toujours des championnats de rallye et de rallycross à travers un contenu une nouvelle fois trop léger. On compte seulement six destinations différentes, le hillclimb a disparu et l’absence par exemple du rallye de Suède (neige) se fait cruellement sentir. Ce dernier sera ajouté plus tard pour les possesseurs du season pass, accompagné du rallye d’Allemagne et du Monte-Carlo. Fort de la licence WRX, le mode rallycross comprend lui la plupart des voitures, pistes, pilotes ainsi que le format de course du championnat officiel. On devrait également retrouver du contenu supplémentaire plus tard cette année comme par exemple la piste de Neste en Lettonie mais il faudra repasser à la caisse… Une cinquantaine de voitures réparties sur différentes catégories (groupe B, rallycross, R5, R2…) sont disponibles à la sortie, inutile en revanche de chercher des WRC puisque la licence n’appartient pas à Codemasters. Toutes jouissent d’un soin assez remarquable et sont souvent un plaisir pour les yeux avec en prime de jolis reflets sur les carrosseries.
D’une manière générale, le titre est visuellement plaisant bien qu’assez inégal. Plus beau ingame que durant les différentes cutscenes, on remarque pas mal de détails très sympas sur les bords de pistes. Là où il nous a également marqués, c’est sur la beauté de certaines skybox semblant toutes droit sorties de Forza Horizon. Avec des effets de lumières impeccables et des reflets sur pistes humides saisissants renforcés par un HDR remarquablement efficace, on quitte parfois la route des yeux pour admirer le soin apporté à certains décors. Testé sur Xbox One X, la technique a aussi fait un bond en avant, fini l’aliasing à foison dont souffrait Dirt Rally, ici le jeu est propre, tourne à 60 images par seconde quasiment sans broncher et en 4K. La partie sonore est elle aussi un plaisir pour les oreilles avec des sons de moteurs convaincants, les passages de rapports et les rupteurs de certaines caisses en caméra cockpit étant carrément déments. Enfin, les notes sont dictées par Stéphane Prévot, copilote belge bien connu du monde des rallyes qui, s’il n’est pas le meilleur pour les phrases d’avant et après course, excelle quand il s’agit de lire son carnet de notes à pleine balle.