L’événement de cette année était assurément un très bon cru en termes d’annonces et de nouveaux jeux dévoilés, en témoigne notre résumé des Game Awards et les nombreux articles publiés en direct cette nuit. Pourtant, le plus gros événement jeu vidéo de l’année a manqué de saisir une occasion en or, celle d’évoquer les nombreux licenciements qu’a connus l’industrie cette année.
Des milliers de licenciements dans le jeu vidéo en 2023
On s’accorde à dire que l’année 2023 a été exceptionnelle pour le jeu vidéo. Il suffit de voir le nombre d’excellents jeux nommés dans les différentes catégories pour se rendre compte de la qualité des productions sorties cette année.
Baldur’s Gate 3, Spiderman 2, Starfield, Armored Core VI, Resident Evil 4, Street Fighter 6, Diablo IV, Star Wars Jedi : Survivor, The Legend of Zelda : Tears of the Kingdom, Alan Wake II ou encore Super Mario Bros. Wonder... on aurait presque du mal à croire que tous ces jeux sont sortis la même année, et c’est pourtant bien le cas. Le cru 2023 était exceptionnel pour la production de jeux vidéo, il y en a eu pour tous les goûts.
Derrière le rideau, ce sont bien des studios composés d’hommes et de femmes passionnés qui œuvrent en coulisse pour proposer le meilleur, souvent avec des horaires difficiles et dans des conditions pas toujours idéales. Et malgré des productions de haute qualité et un secteur en croissance, l’année 2023 a pourtant été marquée par un nombre impressionnant de licenciements dans le secteur.
Selon les données collectées par Videogamelayoffs, plus de 6000 personnes issues de l’industrie du jeu vidéo avaient été licenciées en octobre dernier, et on sait que ça a continué depuis, notamment chez Ubisoft ou chez Amazon. Electronic Arts, Ubisoft, Team17, Twitch, Firaxis Games ou Niantic, difficile de trouver un studio ou un éditeur qui n’a pas licencié cette année.
Dès le mois de janvier cette année, Microsoft annonçait que 10 000 employés allaient être mis à la porte, avec une nouvelle vague à l’été 2023, jugée « nécessaire et régulière » pour « la gestion de notre entreprise ». Environ une centaine d’employés chez 343 Industries ont ainsi été licenciés cette année, le studio phare de Xbox, responsable de la franchise Halo.
Les Game Awards, le rendez-vous manqué
Alors que des milliards sont dépensés en rachats et que les profits continuent de croitre, chaque licenciement sonne comme une terrible nouvelle, une incompréhension dans un secteur qui pèse plus que le cinéma et la musique réunis avec près de 250 milliards de dollars cette année.
Alors que les développeurs et les développeuses sacrifient bien souvent plus de temps que prévu pour terminer un jeu, empiétant sur la vie de famille. On aurait pu imaginer que les Game Awards soulignent cette catastrophe, mais il faudra repasser.
En arrivant sur scène, Geoff Keighley a rappelé que les Game Awards étaient une célébration du jeu vidéo, une reconnaissance du travail réalisé en 2023 par l’industrie. « Il n’y a rien de plus puissant et de plus immersif qu’un jeu vidéo extraordinaire », a déclaré le présentateur en introduction, avant de faire un tour de quelques têtes d’affiches présentes dans le public.
Si l’événement a vocation à célébrer le jeu vidéo, pourquoi ne pas rappeler combien celles et ceux qui créent ces expériences si spéciales sont importants ? Que sans les développeurs et les développeuses, rien de tout ça ne pourrait exister ? Selon les estimations, le nombre de licenciements dans le jeu vidéo a augmenté de 716% en 2023 par rapport à 2022, une véritable catastrophe passée complètement sous silence pendant l’événement le plus regardé du secteur.
On le sait, certains studios ne se portent pas vraiment bien. On pense à Bungie avec Destiny 2 ou à Ascendant Studios avec Immortals of Aveum. Alors que les paillettes brillent et que les perspectives de croissance du jeu vidéo sont au beau fixe, des hommes et des femmes sont mis de côté après avoir donné le meilleur et souffrent comme jamais. Il aurait été souhaitable de souligner leur travail et de leur rendre justice aux yeux du monde et à la hauteur des enjeux.
Pourquoi Geoff Keighley a-t-il choisi d’éclipser ces problèmes aux Game Awards ? Cela reste un mystère. En 2021, quand Activision Blizzard était sous le feu de cas de harcèlement, le présentateur avait pris la parole pour confirmer que la société ne serait présente d’aucune manière à l’événement. « Il n’y a pas de place pour les abus, le harcèlement ou les pratiques prédatrices dans aucune entreprise ou communauté » avait-il indiqué, avant de concéder que les Game Awards étaient un événement qui pouvait inspirer le changement. « Je réalise également que nous disposons d’une grande plateforme qui peut accélérer et inspirer le changement ». Cette année, hélas, cela n’a pas été le cas.