Dans le petit monde du jeu de versus fighting, Tekken fait figure de vétéran. Depuis 1994, d’abord sur borne d’arcade puis console, la série de Bandai Namco a réussi à survivre aux âges quand d’autres y ont laissé des plumes ou, pire, sont maintenant portés disparus. Avec Tekken 7, sorti initialement il y a deux ans de cela dans les salles d’arcade japonaises, le challenge est de taille puisqu’en plus d’arriver au beau milieu d’une année chargée de concurrents, il est aussi le premier jeu de la série à sortir sur la génération actuelle de console.
Père Castor
Je tiens d’emblée à m’excuser auprès de tous les fans de Tekken lisant ce test, mais il me paraît indispensable de commencer par le plus gros défaut du jeu pour pouvoir continuer l’esprit tranquille. En effet, attendant ce Tekken 7 de longue date et ayant été conquis par le mode histoire d’Injustice 2, c’est la bave aux lèvres que je me suis jeté sur La Saga Mishima, mode histoire du jeu narrant les péripéties de la famille Mishima comme son nom l’indique. Par où commencer si ce n’est un mélange des genres de cinématiques complètement à côté de la plaque. On a toujours été habitué aux phases de narration dessinées couplées aux cut-scenes 3D mettant en avant un peu plus d’action. Cette fois-ci, les phases en 2D sont centrées sur un seul et même personnage, un reporter en quête de vérité sur les Mishima, et plus particulièrement sur Jin Kazama. Disons-le tout net, ces séquences sont insupportables. Le doublage anglais est infecte au point de se demander s’il n’est pas réalisé à l’aide de Voxygen… En plus de ça, il n’est pas rare de tomber sur deux séquences audio du même narrateur se chevauchant et rendant toute compréhension impossible, ou encore y subir de longs temps de chargement de plusieurs secondes gelant le récit en plein milieu d’une phrase.
Ce dernier point n’est d’ailleurs pas imputable uniquement à ces phases narratives 2D puisque les cinématiques 3D en souffrent aussi. Le jeu est en chargement constant pendant les cut-scenes et cela génère très souvent des freezes ou des transitions sèches hachant un récit déjà fort décousu. En effet, s’il est toujours plaisant de découvrir de nouveaux secrets ou de faire avancer l’histoire de la famille Mishima, on peut enlever au moins 10 à 12 chapitres inutiles sur les 15 présents dans le jeu. Autant dire qu’il ne reste pas beaucoup de séquences à sauver sur les trois petites heures dédiées à ce mode. Parmi ce qu’on peut jeter, comment ne pas citer un combat à l’arme à feu (si si) avec Lars ou les cinématiques non-retouchées tirés tout droit des anciens jeux Tekken de l’ère PS2 et PS1. Le jeu ne brillant pas forcément par sa technique, c’est le coup de poignard qui nous a achevés.
T’aimes ça les tartines d’os ?
Depuis Tekken 6 et Tekken Tag Tournament 2, le jeu s’est indéniablement mis au niveau des consoles nouvelles générations. En revanche, il n’est pas exempt de tout défaut. Si la qualité graphique du titre satisfera bon nombre de joueurs, il semble tout à fait approprié de souligner l’aspect “baveux” voire flou des différents combattants. Fort heureusement ce problème de netteté ne s’applique qu’aux différents belligérants puisque les arènes sont elles très bien réalisées et plutôt agréables à l’oeil, bien qu’un peu petites.
La petite taille de ces arènes impacte directement le gameplay de ce Tekken 7 puisque, comme tout monde le sait, un combattant acculé risque de souffrir. Si les coups au sol et coincer les adversaires sont toujours d’une redoutable efficacité, ce Tekken 7 limite les combos à rallonge trop faciles à sortir en martelant simplement les boutons de la manette. Il s’agit ici d’un des clichés les plus ancrés dans l’ADN de la série et le millésime 2017 compte bien s’en défaire. Pas forcément moins facile à prendre en main, mais sans aucun doute plus difficile à maîtriser, ce numéro 7 incorpore savamment de nouvelles notions de gameplay, absentes de la série jusque-là, mais dans les normes du jeu de baston moderne comme les attaques ultra, ici nommées Rage Arts. Contrairement à Injustice par exemple, les Rages Arts sont de vrais game changers puisque ces terribles attaques retirent près d’une moitié de barre de vie à votre adversaire. En revanche, il est impossible de savoir où en est notre “jauge d’ultra” puisque celle-ci est tout simplement absente.
Difficile de s’y retrouver et de se faire la main pour un débutant, voire même pour un joueur ayant un peu de bouteille, car le jeu ne dispose tout simplement pas de mode didacticiel digne de ce nom. On a juste un mode entraînement où l’on matraque un mannequin pour parfaire ses combos et c’est tout. En terme de mode solo, le jeu se montre aussi peu généreux avec les “tataneurs du dimanche” puisqu’il n’embarque qu’un mode versus, un mode arcade plutôt classique et court (5 combats seulements) et des mini-story d’un seul combat accompagné d’une cinématique pour une grosse dizaine de personnages. Pour les amateurs de poupées Barbies, le titre se dote d’un mode personnalisation plus complet que celui d’un Tekken Tag Tournament 2 par exemple. Les costumes complètement barrés ne manqueront pas de pulluler en ligne lors des semaines et mois à venir.
Ça en fait du monde sous les projecteurs
C’est justement en ligne que ce Tekken se montre tout simplement excellent. Non seulement, la partie réseau du jeu se montre sans faille mais en plus, et ce malgré le manque de modes de jeu (uniquement du versus), les combats font monter la température de manière assez incroyable. Moins frénétiques et plus techniques, ces derniers ne sont pas avares en effet de ralenti lorsque les deux combattants donnent un coup au même moment. C’est alors qu’inconsciemment on se rapproche de l’écran pour regarder de plus près et espérer toucher le premier, surtout lorsqu’il s’agit du coup décidant de l’issue du combat, d’un côté comme de l’autre. Les streams compétitifs sur Tekken 7 ont un bel avenir devant eux avec ce dernier point souligné, ainsi que grâce à la technicité du titre revue à la hausse.
On notera un casting varié et presque exempt de clones (on a quand même Kuma ET Panda présent dans le roster…). Ainsi, exit Christie Monteiro et Tiger en clone d’Eddy Gordo. En revanche, on peut noter la disparition notable de Roger le kangourou ainsi que celle de Mokujin. Du côté des présents, les historiques et favoris du jeu comme Jin Kazama, Lili, Asuka, Paul, King ou encore Hworang sont toujours de la partie. Les petits nouveaux se taillent une belle part du gâteau avec les arrivées d’Akuma, tout droit venu de Street Fighter, Lucky Chloe la star J-Pop, ou encore Katarina la brésilienne plutôt rapide (ce qui ne devrait pas déplaire aux néophytes souhaitant se faire la main) pour ne citer qu’eux. Au total, sur les 37 personnages d’ores et déjà disponibles, on en compte 9 totalement inédits. Il y a donc de quoi faire, et soit dit en passant, passer du temps dans la sélection de personnages est un modèle d’ergonomie, comme le reste du jeu d’ailleurs. Tout ce qui est à l’écran est clair et c’est assez rare pour être souligné.