Silent Hill Downpour a une ambition : celle d’enfin faire oublier Silent Hill 2, chef d’œuvre des jeux vidéo dont la réputation traverse les années. Pour ce faire, Konami a confié le développement de son bébé au studio Vatra Games, situé en République tchèque. La recette : reprendre ce qu’il y a de mieux dans les épisodes précédents et y apporter un nouvel éclairage. Prêt à frissonner ?
Perdu dans la colline
Le début du jeu nous permet de faire connaissance avec Murphy Pendleton, un prisonnier qui ne va pas tarder à être transféré. On ne nous dit pas grand-chose de cet homme dont on va contrôler la destinée. Il semble porter un lourd secret inavoué (condition sine qua non pour s’aventurer à Silent Hill), une sorte de mélancolie permanente, et on ne nous dira alors rien sur les raisons de son incarcération. Par contre, il est tout de suite présenté comme un personnage à qui la violence ne fait manifestement pas peur… L’introduction du jeu est un modèle du genre, et si elle était mise en ligne en démo sur le live, il est probable qu’elle provoquerait des achats. Tout de suite, notre curiosité est attisée par cet homme, manifestement complexe, et on a envie de savoir ce qui lui est arrivé. Pendant son transfert, un accident du bus lui rend la liberté. Il va alors tenter de tout faire pour s’échapper. Très vite il aura l’occasion de choisir son comportement en aidant ou pas une fliquette en danger…Au joueur de voir ce qu’il veut faire, même si fondamentalement cela ne change pas grand-chose au déroulement de l’histoire : toutefois, la fin du jeu sera impactée par ces choix moraux (il y en a trois dans le jeu). Il ne lui faudra pas longtemps pour réaliser qu’il est dans un lieu déserté, à l’ambiance de fin du monde qui est tellement familière aux habitués de la saga Silent Hill.
La première fois qu’il basculera dans le monde parallèle de la ville maudite, il comprendra qu’il est sans doute la seule personne douée de raison dans ce lieu. Sa quête pour s’en échapper se mêlera à la résolution de ce qui taraude son esprit au plus profond de lui-même…
Sans surprise, on retrouve les ingrédients de tout bon Silent Hill : un héros qui a un problème à régler avec lui-même et qui le fera en traversant des épreuves cauchemardesques, quelqu’un d’ambigu à l’histoire lourde, avec une volonté de survivre qui dépasse tout. Dans le déroulement de l’histoire, plutôt bien menée quoique sans surprise majeure, on s’éloigne toutefois de l’angle très psychologique et intellectualisé du référent Silent Hill 2. Si les mécanismes de l’histoire peuvent y faire penser (tout est centré sur Murphy, on ne donne aucune explication sur la mythologie de la ville), sa progression va plutôt piocher du côté de ses suites.
L’impression générale est la même que quand on regarde un film américain qui est un remake d’un film japonais. L’histoire est la même, les thèmes aussi, mais l’angle est différent. Plus direct, plus limpide, et aussi avec plus d’action. La logique de Konami de confier les épisodes de la saga fonctionne ici plutôt bien, et accouche d’un jeu qui ne fait pas preuve d’originalité, mais qui éclaire cet univers de façon légèrement différente. Si c’est une force pour Downpour, c’est aussi sa limite. En effet, il y a un aspect pot-pourri dans cet épisode qui ne lui permet pas de développer une personnalité propre marquante. On se retrouve dans un lieu familier, mais sans surprise. Au moins, Vatra Games a parfaitement compris ce qu’était Silent Hill, et respecte le cahier des charges beaucoup mieux que ne le faisait le très moyen Homecoming. L’autre limite est l’utilisation du monde parallèle, en retrait du monde réel. Chaque passage dans le monde de l’horreur n’a malheureusement qu’un intérêt limité, avec en point d’orgue des échappées folles quand on est poursuivi par une sorte de nuage rouge. A l’inverse, le monde réel semble plus fou encore. Les maisons désertes, témoignages de massacres passés ou de fuites paniquées, provoquent une tension bien supérieure et très bien rendue. Dommage que l’équilibre entre les deux mondes n’ait pas été mieux maîtrisé, cela donne l’impression que l’univers monstrueux n’est qu’un gadget dont la présence serait obligatoire. D’une façon générale, plus que dans les premiers jeux, la peur cherche à s’installer à travers des événements soudains, délaissant l’angoisse presque permanente des deux premiers épisodes. On aura toutefois du mal à lui reprocher cela, puisque c’est la direction prise par la série depuis le troisième épisode.