Je vais faire mon Piranha Bytes-coming out. J’avoue avoir toujours apprécié les jeux de rôles de ce studio allemand fondé en 1997. Depuis leur très jeune et perfectible Gothic sorti sur PC en 2001 j’ai suivi assidument toutes leurs productions en m’extasiant sur Gothic 2, puis en étant ravi de retrouver leurs jeux après mon lâche abandon du PC avec Risen sur 360 en 2009. Oui, même Risen, moche, lourd, à la progression très lente avait trouvé grâce à mes yeux. J’ai même pris suffisamment de plaisir sur Risen 2 pour le finir. Un véritable fanboy en somme qui a presque pleuré lorsqu’il apprit que Risen 3 avait boycotté la Xbox One. Presque parce que, quand même, les jeux Piranha Bytes sont très loin d’être des parangons d’esthétisme et de jouabilité. Austères, rigides, difficiles et dotés d’une courbe de progression trèèèès lente, ils ont tout pour rebuter l’aventurier du dimanche. Elex, leur dernier né ne déroge pas à la règle allant même jusqu’à tenter de créer un univers atypique, pot pourri de science fiction, de post apocalyptique et de fantasy. Autant dire que l’aventurier du dimanche a déjà prévu d’aller à la piscine le weekend.
On met tout ça dans un mixer et hop !
ZzzzzzZZZZZzzzzzZZzz… pop ! Et voilà un superbe mélange de post apo avec du cuir et de la drogue façon Mad Max, de fantasy avec des magiciens et des gros berserkers en armure et du space opera avec des mechas et des fusils lasers ! J’imagine la tête des scénaristes quand ils ont dû prendre tout ça et tenté d’en faire un truc cohérent. Avouons-le tout de suite, ils n’y arrivent pas et Elex se paye l’intro la plus mauvaise qu’il m’ait été donné de jouer dans un jeu de rôle depuis longtemps. Même pousser une voiture en plein désert tombée en panne d’essence après trois kilomètres de route était plus sympa. Le mixer des scénaristes de Piranha Bytes prend pour l’occasion la forme d’une gigantesque comète qui vient de s’écraser sur la planète Magalan. Toute civilisation est détruite, des cendres de Magalan les derniers survivants se regroupent et tentent de construire un nouvel avenir au centre duquel se trouve l’ELEX. L’ELEX est une ressource laissée par le météore, puissant, addictif si on l’ingère, il est considéré comme providentiel pour la survie par certains ou un nouveau danger à proscrire pour d’autres. La guerre pour l’avenir de Magalan se prépare entre les quatre grandes factions qui tentent d’imposer leur vision aux peuples libres.
Une météorite, une grande catastrophe et hop, nous voilà transporté dans un monde post-apocalyptique que l’on dirait issu du Kamandi de Jack Kiby à savoir un univers où l’on croise technologie avancée, épée et magie dans les ruines de notre ère contemporaine. Dans ELEX, ce pot-pourri s’explique vis à vis des motivations de chaque faction. Les Berserkers sont revenus à l’âge médiéval/fantasy. Ils rejettent toute technologie et utilisation de l’ELEX. Régis par un principe de lois particulièrement dures, ils essayent de redonner à Magalan son aspect primaire en utilisant la Mana qu’ils cultivent avec de gigantesques plantes. Les Clercs sont leur opposé, ils voient en l’ELEX un moyen de créer une technologie qu’ils considèrent comme le seul avenir des peuples de Magalan. Ils prêchent l’entraide sous couvert de principes religieux plutôt extrémistes. Les Hors-La-Loi, eux, prônent la liberté, d’agir et de faire ce qu’ils jugent bon, ils prennent l’ELEX comme un simple moyen de survivre parmi tant d’autres et une drogue capable de stimuler l’esprit. Leur organisation est plutôt mafieuse et ils n’ont aucun scrupule à faire des raids sur les autres factions. La dernière faction, et pas des moindres, regroupe les Albes. Ces derniers essayent de ne faire qu’un avec l’ELEX en l’absorbant en grande quantité. Une drogue qui leur enlève tout sentiment mais qui les rend extrêmement puissants. Ce qui est problématique car ils ont fermement l’intention d’anéantir les autres peuples jugés inférieurs. Dépendants totalement de l’ELEX, leur victoire signifierait la fin de l’humanité.
C’est dans ce contexte de factions, inhérent aux jeux Piranha Bytes que l’on prend le contrôle de Jax, un général Albe redouté et prestigieux, doté d’un charisme de moule. Envoyé dans le territoire des Berserkers pour une mission d’assassinat, son vaisseau est mystérieusement abattu. Il parvient à survivre au crash mais est directement accueilli par une escouade Albe qui l’accuse d’avoir échoué dans sa mission et l’abat sans autre considération en le laissant pour mort. Sauf que non, et heureusement pour nous sinon ELEX aurait eu la palme du RPG le plus court jamais créé. Jax, se réveille après un long coma, désintoxiqué de l’ELEX (oui c’est bien rapide) et surtout délesté de tout l’équipement qu’il avait. C’est donc tout nu qu’il va rechercher le voleur et surtout partir dans une quête de vengeance qui va l’amener à rejoindre une faction, affronter les Albes et sauver Magalan par la même occasion. Voilà, pour le pitch de base toujours un peu long à expliquer dans un jeu Piranha Bytes.
D’abord survivre, puis après survivre, et enfin survivre !
Ne vous attendez pas à une partie de plaisir, vos premières heures dans ELEX vont être particulièrement ardues, le moindre petit animal vous sera fatal et pour couronner la chose, même au début du jeu, il y a très peu de “petits animaux”, on rencontre surtout beaucoup de “gros animaux” avec une tête de mort à côté de leur nom pour montrer que ce n’est pas la peine d’essayer de les combattre avec la hache rouillée qui va vous accompagner durant les dix premières heures de jeu. Oui, la montée en puissance dans ELEX est trèèèèès lente, très longue et fastidieuse. On passe le plus clair de son temps à jouer au chat et à la souris avec les monstres, tenter de leur échapper pour éviter le game over. Non seulement le gain de niveau est lent mais chaque arme nécessite pour être utilisée d’avoir atteint un certain seuil avec ses compétences. Un seuil qui semble à première vue inatteignable pour certaines. Cette épée empoisonnée volée à la sueur de votre front et faisant le double de dégâts que votre arme pourrie vous fait de l’œil ? Dommage car pour pouvoir l’utiliser il faudra atteindre 50 en force et 60 en dextérité, bien loin de vos 20 et 15 que vous avez actuellement. Si en plus on sait que chaque passage de niveau fait gagner 10 points de compétence à répartir et que lorsque l’on arrive au seuil de 30 il faut dépenser deux points pour en gagner un, c’est assez désespérant, voir même démotivant. Et pourtant on s’accroche.
Enfin, certains joueurs vont s’accrocher, d’autres auront lâché l’affaire depuis bien longtemps devant la technique limitée d’ELEX avec ses animations et ses combats rigides, l’austérité de ses graphismes pas vraiment moches mais loin d’être beaux, son interface mal fichue et… tout aussi austère. Tout est fait pour qu’on déteste ELEX à moins de savoir où on met les pieds à la base et qu’on ait un tant soit peu apprécié les titres Piranha Bytes pour ce qu’ils sont, car sachez que si vous aviez aimé la série des Risen, les Gothics, vous allez adorer ELEX.
Car petit à petit, l’univers d’ELEX pose ses bases et, aussi foutraques soient elles à première vue, elles arrivent à trouver une certaine cohérence et ce que les scénaristes mettent du temps à imposer, les graphistes et les concepteurs du monde d’ELEX y arrivent sans aucun mal. Le monde d’ELEX est immense, varié et son exploration particulièrement plaisante. L’originalité d’ELEX vient du jet pack que Jax découvre au début du jeu. Ce dernier lui permet d’atteindre les hauteurs par petites poussées, d’éviter des chutes mortelles, d’échapper à ses adversaires et de rendre l’exploration totalement libre. Petite limitation toutefois, le jet pack ne peut être utilisé qu’un court laps de temps et doit se recharger par la suite, si on anticipe mal la longueur d’une traversée d’un précipice, c’est la chute mortelle assurée. Avec le jet pack, on découvre petit à petit Magalan, sa richesse, sa variété, son immensité, on élabore des plans d’attaque, on prend un réel plaisir à arpenter un monde vivant, fourmillant de détails et au final... attachant.
La richesse d’ELEX se trouve aussi dans ses quêtes nombreuses sans être redondantes, elles tissent autour de Jax une véritable toile dont certains fils sont liés les uns aux autres. Beaucoup de quêtes peuvent être résolues de nombreuses manières, certaines demanderont à choisir une cause ou une faction, certaines disparaîtront d’elles-mêmes car étant lié à la résolution d’une autre donnée par un PNJ différent. ELEX est généreux et bien plus profond qu’il ne le laisse voir à ses débuts et sait récompenser les joueurs les plus patients. Pour l’anecdote, il m’a fallu attendre près d’une vingtaine d’heures de jeu pour pouvoir me sentir utile au combat et ne pas mourir trois combats sur quatre. Il faudrait un long guide afin d’aider un joueur à réussir ses débuts dans ELEX, je vais juste donner quelques conseils. Privilégiez les quêtes aux combats, elles rapportent plus de points d’expérience ; attention toutefois car certaines seront à faire à plus haut niveau et elles ne sont pas indiquées comme tel. Explorez au maximum et ne vous limitez pas aux alentours de la région des Berserkers, n’attendez pas pour aller rejoindre la cité des Clercs, le Dôme, au nord et celle des Hors-la-loi à l’est. La carte est parsemée de téléporteurs qui rendront les déplacements plus faciles et moins risqués après leur découverte. On peut voir les objectifs des quêtes en les sélectionnant directement sur la carte, abusez de cette possibilité. L’homme qui va vous accueillir au début du jeu peut être recruté dans la première ville après avoir résolu sa quête, faites-la en priorité, car avoir un compagnon de voyage au début du jeu est essentiel. Il sert de sac à point de vie, et permet de gérer les combats contre les groupes d’adversaires. Ramassez, volez et revendez tout ce qui vous tombe sous la main, les sous sont essentiels pour bien commencer l’aventure. Et enfin ne choisissez une faction qu’au dernier moment, lorsque vous aurez la possibilité de rejoindre les trois proposées.