Le Retour du Roi. Chaque année on nous reparle de ce Roi du football déchu qui doit revenir dont ne sait où pour reprendre le trône qui lui revient de droit. Ce trône toujours occupé par le suzerain FIFA. Chaque année on attend…en vain. L’année dernière, après de nombreuses recherches, j’avais retrouvé la trace du Roi. Il logeait dans une maison de retraite pour anciens jeux de foot appelée « La Résidence des Pieds Fleuris ». Lorsque je lui avais rendu visite, il était attablé avec d’anciennes gloires du ballon rond virtuel telles que Kick Off, Sensible Soccer, ISS 64, Super Sidekicks et Football Champ. Il ne payait pas de mine, semblait fatigué, presque abattu. Il regardait de ses yeux tristes le terrain de football derrière la baie vitrée. Il était habillé de menus roses très moches et écoutait de la musique classique. Je lui avais fait un signe de la main pour m’annoncer et m’étais assis à côté de lui. Tout au long de notre entrevue, il m’avait tenu des propos incohérents en imitant les voix de Grégoire Margotton et de Darren Tullet. Lorsque je l’ai quitté, jamais je n’aurais cru le voir en cette année sur un terrain de foot et au sommet de son art.
L’amateurisme du club
On nous avait prévenus : 2014 était une année de transition pour la série. Le PES de l’année précédente, bien que fier d’être le fer de lance footballistique du moteur maison Fox Engine, n’était pas une priorité de la maison Konami. A tel point que le créateur de la série ne fut nullement impliqué dans celle-ci, préférant se concentrer corps et âme à l’élaboration de l’édition 2015. Et la voilà ! Toute belle, toute fraîche, sentant bon le gazon et le footballeur en sueur ! C’est avec solennité et impatience que l’on insère la galette dans notre console préférée et que l’on attend patiemment l’installation des 9,8 Go du jeu et de ses mises à jour. On n’y peut rien, c’est la next gen. Passé un temps de chargement et de connexion au réseau un peu long on arrive enfin sur le menu du jeu qui nous arrache des larmes de joie et caresse nos oreilles.
Envolés les menus roses dégueulasses avec leur flèche grise sur les encarts sélectionnés, finie la playlist musicale enchaînant samba et musique classique ! PES 2015 a évolué et propose de jolies tuiles inspirées de son concurrent direct et d’une playlist pop/rock très agréable avec Wilkinson, Aviici, American Authors et Cold War Kids. Cela faisait longtemps qu’un PES ne s’était pas présenté de façon aussi agréable… même si au final on déchante assez vite. Il suffit de soulever une tuile pour retrouver caché tout les menus poussiéreux des anciennes versions. Au lieu de faire le ménage en totalité, chez Konami on préfère soulever le tapis et tout mettre en-dessous. L’ergonomie, passée cette première approche, est catastrophique et nous fait le coup de Retour Vers le Futur en nous offrant un panel complet de toutes les tares que l’on subissait sans broncher il y a dix ans de cela. PES nous sert des menus gris, sobres et toujours la même police que la série utilise depuis plus de 5 ans. Malgré son entraînante playlist, PES 2015 nous offre un habillage morne, un manque de vie et d’entrain que l’on retrouve dans tous les modes de jeu qu’il propose.
PES 2014 était un épisode de transition, de ce fait on lui avait pardonné ses modes de jeu Ligue des Masters et Vers une Légende sans aucun intérêt. Alors qu’en 2013 on appréciait de voir quelques cinématiques montrant notre joueur signer dans un nouveau club ou avoir des retours du bureau en tant qu’entraîneur, on fut déçu de voir que tout cet enrobage avait disparu l’année suivante. Ces deux modes étaient devenus des enchaînements de matchs sans intensité, sans vie, sans intérêt. On est triste de retrouver ces deux modes aussi vides dans PES 2015. Si l’on rajoute à ce déficit de vie l’absence malheureusement récurrente du championnat allemand et du vrai nom des équipes anglaises qui ne seront jamais remplacées en termes d’intérêt par les championnats d’Amérique latine, PES manque clairement de charisme. Comparé à FIFA il se trouve clairement relégué dix ans en arrière et vu les carences de FIFA à ce niveau là, ça fait mal. Seul le mode myClub, un ersatz de l’Ultimate Team de FIFA avec un habillage de maison de retraite et la licence des coupes d’Europe parviennent à sauver le jeu du naufrage. C’est peu et heureusement pour PES 2015, l’essentiel est ailleurs…
Le professionnalisme de l’équipe
Il faut attendre que PES 2015 mette ses crampons et enfile son maillot pour nous faire oublier son habillage et ses modes de jeu honteux. Sur le terrain il retrouve sa superbe et nous donne enfin un plaisir que nous avions cru depuis longtemps cantonné à de vagues souvenirs. Les progrès réalisés depuis la version « beta » PES 2014 sont énormes. Dès la prise en main, on apprécie grandement la fluidité des actions et de l’animation. Les joueurs bénéficient d’un Fox Engine bien mieux maîtrisé et enfin au service du gameplay. On n’assiste plus au jeu de massacre de l’année dernière avec son trop plein de collisions et ces joueurs n’arrêtant pas de tomber sur une cheville ou un mollet mal placé. Nettement plus réactifs, ils évitent, esquivent et se déplacent de façon réaliste et pertinente à chaque phase de jeu.
Le jeu est posé et plus lent que dans FIFA, il est aussi beaucoup plus accessible que PES 2014. Le novice, même sans passer par le mode Entraînement composé de petits jeux sympathiques, réussira à construire des actions à sa première partie et surtout à prendre énormément de plaisir. Le mode normal par défaut reste très permissif au niveau des défenses, les passes en profondeur sont de véritables coups de poignard, et nos coéquipiers profitent du moindre intervalle pour se faufiler vers le but. Construire son attaque est un véritable régal, on prend beaucoup de plaisir à tenter talonnade, passe lobée, une-deux pour des actions de buts d’une grande richesse et totalement ouvertes à nos envies et notre intuition. Pour les joueurs les plus aguerris, rassurez-vous, dans les modes de difficulté élevés les défenses sont moins apathiques, les gardiens plus réactifs mais les possibilités d’attaque restent tout aussi jouissives.
Attention toutefois à ne pas s’enflammer en attaque car PES 2015 fatigue beaucoup plus les joueurs. La course et le pressing sont vraiment à utiliser avec parcimonie si l’on ne souhaite pas finir le match sur les genoux. Beaucoup de joueurs seront dans le rouge dès le milieu de la seconde période et les effets se font irrémédiablement ressentir dans leur prise d’appel, leur course et leur positionnement défensif. Le jeu impose une construction léchée, posée et variée particulièrement plaisante qui marque le grand retour de PES au premier plan à ce niveau là, d’autant plus que le jeu jouit d’une excellente physique de balle.
Des supporters en bois
Le plaisir est tel que l’on arriverait presque à oublier les commentaires navrants et redondants du duo Margotton/Tullet. S’ils ne sont pas totalement à côté de plaque en annonçant un corner sur un dégagement des poings du gardien dans l’axe, ils sont particulièrement irritants à chaque intervention du commentateur anglais inutile et même pas drôle. On croise les doigts pour qu’il ne soit pas reconduit l’année prochaine. Les à-côtés ne sont pas tous réjouissants ; si on reste pantois devant la beauté des modélisations de certaines stars, nettement plus réussies que sur FIFA, les modèles des joueurs lambda sont fades et génériques et donnent l’impression d’avoir à faire à des pantins sans vie. En parlant de vie, les abords des stades en manquent cruellement et même si les supporters réagissent bien aux actions, l’ambiance visuelle en cours de match pèche par son absence. On est loin de la générosité en détails durant les matchs du concurrent direct.
Dans la case des petits aléas qui chagrinent, on note la présence de quelques bugs comme un ballon franchissant clairement la ligne sans que l’arbitre ne s’en émeuve et quelques errements de l’IA, assez rares heureusement que ce soit pour les joueurs de champ ou les gardiens. Même si ces aléas interviennent de temps en temps, on ne constate rien de vraiment alarmant qui puisse entacher durablement l’énorme plaisir que l’on éprouve durant les matchs.
L’autre gros point noir du jeu, outre son habillage de maison de retraite et ses modes de jeu en bois, reste dans ses premières semaines le jeu en ligne. Les serveurs sont totalement à la rue, les maintenances se suivent les unes après les autres, et il est toujours très difficile de trouver des joueurs auxquels se confronter. Malgré de nombreux essais, il nous a été impossible de faire une partie en ligne sans problèmes, que ce soit pour trouver un adversaire ou pour jouer sans lag. On espère que cela soit réglé assez rapidement.