Edito - L’E3 de la dernière chance ?

«Qui va faire quoi ?» le 18 avril 2015 @ 16:162015-04-17T09:23:57+02:00" - 142 réaction(s)

Étrangement, alors que les annonces des machines sont faites et que les forces en présence semblent plutôt clairement établies, cet E3 2015 est sans doute celui que j’attends le plus depuis longtemps (oui, oui, je l’attends même plus encore que celui où les PS4 et Xbox One ont été montrées). L’objet de ma curiosité est de voir comment les grands constructeurs vont gérer une situation qui s’est développée à une vitesse stupéfiante et de façon plutôt inattendue.

En effet, chacun va devoir relever des défis, plus ou moins faciles, pour conforter sa position, la défendre, ou pour tenter de progresser le plus possible. Si Sony a le beau rôle, les deux autres vont devoir cravacher pour tenir le coup. Qu’on soit un fanboy de Sony ou pas, peu importe, il est fortement souhaitable qu’ils y arrivent, à moins qu’on ne souhaite un monopole qui est devenu crédible en un temps record. Plutôt que d’attendre bien sagement de voir ce qui va se passer, je vous propose de pratiquer le petit jeu des pronostics. Attention, il n’est ici nullement question de porter des jugements de valeur sur ce qui est bien ou pas, c’est bien la stratégie et la communication qui m’intéressent dans cet édito.

Nintendo reste dans une sorte de marché parallèle, déconnecté de la course à la puissance

Chez Nintendo, l’air de rien, il y a du mouvement. La grande nouveauté, c’est la diversification avec l’arrivée des licences de la marque sur mobiles. Le but avoué est de générer un maximum de revenus, bien entendu, mais aussi de faire venir un nouveau public vers les véritables consoles. Contrairement à ce qu’on aurait pu croire, les joueurs sur mobile ne sont pas du tout forcément des joueurs sur d’autres supports… Il y a donc là un pari réel qui est fait. A mon avis, c’est un pari très malin et qui pourrait bien être gagnant. Autant les gamins n’ont pas forcément accès tout de suite aux consoles, autant les parents n’hésitent pas à les laisser sur les tablettes. Pour s’assurer un public, il faut l’éduquer très jeune, donc la tactique me semble prometteuse. L’autre actualité chaude concerne la nouvelle 3DS, mais cela est plus de l’évolution que de la grosse nouveauté. La question est surtout de voir comment celle-ci va être vendue, et comment les joueurs vont donc être invités à repasser à la caisse. Nintendo reste dans une sorte de marché parallèle, déconnecté de la course à la puissance. Pourront-ils tenir cette position encore longtemps ? C’est la question qui va se poser cette année.

Mon pronostic : Nintendo va faire un E3 en apparence décevant, sans faire beaucoup de vagues, mais va se montrer actif dans les coulisses pour renforcer des accords commerciaux. D’un point de vue « consoleux » ils ne montreront pas grand-chose, mais à l’inverse ils sauront se montrer efficaces auprès du grand public.

Les ventes se font toutes seules

Parce qu’en face, il y a le rouleau compresseur Sony. Eux-mêmes sont surpris des résultats de leur PS4, conscients, sans doute, qu’ils vendent une machine, une marque, du marketing, mais pas de jeux ou si peu… Bien peu d’exclusivités AAA, et celles-ci font preuve d’une toute petite ambition, même si à l’inverse elles sont remarquablement vendues et toujours réalisées au minimum proprement. Autant la situation est confortable, puisque les résultats sont exceptionnels sans efforts, autant cela rend l’exercice de la grande messe annuelle périlleux. Sony a toujours été d’une grande nullité dans ses prestations à l’E3, mais dans le même temps a toujours été redoutable dans ses prestations autour de la sacro-sainte conférence. Ils sont depuis longtemps maîtres de la peau de banane, de l’argument qui porte, du mensonge bien étudié et de bonne guerre dans le business. A moins d’une grande surprise, Sony va se présenter avec un planning bien vide jusqu’à la fin de l’année. Bien sûr, ils vont nous faire le coup habituel et combler avec des vidéos de jeux multi-supports, avec 2 exclues de DLC, et surtout avec une vidéo de Uncharted 4 pour l’année prochaine. A eux de bien doser, car au final est-ce bien dans leur intérêt de parler de jeux ? N’est-il pas préférable pour eux d’éviter ce sujet sur lequel ils ne sont pas spécialement à l’aise ? Ainsi, je prédis une conférence d’un vide intersidéral, ce qui serait à mon sens le meilleur mouvement pour Sony. Les ventes se font toutes seules, sans qu’ils cherchent à proposer grand-chose, auprès d’un public docile et acquis. A leur place, je ne bougerais pas d’une oreille, et je continuerais de regarder les courbes de ventes en faisant des promesses pour 2016 qui n’engagent à rien. Il ne doit pas être très compliqué de tenir la majeure partie de la conférence en s’auto-félicitant des résultats, puis de laisser des éditeurs tiers en remplir le reste. La vague de bienveillance pour la PS4 suite à un lancement magnifiquement orchestré est toujours là, Sony doit juste continuer de surfer dessus. Mais après tout, peu importe la conférence en elle-même, comme je le disais ils ont toujours été médiocres dans cet exercice, sans que cela n’ait aucune conséquence. C’est plus les à-côtés qui m’intéressent. Là où il y avait moyen d’utiliser la stratégie habituelle de Sony, c’est-à-dire l’attaque du concurrent plus que la mise en valeur de son produit (ou plutôt l’attaque du concurrent pour mettre en valeur son produit par opposition), il n’y a plus beaucoup d’accroche. Sony est ultra-leader. Un leader qui attaque son concurrent plutôt que de se concentrer sur son produit, ce serait un aveux de faiblesse et ce serait assez mal perçu. Ce serait même une erreur manifeste, puisque cela ne pourrait se traduire que par de la publicité gratuite. Et puis les multiples rétropédalages de Microsoft positionnent maintenant les machines à un même niveau, sans compter qu’il y a des sujets qu’il vaut mieux éviter. Par exemple la connexion obligatoire, moquée par Sony, mais dans les faits indispensable sur PS4 comme sur Xbox One. C’était une évidence dès le départ, ces machines sont conçues pour être connectées. Sony a fait le malin de façon très astucieuse sur le sujet, mais doit maintenant se faire oublier. Ils sont très forts pour ça, ils l’ont déjà fait plein de fois sur divers sujets, je ne m’inquiète pas pour eux. Il faut juste qu’ils s’ajustent bien à cette position de leader, en restant finalement les plus discrets possible, et tout ira bien. S’ils parviennent à reprendre ce costume sans encombres, je leur décernerai pour la énième année d’affilée la médaille du meilleur service marketing de tout le milieu. Le petit risque est qu’ils se laissent aller à un peu trop de prétention et qu’ils donnent trop d’importance à leurs concurrents.

Mon pronostic : Sony va faire acte de présence, ne pas montrer grand-chose, et ne pas dire grand-chose. Ils vont se contenter de passer des deals avec des éditeurs tiers, et de continuer leur stratégie très simple et redoutablement efficace qui est de faire croire que tous les jeux sont sur PS4 et y sont mieux qu’ailleurs. Après tout, pourquoi proposer des jeux quand une campagne de pub pour un jeu multi-support ne fait apparaître que la mention PS4 ? Contrairement à ce que dit la publicité, la PS4 n’est pas « for the players », ou seulement un petit peu. Elle est pour le grand public qui joue de toute façon à 90% aux jeux multi-supports. Il n’y a donc pas grand-chose à gagner à cet E3, il faut juste y être bien visible, et c’est ce qu’ils vont faire. L’immobilisme a très bien marché jusque-là, ce n’est pas en plein succès qu’on change la recette.

On pourrait croire que je critique Sony, mais qu’on ne s’y trompe pas, c’est tout l’inverse. Je suis admiratif du flair de Sony pour capter le marché et proposer exactement ce qu’il attend. Si je déplore la direction prise, et donc instaurée, par la PS4, je n’ai rien contre Sony, c’est le marché qui fait ses choix. L’objet de l’édito est d’ailleurs bien d’examiner le succès ou non des stratégies, pas de les critiquer. Et un bon marketing, c’est important, c’est ce qui donne l’image au produit, ce qui a un impact direct sur celui qui l’utilise. Comment il le perçoit, et par extension le plaisir qu’il en retire.

Microsoft se doit de très vite entrer dans la peau du challenger

Enfin, il y a celui pour qui cet E3 est celui de la dernière chance : Microsoft. J’exagère ? Bon, oui, ok, j’en rajoute sans doute un peu, mais il faut ce qu’il faut pour avoir un titre d’édito qui donne envie de cliquer non ? Je n’aimerais pas être dans leurs chaussures à l’heure actuelle, tant l’option à suivre semble peu évidente. Les chiffres sont un cauchemar à analyser. Il y a eu combien de consoles Xbox One vendues ? Entre 10 et 12 millions ? Certes, en large proportion aux US, mais il n’en demeure pas moins que ces résultats ne sont pas mauvais. C’est comparativement aux résultats exceptionnels de la PS4 qu’ils sont perçus comme tel. Dans l’absolu, la base de machines installées est tout à fait convenable, et le marché « Xbox » est donc bien là. Mais dans le même temps, la perception négative de ces résultats fait que cela revient à une situation d’échec, ce qui crée une dynamique peu vertueuse. Autant Sony est définitivement le leader, autant Microsoft se doit de très vite entrer dans la peau du challenger et se montrer agressif. Si vous vous souvenez bien, ils s’étaient révélés brillants dans ce rôle avec la Xbox 360, pour le plus grand bénéfice des joueurs. La machine était sortie un an plus tôt que sa rivale, mais la configuration était la même : lancement catastrophique (une constante chez Microsoft), adversaire proposant une machine prétendument plus puissante, hostilité de principe des « gamers » (ça aussi c’est une constante), et une concurrente se vendant plutôt bien malgré l’absence de jeux. Microsoft avait alors pris un angle clair : les jeux, les jeux, et encore les jeux, avec pour résultat une ludothèque exceptionnelle qui a fini par contrer l’hostilité du marché. C’est là où se situe la différence essentielle. Ce que veut faire Microsoft n’est pas clair du tout. Les atermoiements ont mis en relief une absence de vision stupéfiante. La Xbox One continue de payer un lancement chaotique, entre communication désastreuse (connexion obligatoire, concept de partage des jeux expliqué avec les pieds…) et positionnement incohérent. Sur ce dernier point, Kinect est le symbole de l’absence de vision de Microsoft avec sa machine. D’abord imposé, il a rendu la machine plus cher, mais sans qu’on ne puisse voir ce que le périphérique pouvait apporter. Développer un Kinect performant, l’imposer, mais sans jeux ou applications montrant sa plus-value qui aurait pourtant pu être réelle, il fallait le faire... Depuis, la machine est repositionnée, et n’a cessé de s’améliorer pour ne plus avoir grand rapport avec celle du Day One. Mais qui le sait, à part ceux qui ont déjà la machine ? Pire, Microsoft, bien plus que Sony, a produit des jeux pour sa machine, pensant que cela pourrait faire la différence, comme ça a été le cas pour la 360. Comment auraient-ils pu prévoir que les jeux exclusifs aux consoles auraient si peu d’effet dans le processus de décision, arrivant loin derrière l’effet de mode marketing et derrière les prétendues performances techniques ? Du coup, plusieurs options sont possibles pour cet E3. Microsoft peut continuer d’appuyer sur les jeux avant tout, sur une fin d’année potentiellement prometteuse, grâce à Forza 6 et surtout Halo 5. Ou bien ils peuvent essayer d’aller sur le terrain de la technique en mettant Direct X 12 en avant. Que cela booste ou pas les capacités de la console importe peu, l’important est de le faire croire, comme on a fait croire que 1080p n’ont rien à voir avec 900p, malgré l’évidence du même rendu sur l’écran de 98% des joueurs. Microsoft peut aussi choisir d’aller sur le terrain des fonctionnalités de leur machine, en constante évolution, et qui a sans doute un peu d’avance sur sa concurrente à ce propos. Si quelques options manquaient au début par rapport à la PS4, chaque mois la Xbox One propose toujours plus, et la machine est maintenant à un niveau “user friendly” (en particulier avec le mal aimé Kinect) bien meilleur que la classique machine de Sony. Bref, Microsoft pourrait essayer de nous faire « une Sony » et de ne pas mettre les jeux au cœur des préoccupations, puisque ça n’a pas fonctionné jusqu’à présent. Les réactions du marché sont tellement imprévisibles qu’il est bien délicat de deviner quelle est la bonne option !

Mon pronostic : Microsoft ne va pas tenter de se battre sur des terrains qui sont acquis à Sony. Pourquoi discuter technique ou fonctionnalité pendant des heures, puisque le formidable travail de Sony a fait que tout le monde a déjà une opinion toute faite ? Ils vont remettre leur costume de challenger et s’appuyer sur les jeux, quand bien même cela n’a pas fonctionné jusqu’à présent. Il y a déjà eu trop de changements de stratégies, il faut stabiliser tout cela, et quand le grand public s’est déjà forgé une opinion, alors il faut s’adresser à ceux qui s’intéressent avant tout au contenu, c’est-à-dire les jeux. A partir de là, le plan va être de reconstruire une base « gamer », par opposition au côté grand public de la PS4, pour faire entrer dans les têtes que la PS4 est pour les « players », la Xbox One pour les « gamers », c’est-à-dire « ceux qui savent ». Cette stratégie peut très bien fonctionner, à la condition expresse que les jeux soient bel et bien là, et surtout soient d’une qualité suffisante pour être des incontournables que tout « gamer qui se respecte » se doit d’avoir joué. Pour contrer l’aspect clinquant des jeux PS4 de l’année prochaine, ce qui sera probablement le cas d’Uncharted 4, il faut de la profondeur de banc et de la variété. En théorie, Microsoft a tout ça en mains, Halo 5 étant un system seller en puissance, et l’année prochaine s’annonçant déjà plus qu’intéressante. C’est donc le moyen terme que doit viser Microsoft, mais cela est risqué. En effet, si Sony peut sans problème se permettre de se louper avec des jeux moyens, ce n’est absolument pas le cas de Microsoft, qui devra réaliser un sans-faute sous peine de voir cette stratégie basée sur le jeu se retourner contre eux. Qu’on ne s’y trompe pas, c’est bien sur Microsoft que se trouve la pression avant l’E3 2015.

Et vous, comment vous le sentez cet E3 ? Vous vous attendez à quoi, et que voudriez-vous y voir ? A vous de jouer au petit jeu des pronostics !

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piotr

24 nov 2016 @ 08:50

Cette haine viscérale envers Sony est affligeante. Sous couvert d’une certaine plume ce que tu fais Rone reste du bashing gratuit et puéril.

« Les ventes se font toutes seules, sans qu’ils cherchent à proposer grand-chose, auprès d’un public docile et acquis ». Mais bien sûr les acheteurs de Playstations sont des moutons bêtes et méchants alors que les acheteurs Xbox sont intelligents et réfléchis. Et pourtant le moove Xbox360 vers Playstation 4 est bien réel, quand l’inverse n’est qu’anecdotique. Elle est là l’intelligence, ne pas rester braquer sur une marque.

Près 75% des possesseurs de One l’ont acheté pour la marque Xbox contre même pas la moitié côté Sony. Alors le public docile et acquis c’est bien du côté Xbox.

« On pourrait croire que je critique Sony, mais qu’on ne s’y trompe pas, c’est tout l’inverse. » Menteur, ton édito n’est qu’un amas de critiques, et tu le sais très bien. Ton ton est systématiquement péjoratif quand tu parles de Sony et mélioratif quand tu parles de Playstation. En bref ton édito n’est qu’un écrit de fanboy, pour les fanboys d’ailleurs quand on lit les commentaires en dessous. D’ailleurs je suis certain que ce genre d’élucubration n’aurait aucun écho sur un forum multi support, c’est tellement simple de prêcher des converties. Personnellement je préfère une analyse un minimum neutre, ton énorme parti pris biaise la totalité de ton point de vue et c’est bien dommage parce que force est de constater que tu as une écriture des plus agréable.

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piotr

22 jan 2017 @ 01:45

Ezekiel.666 rétrospectivement tes écris ressemblent au dindon de la farce. Sony qui ne prend aucun risque ? Quand la One fait ouvertement un doigt d’honneur à tous ses early adopters en abandonnant Kinect sans même avoir éssayé. « L’ADN de la One », cette blague:’-)). Quand en face tu as le Play VR, MS s’empresse d’étaler le chéquier avec facebook pour faire un partenariat et ainsi s’assurer la compatibilité de l’Occulus pour sa prochaine console. Ils suivent Sony en ne créant rien, juste en sortant le chéquier et en suivant son concurrent. Quelle prise de risque. Playstation prend l’initiative de sortir une console en milieu de gen, Xbox suit. La vérité c’est que lorsque Sony éternue MS est malade sur cette gen, le temps où la 360 était un moteur est révolu. Mais ce qui est bien sur un site communautaire c’est qu’entre fan vous vous auto-persuader du contraire alors que sur des sites multi plateformes mon discours est totalement admis aujourd’hui.